Chambre des Représentants : la Commission des secteurs sociaux adopte, en deuxième lecture, le projet de loi sur la grève    Maroc : le gouvernement de Aziz Akhannouch envisage une hausse des péages autoroutiers pour éponger l'endettement    Maroc : adoption controversée du projet de loi sur le droit de grève avec une participation minimale des députés    Le Front de salut national en Syrie appelle Damas à ouvrir un consulat syrien à Laâyoune et à reconnaître la souveraineté marocaine sur le Sahara    Akhannouch : Hausse des salaires depuis janvier 2025 après la réduction de l'IR    La Chambre des représentants adopte à l'unanimité le projet de loi relative à l'organisation judiciaire    Droit de grève : la loi enfin votée au milieu de la fronde syndicale    Droit de grève : les syndicats optent pour la méthode forte    Recettes fiscales en hausse : Lekjaa annonce des finances au beau fixe    Le Groupe espagnol Soho Hotels mise sur le Maroc pour son développement international    Sociétés régionales multiservices : le ministère de l'Intérieur lance une plateforme nationale de suivi    Secteur halieutique : Plus de durabilité, d'innovation et de compétitivité [INTEGRAL]    OCP réalise avec succès une émission obligataire additionnelle de 300 millions de dollars    Activité industrielle: baisse de la production et hausse des ventes en décembre 2024    Mines : Aya Gold & Silver renforce sa présence à Boumadine    Le Maroc, premier pays à l'honneur au Salon international de l'agriculture en France    La présidence palestinienne "rejette fermement" le projet de Trump de contrôler Gaza    Donald Trump décide le retrait des Etats-Unis de plusieurs instances de l'ONU    Israël Maintient sa Position : Pas de Place pour le Hamas à Gaza    Jordan Bardella critique la politique française envers l'Algérie et réclame des mesures de rétorsion immédiates    Bruxelles : des tirs à l'arme automatique perturbent le réseau métropolitain, le narcotrafic en cause    Apaches, aéronefs, drones… Quel est l'impact des dernières acquisitions sur les capacités militaires du Maroc?    Gaza. Le projet de Trump prend l'Iran à la gorge    Zlecaf. Le président ghanéen appelle à davantage d'investissements    CDM des Clubs 25 : Le Trophée présenté à Turin    CDM des Clubs : Sergio Ramos présent !    Equipe nationale (F) : Deux matchs de préparation au programme    Xabi Alonso confirme la présence d'Amine Adli en Coupe d'Allemagne    Accidents de la circulation: 19 morts et 2.445 blessés en périmètre urbain durant la semaine dernière    La Commission nationale de la commande publique valide l'exclusion de l'offre de Somadiag par le CHU Mohammed VI de Marrakech    Projection en avant-première du long métrage « Les Commandements » de Sanaa Akroud    Les prévisions du mercredi 5 février    Vers une Moudawana équilibrée : entre tradition et modernité    Portrait - Pr Karim Touijer : Ce pur "produit" de l'école marocaine brille aux Etats-Unis    Revue de presse de ce mercredi 5 février 2025    Festival : La Dolce Musica s'invite au Maroc    Abidjan, la capitale du rire    Fashion Week 2025 : Le caftan marocain brille à Paris    Rougeole : les associations médicales rappellent l'importance de la deuxième dose de vaccination    Quelle doublure pour Achraf Hakimi? Luis Enrique répond    Mise à niveau des stades marocains : Youssef Belqasmi (Sonarges) dresse un premier bilan    Mercato : Oussama Targhalline en route vers Feyenoord    Jazzablanca 2025 : Black Eyed Peas, Macklemore, Hindi Zahra et bien d'autres au programme    Maroc : Convention pour valoriser les arts équestres et la Tbourida    Maroc : Les salles de cinéma affichent une recette de 127 MDH (+42%) en 2024    Golf. Coup d'envoi de la 49e édition du Trophée Hassan II et de la 28e édition de la Coupe Lalla Meryem    Casablanca : La Fondation Nationale des Musées et la CDG veulent dynamiser la scène culturelle    L'ESPAGNE RENFORCE SON DIALOGUE CULTUREL AVEC LE MAROC    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



