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Erreur médicale : une réglementation spécifique fait défaut
Publié dans La Vie éco le 21 - 11 - 2017

Aucune statistique officielle sur les erreurs médicales. La gynécologie, l'ophtalmologie, la chirurgie viscérale et la circoncision sont parmi les spécialités les plus concernées. Les fautifs sont rarement punis.
Il est difficile de faire le deuil d'une erreur médicale. Abderrahim Fokahi a perdu un œil suite à une opération ophtalmologique subie en 2005 : «La perte de mon œil est due à une infection nosocomiale, aujourd'hui j'ai une prothèse oculaire. Le préjudice est important et je n'arrive toujours pas à faire le deuil de la perte de mon œil...». M.Fokahi est secrétaire général de l'association «Droit du Patient d'Abord», créée en 2013. Autre erreur médicale, autre témoignage. Ilham Ennaouri, mère d'un enfant victime d'une erreur médicale suite à sa circoncision. «Mon fils a été victime d'une faute professionnelle du médecin qui a effectué la circoncision. Il y a eu ablation d'une partie du pénis et, si sexuellement cela ne présente aucun problème, par contre il reste une séquelle au niveau de l'urètre et mon fils devra, toute sa vie, procéder tous les six mois à une opération chirurgicale...C'est lourd à porter et je milite aujourd'hui pour protéger tous les enfants contre ces erreurs qui peuvent être évitées». Dans ces deux affaires, les victimes ont eu droit à des réparations pécuniaires respectives de 300000 et 130 000 dirhams mais aucune sanction n'a été prononcée à l'encontre des médecins. «Le choc est grand lorsqu'il y a une erreur médicale et la réparation du préjudice n'est pas importante pour les victimes...Pour mon cas, je me suis adressée au Conseil national de l'ordre des médecins et au ministère de la santé pour qu'il y ait suspension du médecin qui a fait la circoncision mais pour l'instant rien n'a été fait...Il y a une impunité et la solidarité entre médecins joue beaucoup dans ces cas», souligne Mme Ennaouri. Ces deux cas ne sont pas isolés, actuellement de plus en plus de victimes et leurs familles dénoncent, via la presse ou encore les réseaux sociaux les erreurs médicales qui ont lieu aussi bien dans les hôpitaux que les cliniques privées. Cependant, ni le ministère de la santé ni le Conseil national de l'ordre des médecins ne disposent de statistiques. On se contentera alors, et ce, à titre indicatif, des statistiques de l'association des droits du patient qui dit recevoir près de vingt cas par an venus pour le conseil et l'accompagnement. L'association a été créée en 2013 et vise, comme l'explique sa présidente, Ben Sedrine Kettani Leila, «l'écoute et le conseil des victimes des accidents médicaux, sachant que plusieurs responsables de l'association sont eux-mêmes des victimes d'erreurs médicales».
Hormis l'absence de chiffres, on notera également qu'au Maroc on ne dispose pas non plus d'une étude sur le sujet permettant de renseigner sur la typologie des erreurs, de leur fréquence ou encore du sexe des patients. Mais, selon les témoignages recueillis auprès des victimes et de certains praticiens, certaines spécialités sont le plus concernées, notamment la gynécologie, l'ophtalmologie, la chirurgie viscérale et la circoncision.
Le risque zéro n'existe pas en médecine. «L'erreur est humaine et le médecin est un être humain. Il peut commettre une erreur mais il n'y a pas de volonté de nuire aux patients et ceux-ci doivent le comprendre», avance un chirurgien. L'erreur est ainsi reconnue par le corps médical mais comment peut-on la définir ?
Sur le plan juridique, on distingue deux notions : l'erreur médicale due à une faute professionnelle du médecin, et l'aléa thérapeutique, qui est une aggravation de l'état du patient après son traitement. Les causes principales de ces incidents sont les interventions chirurgicales ou d'exploration, les traitements par médicaments et les infections nosocomiales.
Ces erreurs peuvent être dues à une faute de diagnostic, c'est-à-dire que la faute est commise par le médecin lors de l'examen tendant à déterminer la nature des symptômes présentés par le patient. Ainsi par exemple, commet une faute de diagnostic le médecin qui s'abstient de rechercher des informations relatives à l'état de santé du patient ou qui ne sollicite pas l'avis d'un confrère plus spécialisé alors qu'un tel avis s'imposait ; ou bien encore le médecin qui ne prescrit pas un examen pourtant nécessaire à l'établissement d'un diagnostic. L'erreur peut être aussi due à une faute technique. Soit une faute commise dans l'accomplissement d'un acte thérapeutique (soins) ou non (chirurgie esthétique), qu'il soit à visée préventive ou curative. Par exemple l'oubli de certains consommables dans l'abdomen, le ventre ou l'utérus du patient. Enfin, il peut s'agir d'une faute d'information, c'est-à-dire d'un manquement du médecin à son obligation d'information et de conseil. Par exemple, le médecin n'informe pas son patient des risques graves et normalement prévisibles d'une intervention chirurgicale. Les erreurs sont ainsi déterminées, mais il faut souligner qu'une seule erreur ne suffit pas à engager la responsabilité d'un médecin, encore faut-il qu'il ait commis une faute, c'est-à-dire qu'il n'ait pas dans l'exercice de sa profession délivrer aux patients les soins conformément aux protocoles thérapeutiques en vigueur.
