Depuis 2007, Abdelilah Akram est le président du Wydad athletic club (WAC). Grâce à ces réseaux économiques et politiques, il est devenu le dirigeant le plus en vue du foot national. Portrait d'un super président. Nous sommes le 13 juillet 2011, pour une deuxième année consécutive, Akram accueille l'Assemblée générale ordinaire (AGO) du WAC «chez lui», au Plein ciel Paradise (ex-Lido) à Ain Diab. L'homme de tous les records L'AGO dure 45 minutes, un record dans l'histoire du club. «Cette célérité est le fruit d'un savant dosage entre la carotte et le bâton. En haussant le montant de l'adhésion de 5000 DH à 10 000 puis à 20 000 DH, il a réussi à réduire le nombre d'adhérents. Ceux qui sont restés sont acquis au président», explique Jamal Staifi, journaliste sportif à Akhbar Al Yaoum et un des rares à critiquer les méthodes d'Akram. Ainsi, le nombre d'adhérents est passé de 111 en 2007 à 43 en 2011. Fin stratège, il a réussi à contrôler toutes les structures du WAC. Il devient président de la section football et du Comité directeur qui coordonne l'ensemble des sections du club. Le WAC c'est Akram. Ses sorties médiatique sont rares. L'homme fort du WAC est peu à l'aise face aux médias, il dit préférer travaillé dans l'ombre. S'il n'a à son actif qu'un bien solitaire titre de champion depuis 2007, il peut s'enorgueillir d'avoir bouleverser les us et coutumes non seulement de son club mais aussi celles du football national. Akram investit dans l'image du club. Aux yeux des supporters marocains, le WAC offre les meilleures conditions salariales et sociales pour les joueurs et les entraineurs. Le WAC offre les meilleurs salaires du championnat. le salaires moyen des joueurs est de 12 000 DH avec des pics de 45 000 DH pour les vedettes de l'équipe. En payant un de ses entraineurs, Baddou Zakki, 200 000 DH/mois, le club bat un autre record sous Akram. Cet été, et comme à son habitude depuis quatre saisons, Akram remet ça. À trois jours de l'AGO du club, il réalise un recrutement à faire rougir ses concurrents. Lakhel, Amrani et Kaddioui, trois stars du football national, sont recrutées pour 10 millions de DH. Un nouveau record pour Mr le président et une manière de gagner le cœur des supporters et réussir le cap de l'AGO en douceur. «Akramovich» est né Depuis son arrivé au WAC, Akram cultive l'image du président prêt à tout donner pour son club. Sa première saison, il réalise pour le club un des plus gros mercato de l'histoire du football national (8 MDH). Suite à ce recrutement, les supporters wydadi le comparent avec Roman Abramovich, le richissime propriétaire du club anglais de Chelsea Akram devient «Akramovich». «Dès qu'il est devenu président, il a créé un compte bancaire pour le WAC, où il a mis ses fonds propres pour financer le premier mercato», nous confie un des ses proches collaborateurs. Tout au long des quatre saisons à la tête du club, il n'hésite pas à y aller de sa poche pour assurer des liquidés au club et payer les frais de fonctionnement et les salaires des joueurs. Lors du déplacement du WAC à Lubumbashi en République Démocratique du Congo pour jouer contre le TP Mazembe en mai, le club se permet le luxe de louer un avion pour un vol direct Casa-Lubumbashi. Coût de l'opération : 1 MDH, du jamais vu dans l'histoire du foot marocain. Seul le Ministère de la jeunesse et des sports s'est permit un tel investissement pour assister à l'annonce du pays organisateur de la CAN 2015. «La générosité» de Mr. Président s'explique aussi par le fait que le premier prestataire de services du club n'est nul autre que Plein ciel, son agence de voyages et de locations de voitures. Pour la saison 2009/10, elle a réalisé un CA de 3,5 MDH avec le WAC et pour 2010/11, ce CA a atteint les 6,6 MDH. Akram réalise de bonnes affaires, tout en permettant des facilités de paiement pour le club qu'il préside, gagnant par la même occasion la sympathie de tout le public wydadi. Cette situation est résumé par le site Wydad.com comme suit : «ce qu'il faut retenir de ce rapport financier [2010/11] et de la stratégie générale du club c'est qu'Akram fait investir le WAC dans l'avenir en misant sur des résultats futurs et en cela il se porte garant de la trésorerie au cas où ces résultats tarderaient à venir, pari risqué mais qui n'engage que le Président, espérons pour lui et surtout pour les supporters qu'il le gagne». Akram aime le PAM Désintéressé l'amour d'Akram pour le légendaire maillot rouge du WAC ? Abramovitch avait compris qu'il fallait faire allégeance à Poutine pour continuer à faire fructifier ses milliards. C'est au PAM de Fouad Ali El Himma, qu'« Akramovitch » se