La Turquie ou le miroir brisé
Publié dans La Vie éco le 02 - 08 - 2016

Le coup d'Etat donne les coudées franches à Erdogan. Son charisme et sa personnalité ont un rôle catalyseur auprès des masses. Une vague de purges sans précédent est déclenchée. Jusqu'où ira-t-il pour écraser ses adversaires ?
L'histoire de la Turquie contemporaine est celle d'un conflit permanent entre islam et laicité, démocratie et autoritarisme, peuple et élite. Révolution conservatrice, l'arrivée du Parti de la justice et du développement (Adalet Kalkinma partissi – AKP) au pouvoir en 2002 a bousculé les choix de société opérés au début du XXe siècle. Synonyme d'archaïsme social, d'obscurantisme religieux, l'islam était le miroir négatif de l'identité turque. L'AKP voulait apporter un démenti au stéréotype que l'islam serait réfractaire à la démocratie. Il voulait en faire le ciment d'un nouveau pacte social, un modèle pour le monde musulman du Maroc à l'Indonésie. Le coup d'Etat militaire écorche ce message. Ce coup de force est le symptôme d'un «modèle» qui n'a pas encore réglé ses contradictions. L'islam politique en Turquie s'est décliné de manières variées : la lutte armée, l'entrisme dans les partis de gouvernement, la création de mouvements islamiques à vocation électorale. Il a été tour à tour incarné par le Parti de l'ordre, puis du Salut national, puis par le Refah (Parti de la prospérité), le Parti de la vertu (Fazilet partissi), le Parti de la félicité (Saadet partissi). Dans ce parcours, de vives tensions ont opposé réformistes et conservateurs sur les questions de démocratie interne mais aussi sur les projets de société, les compromis avec l'Etat-major et les élites occidentalisées. Parmi les jeunes rénovateurs, un homme s'est distingué, il s'agit de Tayp Erdogan.
Plébiscité pour sa gestion d'Istanbul, il a créé en 2001 l'AKP. Rejetant l'opposition frontale, Erdogan opte pour une ligne réformiste d'apaisement. Refusant le qualificatif d'islamiste, il définit son mouvement comme fondé sur une approche «démocrate conservatrice». Le parti prône l'intégration à l'Union Européenne, l'économie de marché, la bonne gouvernance et la défense des valeurs traditionnelles. L'accent est mis sur l'adaptation au «standard universel», à l'ouverture, à la concurrence mondiale, au dialogue avec la société civile, le respect de l'individu et du libéralisme constitutionnel. Le succès de l'AKP valide la montée en puissance d'une nouvelle élite islamiste portée par trois vecteurs : un parti politique aux solides assises populaires, un patronat islamique conquérant : le Musiad, des confréries religieuses qui irriguent la société en profondeur. Dans la gestion du pouvoir, de nombreux événements ont mis à mal l'imagerie dorée du «modèle turc», de «l'approfondissement démocratique» défendu par l'AKP. En 2012, les affrontements de la place Taksim ont montré qu'un pouvoir très conservateur impose des normes sociales perçues par la frange libérale de la société comme autant de régressions sur le plan des libertés individuelles. Ils illustrent brutalement les clivages idéologiques de la société turque, révélant au passage les contradictions d'un modèle de croissance rapide et, par certains côtés fragile, doublé d'une volonté d'influence régionale de plus en plus difficile à concrétiser. Les dérapages autoritaires d'Erdogan suscitent des interrogations sur sa conception de la démocratie. Elle est longue la liste de ses compagnons de route sacrifiés. Si des rivalités existent, elles sont largement compensées par les liens d'affaires et familiaux tissés entre les différents lignages. Sûres de leur puissance, elles investissent simultanément la société et l'appareil d'Etat. La tarikat de Fethullah Gulen est l'exemple le plus abouti. Beaucoup de ses membres ont rejoint l'AKP. Tant et si bien que l'on peut se demander si elle soutient l'AKP ou si elle est la force qui est derrière. Patiemment, la tarikat a investi et reconfiguré en silence l'appareil d'Etat. Police, armée, justice sont progressivement infiltrés. Le processus de pénétration avait commencé depuis longtemps, mais il s'est amplifié avec l'arrivée au pouvoir d'Erdogan, qui a utilisé la tarikat pour reprendre l'armée, noyauter la fonction publique et l'Education nationale. En quelques années, les disciples de Gulen ont créé un vaste empire médiatique et financier. Ils sont devenus en mesure de peser de manière décisive sur les décisions du pouvoir. C'est ainsi que longtemps allié d'Erdogan, Gulen est devenu l'un de ses farouches adversaires.
Le coup d'Etat donne les coudées franches à Erdogan. Son charisme et sa personnalité ont un rôle catalyseur auprès des masses. Une vague de purges sans précédent est déclenchée. Jusqu'où ira-t-il pour écraser ses adversaires ? Obsédé par la «présidentialisation» du régime, il compte soumettre à référendum une réforme de la Constitution pour se donner les pleins pouvoirs. Dans la transformation en cours, les éventuelles tensions entre Washington et Ankara ne doivent pas masquer les intérêts convergents des Turcs et des Américains dans la région (sécurité, approvisionnement énergétique, corridor Est-Ouest..).
L'Europe tétanisée par la question des migrants, de Daesch et l'ambiguïté de sa position sur l'adhésion de la Turquie dénonce du bout des lèvres les atteintes aux libertés. Le pouvoir turc se montre opportuniste et exploite la situation. Dans ce contexte, une composante de la société turque, celle des classes moyennes citadines est préoccupée des dangers pesant sur son mode de vie. Ce groupe attache une grande importance à la primauté du droit, rejette l'évolution d'une société qui s'orienterait vers un communautarisme ethnico-religieux. Il craint une remise en cause de l'Etat de droit, la disparition de la méritocratie dans les critères de promotions au profit de la solidarité religieuse. Le miroir turc s'est-il brisé sous les tensions de son modèle ?


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.