Un aveu reste difficile mais c'est un bon moyen pour mettre à plat les malentendus et les non-dits. Le droit à l'erreur existe et certaines entreprises n'hésitent plus à l'intégrer dans leur charte d'éthique. Mohammed B., patron d'une PME, l'affirme. Il n'a pas le sentiment d'avoir fait preuve de faiblesse lorsqu'il a avoué son erreur d'appréciation. «Mon collaborateur m'avait averti de ne pas conclure une affaire avec un gros client de la place. Je ne l'ai pas écouté. Pourtant, il avait raison. Le client en question s'est avéré être un mauvais payeur. Quand j'ai compris que j'avais tort, je le lui ai dit», souligne-t-il. Autre cas de manager. Abdelwahab Kadiry, DG de Tandem Communication, avoue, lui aussi, avoir connu des revers lorsqu'il venait de créer son agence en événementiel. «Je suis certes encore jeune dans le métier et il se peut que je commette pas mal d'erreurs surtout lorsque je manque de visibilité. Quand je les fais, je préfère les admettre et les corriger rapidement pour me consacrer davantage aux réussites», dit-il. Erreur d'appréciation, de management, de comportement ou de gestion, il arrive à chacun de nous de subir un ou plusieurs échecs dans sa vie professionnelle ou même privée. En clair, le management zéro défaut n'existe pas. D'ailleurs, ne dit-on pas que l'erreur est humaine (errare humanum est)? Le plus important est de prendre plus de bonnes décisions que de mauvaises. Mais tout le monde ne vit pas ses erreurs de la même manière. Certains tentent d'apprendre de chaque erreur, de façon à gagner en efficacité, tandis que d'autres tardent à les reconnaître ou les mettent sur le compte d'autrui. «Aujourd'hui, un manager doit pouvoir assumer ses erreurs en les admettant ouvertement», note Youness Bellatif, DG du cabinet Convergence Conseil. C'est une force que d'en tirer les enseignements nécessaires et ce pour plusieurs raisons. «Beaucoup d'aveux peuvent dépoussiérer les sources de malentendus ou de non-dits qui, souvent, froissent les relations à long terme», avance le DG de Convergence. Ensuite parce que les aveux véhiculent toujours le message d'une bonne volonté, de valeurs à transmettre… D'ailleurs, certaines entreprises n'hésitent plus à intégrer dans leur charte d'éthique le droit à l'erreur. Une façon d'augmenter le capital confiance au sein du personnel mais aussi de véhiculer les valeurs de l'entreprise, comme la modestie, l'exemplarité, l'ouverture d'esprit et bien d'autres (voir encadré en page précédente). Ceci dit, admettre une erreur demande beaucoup de tact. «A ne pas utiliser comme un subterfuge pour éviter d'autres problèmes ou pour camoufler ses défaillances», note Mohammed El Yousfi, DG de La Marocaine de Management (cabinet d'audit qualité, sécurité et environnement). Pour M. Kadiry, «sans trop entrer dans les détails de l'erreur, je fais identifier à l'autre le problème, ma part de responsabilité dans l'erreur et les conséquences que j'en tire». L'aveu dépend aussi de la personne à qui on doit des explications. «A quoi bon reconnaître ses torts devant une personne peu compréhensive. Je préfère plutôt les camoufler, à condition de réparer les pots cassés», note Aziz Jallili, chef de projet informatique dans un grand groupe. Beaucoup de managers sont peu préparés à une remise en question Un aveu n'en reste pas moins difficile à faire. Parce que les managers n'y sont pas préparés. «On constate souvent qu'on apprend aux futurs managers, dans les grandes écoles, qu'ils sont des leaders», souligne Youssef Brik, expert-comptable. A force de mettre l'accent sur certaines qualités, ces dernières ne finissent-elles pas, à la longue, par devenir des défauts ? Ensuite, parce que la culture de l'entreprise ne s'y prête pas toujours. «Comment oser admettre son erreur si le manager ne montre pas lui-même l'exemple?», souligne le DG de Convergence Conseil. Néanmoins, cet obstacle est appelé à s'estomper. «Parce qu'au sein d'une entreprise, tout le monde est embarqué dans le même bateau. Il faut savoir partager aussi bien les réussites que les échecs», souligne Jamal Krim, DG de Reco Act, agence de recouvrement des créances. A propos de bateau, rappelons, pour la petite histoire, que le propriétaire du Titanic avait refusé de prendre en compte les recommandations du commandant de bord. Son erreur d'appréciation a coûté la vie à des milliers de personnes. Comme quoi, une décision unilatérale peut être fatale. La reconnaissance de ses erreurs est souvent considérée par le management comme source d'affaiblissement du pouvoir. Or, la négation de l'erreur peut conduire à pire : une décrédibilisation de ce management. La reconnaissance de l'erreur véhicule des valeurs importantes comme la modestie.