Situé à Khouribga, elle est arrivée en peu de temps à attirer des centaines de jeunes de tout le Maroc. Sa force ? Le mode révolutionnaire d'auto-apprentissage et la sur-motivation des élèves. Immersion dans une école pas comme les autres. L'école 1337 à Khouribga a des allures d'établissement venu tout droit des States. Aux côtés de l'équipe hyper souriante, des jeunes en short et tong passant et repassant dans le couloir. L'atmosphère y est résolument décontractée. Dans la cantine, une poignée d'étudiants déjeunent. «Il y en a encore qui dorment, c'est pour ça qu'il n'y a pas beaucoup de monde», glisse Hind El Bernoussi, membre du staff et responsable communication de l'école. Leurs nuits sont courtes. «L'école est ouverte 24h/24. Les élèves travaillent quand ils veulent. Le plus important, c'est le résultat final», indique Yassir, un membre du staff. Apprendre à apprendre Aux étages supérieurs, se trouvent les «stages», comme le nomme l'école. Et sur les murs, des petits messages d'encouragement lancés par des étudiants se mêlent aux graffitis peints par des artistes. Au stage1 se côtoient machine à café, espaces de jeux avec billard, babyfoot et punching ball, et cluster où une centaine d'ordinateurs de dernière génération ont été installés. «On n'intervient jamais auprès des étudiants. On leur dit qu'il est impossible de ne pas trouver la réponse auprès des 300 confrères de l'école», souligne Yassir, membre du staff. Car 1337 est une école où se retrouvent des centaines d'élèves pour échanger et apprendre entre eux. Même la correction se fait entre étudiants. «Nous apprenons aux élèves à être autonomes», insiste Yassir. C'est ainsi qu'a été conçu l'écosystème de la formation. La première école de ce genre a été lancée en 2013 à Paris par Xavier Niel, fondateur de Free Mobile entre autres. La formation est ouverte à tous. Sa pédagogie, c'est le peer-to-peer learning : un fonctionnement participatif qui permet aux étudiants de libérer toute leur créativité comme indiqué sur le site de l'école 42 de Paris, l'ancêtre de 1337. Depuis 2013, plusieurs écoles ont été lancées dans plusieurs villes dans le monde, notamment à la Silicon Valley ou encore à Moscou. Mais aussi à Khouribga. La sélection Le système de sélection commence par un test ouvert à tous sur internet. Une fois validé, les candidats doivent s'inscrire dans un stage de quatre semaines, appelé la Piscine. Premier arrivé, premier servi, les nouveaux arrivants doivent rester sur leurs gardes pour s'inscrire. «Les plus motivés restent scotchés à leur ordinateur pour appuyer sur le bouton. C'est le but de la démarche», indique Yassir. Un processus mûrement réfléchi. «On veut des étudiants impliqués et passionnés par l'informatique. C'est à eux de faire en sorte d'être les premiers inscrits», ajoute Yassir. On peut y accéder sans prérequis de diplômes ou de niveau d'études. Seul restriction : avoir entre 18 et 30 ans. Plongé dans le bain La piscine est un rude stage de quatre semaines organisé pour ne garder que les meilleurs. Les étudiants doivent valider 14 «days» sur cette période, passer un examen hebdomadaire (de quatre heures les trois premières semaines et huit heures pour la quatrième) et participer à des projets de groupe chaque week-kend. Ils doivent travailler d'arrache-pied pour gagner le maximum de points. «Le but de la formation c'est aussi d'apprendre aux élèves de chercher la réponse, de travailler en groupe et d'aller vers l'autre», confie Hind El Bernoussi. «Au premier jour de la piscine, on fait une visite des locaux aux nouveaux arrivants et c'est tout. Ils doivent tout faire seuls», poursuit-elle. Sur les 300 candidats de la première piscine, organisée pendant le mois d'août, seulement 100 ont été retenus. Il faut dire que le rythme d'apprentissage est élevé. «Un jour j'ai travaillé près de 18 heures sans arrêt», atteste Yassine El Omari, étudiant en classe préparatoire à Laâyoune venu faire le stage. Kamal Chahid de Salé (Bac + 5 en finance) nous indique que depuis le début de la formation (9 jours), il a dormi 3 heures en moyenne par jour. Tous les étudiants rencontrés pendant notre visite ont une motivation et une implication hors norme. Ils viennent des quatre coins du Royaume, de milieux différents. Sont déjà diplômés ou en cours d'étude dans des universités ou des écoles traditionnelles mais ont un point commun: la passion pour la programmation et le codage. Seule ombre au tableau : les filles ne sont pas nombreuses. Seulement 10% des candidats. «Le secteur est à connotation masculine», confie le directeur de l'école Larbi Lahlali, précisant que l'école 42 à Paris enregistre le même taux. A la fin de la deuxième sélection, seulement une partie de ces candidats pourront intégrer la formation qui commencera le 1er octobre prochain. Les autres pourront reprendre le cours de leur vie. Mais «quoi qu'il arrive, on aura vécu une belle expérience», conclut Yassine El Omari, étudiant, actuellement en stage. D'où vient le nom «1337» 1337 vient du «leet speak », ce fameux langage, un peu geek, à l'origine destiné pour véhiculer des idées entre initiés et éviter que les noobs (jargon informatique désignant un débutant, parfois jugé d'incompétent) ne se mêlent de la conversation. Le leet speak est donc un langage particulier qui utilise des caractères graphiquement voisins des caractères habituels. Le «5» remplace le «S», le «7» remplace le T, etc. Pour 13 37... rien de plus simple : L=1, E=3 et T=7.