La monarchie se retire-t-elle vraiment des affaires ? Les derniers marchés remportés par le holding royal, notamment dans le secteur énergétique, semblent plutôt indiquer le contraire. Un an après avoir remporté l'appel d'offres international portant sur la centrale thermique de Safi, Nareva holding vient d'annoncer les détails du projet d'un parc éolien dans la région de Tarfaya, marché qu'elle a remporté l'été dernier. Ce parc qui produira 300MW, sera exploité pendant une durée de 20 ans, conjointement par le consortium composé de Nareva, filiale à 100% de SNI, et la compagnie britannique International Power (IP). En novembre dernier, le même consortium avait remporté le marché de la centrale de charbon de Safi, qui sera opérationnelle fin 2012, et qui produira 1300MW, ce qui représente 27% de la demande globale du Maroc, d'ici 2014. Le 25 mars 2010, SNI avait annoncé son retrait progressif de plusieurs secteurs, compréhensible dans la mesure où celui-ci présente de plus en plus de points faibles : la hausse des prix des matières premières, le marché marocain qui s'apprête à libéraliser certaines activités jusque là monopolisées par SNI, en plus la montée de la contestation de la vie chère, et de la hausse des prix à la demande de ces denrées commercialisées par les filiales de SNI… La stratégie de Mounir Majidi et son bras droit, Hassan Bouhemou, est donc logiquement allée vers le renforcement de l'investissement dans des activités régulées comme les banques, les télécoms ou l'énergie. La spécificité de celles-ci est que la capacité à générer du profit n'est pas déterminée par la concurrence -le secteur des télécoms en est un excellent exemple-, mais en mieux négociant avec l'Etat. Sur ce plan là, SNI a un argument de taille : son tour de table, et le pouvoir de décision en son sein, concentré par les représentants du holding tentaculaire du roi, Siger. Le communiqué du 25 mars 2010 annonçant la réorganisation des activités de ONA et SNI à commencer par leur fusion, avait alors clairement indiqué que la nouvelle entité (SNI) allait contribuer à "l'incubation de nouveaux projets", notamment à travers Nareva holding dans l'énergie, Onapar dans le foncier et l'immobilier, Wana dans les télécoms, et la distribution à travers Optorg et Marjane. Le concurrent de Nareva et International Power à décrocher le marché du parc éolien de Tafaya, GDF Suez, a été éliminé par l'Office national d'électricité et ce, parce qu'il a présenté une offre sous-capitalisée, malgré que la copagnie française soit accoudée à la banque belge Fortis et à Crédit Agricole France. Pour l'offre financière de Nareva/IP, elle est financée à crédit bancaire à hauteur de 75%. Les bailleurs de fonds ne sont que les deux premières banques du pays : Attijariwafa Bank, également filiale de SNI, et la Banque populaire, dont le capital est public à hauteur de 64%. En gros, l'entrée d'un groupe privé appartenant au monarque, dans une activité économique dont le seul client est une institution publique (ONE), se fait en bonne partie grâce au financement public. De plus, Ahmed Nakkouch, l'actuel patron de Nareva a été l'architecte des plans énergétiques du Maroc, notamment celui de l'électrification rurale, quand il était directeur général de l'ONE, institution de 1994 à 2007 est directement passé à la tête de Nareva Holding, dont l'unique client en matière d'énergie est l'ONE.