Le médecin n'a pas d'obligation de résultat, sauf en chirurgie esthétique...
Définir l'erreur médicale et prouver l'existence du préjudice est un véritable parcours du combattant. Preuve en est la durée moyenne des procès qui peut aller jusqu'à sept ans. «J'ai entamé la procédure en 2013 et il y a eu en tout 13 jugements, cinq plaintes et j'ai même passé 48 heures de garde à vue pour outrage à magistrat. A la fin de 2016, il y a eu le jugement final. Mais, pour nous, l'affaire n'est pas close tant qu'aucune sanction disciplinaire n'a été prise à l'encontre du médecin. Nous demandons sa radiation définitive de la profession !», indique Ilham Ennaouri. Pour Abderrahim Fokahi, l'affaire a été portée en justice en 2009 et n'a été jugée qu'en 2016 car «il a fallu que je réunisse tous les documents et toutes les preuves pour établir l'erreur médicale».
Il importe de souligner que la victime, souvent peu ou pas du tout avertie en la matière, n'est pas en mesure de prouver elle-même que le praticien, médecin ou chirurgien, a commis une erreur médicale. Elle devra alors recourir à l'expertise médicale, que ce soit par la voie judiciaire ou par la voie amiable. L'expert s'appuiera notamment sur les constatations techniques réalisées, le dossier médical du patient victime, sur la littérature médicale et sur les conférences des sociétés savantes pour déterminer si le praticien a agi dans les règles de la profession. Alors, justement, quelles sont les obligations du médecin ?
Selon les médecins, le praticien doit tout mettre en œuvre pour soigner ses patients mais il n'est pas contractuellement obligé de les guérir. Cependant, lorsque le médecin ne suit pas le protocole thérapeutique qui s'impose on peut dire qu'il ne respecte pas cette obligation. En revanche, en chirurgie esthétique, l'obligation de résultat est retenue pour le chirurgien qui est en faute si son intervention n'aboutit pas aux résultats pour lesquels il s'est engagé vis-à-vis du patient.
En l'absence d'une loi spécifique, les erreurs médicales relèvent du droit commun. Il faut apporter une preuve et passer devant une juridiction compétente qui va trancher sur la question. Les juristes font la distinction entre deux types de fautes en matière d'erreurs médicales: la faute civile et la faute pénale.
La première est définie par le Dahir des obligations et des contrats (DOC) qui dans son article 77 dispose que «tout fait quelconque de l'homme qui, sans l'autorité de la loi, cause sciemment et volontairement à autrui un dommage matériel ou moral, oblige son auteur à réparer ledit dommage, lorsqu'il est établi que ce fait en est la cause directe».
Donc, selon cette définition, il y a une obligation du médecin envers son patient dès lors qu'il commence son traitement. Et de ce fait, lorsque la faute est reconnue par les experts, le tribunal a la responsabilité de fixer des dommages et intérêts. Quant à la faute pénale, les avocats l'assimilent à une "faute lourde". Et l'on fait alors référence aux articles 432 et 433 du Code pénal relatifs à l'homicide et aux blessures involontaires. Sont prévus l'emprisonnement de trois mois à 5 ans et une amende de 1200 DH pour homicide involontaire, et l'emprisonnement d'un mois à deux ans et une amende de 1200 DH pour blessures involontaires.
Toutefois, il est difficile pour les victimes et leurs familles de faire valoir leurs droits. Et ceci pour trois raisons : premièrement, parce qu'il est difficile, aujourd'hui, au Maroc, de prouver l'erreur médicale. «Pour les victimes qui ont recours à la justice, la preuve de l'erreur est l'étape la plus dure et la plus éprouvante. Il faut réunir toutes les informations sur les circonstances et les causes du préjudice permettant d'établir le lien de cause à effet», avance M.Fokahi. Deuxièmement, il y a la lenteur des procédures qui peuvent durer jusqu'à sept ans ou même plus en fonction des cas, et, enfin, le coût financier des affaires portées en justice.
Aujourd'hui, on notera que l'erreur médicale est liée à plusieurs problématiques relatives à la nature de l'erreur en elle-même ainsi qu'au préjudice induit. D'où la nécessité de légiférer afin que le Maroc se dote d'une réglementation spécifique. La proposition de l'élaboration d'une loi sur la responsabilité du médecin en cas d'erreur a été faite, rappelons-le, par le ministère de la justice en juillet dernier lors d'une rencontre relative à l'erreur médicale organisée par l'association des Barreaux d'avocats du Maroc et l'Association internationale des avocats. De leur côté, les médecins du secteur libéral avaient eux aussi proposé un projet de loi sur la réparation des préjudices causés par l'erreur médicale. Ils proposent en fait un barème d'indemnisation comme cela se fait pour l'accident du travail. Une proposition vivement critiquée par l'association des victimes qui estime que «cette proposition arrange les médecins et surtout les patrons de cliniques qui le plus souvent n'ont pas encore d'assurance, même si celle-ci est obligatoire depuis deux années maintenant».
En dépit de l'évolution de la médecine et de ses techniques, les erreurs médicales ont connu une recrudescence ces dernières années. Pendant ce temps, la réglementation et la défense des droits des victimes sont encore à la traîne…


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