ralliera. Le WAC sera son instrument majeur de « Networking » politique. «Si dans les années 80, le Raja a été dirigé par l'Union constitutionnelle, le WAC est désormais entre les mains du Parti authenticité et modernité (PAM)», estime le politologue Mohamed Darif. «C'est un secret de polichinelle, Akram est proche du PAM», renchérit J. Staifi d'Akhabar Al Yaoum, il veut pour preuve la présence dans l'actuel Comité du WAC de Salaheddine Chenguiti et Said Naciri, deux membres influents du PAM à Casa. La proximité du PAM se manifeste aussi par l'organisation de la majorité des meetings du parti du Tracteur au club Paradise. Mais «Super président» sait faire preuve d'écléctisme. Ses réseaux politico-footbalistiques ne se limitent pas au PAM. «En 2008 et pour faire plaisir à son ami, l'istiqlalien Maâzouz, ministre du Commerce extérieur, il ordonne à l'équipe A du WAC de participer à un tournoi dans la ville de Sefrou, où Maâzouz est le président de la Commune. Les matchs se sont joués dans un terrain de terre battue, indigne de la plus grande équipe au Maroc», s'offusque J. Staifi. L'été dernier, il annonce comme nouveau membre de son comité, Jamal Aghmani, ministre de l'Emploi. Cet Usfpéiste s'ajoutait d'ailleurs à un autre politique coopté par Akram dans ce qui fait office de l'exécutif du WAC, Ali Benjelloun, vice-président du maire de Casablanca et éminent membre du Mouvement populaire. Des accointances qu'il lui permettraient de fructifier ses affaires parfois à la marge de la légalité, accusent ses détracteurs. «L'affaire Paradise» Ce self made man a réussi depuis 1985 à créer une success story grâce à ses investissements dans le tourisme, la location de voiture, la pêche, l'agriculture, l'assurance et la restauration. « Plein ciel voyages » et le club « Paradise » constituent les locomotives de son holding. Une réussite qui lui a permit d'être vice-président de la Fédération nationale de tourisme (FNT). Mais tout le monde ne copnsidère pas cette réussite comme un bel exemple d'entreprenariat vertueux. Le contrat avec la Ville de Casablanca lui permettant d'exploiter l'ex-Lido devenu « Paradise » fait jaser. En 2001, Akram signe un contrat avec la Ville pour une concession sur Paradise (29 000 m²) d'une durée de 10 ans. L'homme d'affaires verse en contrepartie 1,35 millions de DH/an et s'engage à investir 30 MDH durant la période du contrat. En 2003, Akram propose à la Ville une concession de 45 ans, en contrepartie d'un investissement de 60 MDH et d'un montant de 2,25 MDH/an à partir 2021. La Ville prolonge le contrat, Akram est sur des nuages. Plusieurs élus locaux considèrent cette opération comme une «vraie arnaque». Hafid El Bakkali, conseiller PJD à la Ville de Casa s'indigne: «Nous sommes perdants sur toute la ligne. Le concessionnaire n'a pas tenu ses engagements sur la première période et nous n'avons trouvé mieux que de lui prolonger la concession sur une très longue durée». il s'était engagé à construire un hôtel 5 étoiles et un parking de deux étages à la place de l'actuel parking. Rien de cela n'a été réalisé. Il y a mieux: le premier bail stipulait dans son article 13 que le contrat ne pouvait être reconduit que pour une nouvelle période de 10 ans. Akram finira par obtenir la concession de 45 années demandée. «L'affaire Paradise», avec celle du restaurant Scala et du club la Forêt verte à Sidi Othmane, affaires dans lesquelles on Akram est accusé d'avoir bénéficié de passe-droits, font d'ailleurs partie des dossiers à l'origine du blocage dans le Conseil de la ville depuis décembre 2010. Qu'à ne cela tienne, l'homme d'affaires proche du PAM ne sera jamais inquiété. Le WAC c'est Akram et….fils Dans les prochains jours, Akram annoncera la nouvelle composition de son Comité. Hafid, le fils d'Akram est un nom déjà assuré de figurer dans le nouveau Comité. «Je ne vois pas de mal à consulter mon fils dans la gestion du club surtout qu'il est adhérent depuis des années. Le WAC a besoin de jeunes dirigeants pour compléter la composition du comité», avance Akram dans une interview accordée au bi-hebdomadaire Al Mountakhab. A la lisière de l'économique et du politique, «Akramovich» est devenu vice-président de la Fédération royale marocaine de football (FRMF) et candidat pour être le premier propriétaire d'un club marocain. Le projet de transformation du WAC d'une association à une société se prépare, il devrait aboutir d'ici trois ans. Le temps que l'ardoise des dettes du WAC envers Akram s'alourdit. Et que le club mythique fondé par le mouvement national pour contrer le colonialisme français, ne tombe quasi-automatiquement dans son escarcelle.