DEVANT LES TRIBUNAUX Chambre criminelle Allo ? Allo ? S'il vous plaît, rendez-moi mon portable. Je vous le paierai. - Mais où êtes-vous, Madame ? - Je suis sur le boulevard Abdelmoumen. - Ne bougez pas, c'est la police judiciaire qui vous parle. On vient vous chercher. Ainsi a commencé une longue histoire de jeunes garçons qui opéraient au vol à l'arraché dans le centre-ville de Casablanca. Ce soir-là, il devait être 22h. Deux jeunes garçons enfourchant une moto bécane, roulant à vive allure, arrachent le sac à main d'une dame qui marchait à pied en compagnie de son mari. Plusieurs plaintes ont été déposées concernant ce genre d'incidents. Les vols à l'arraché se comptent, en effet, par centaines à Casablanca. Mais cette fois-ci, une chasse-poursuite a été engagée par des éléments de la police qui effectuaient une ronde dans les parages. Conduits au commissariat de police, les deux motocyclistes allaient révéler une grosse affaire. C'est qu'au moment de l'accomplissement des premières procédures, le téléphone portable, enfoui dans le sac à main arraché, s'est mis à sonner. A l'autre bout, c'était la victime du boulevard Abdelmoumen qui suppliait les voleurs de lui restituer le cellulaire. Le sac à main contenait de l'argent et des documents. L'affaire est confiée à la police judiciaire ; la 13e section la prend en charge. L'interrogatoire des deux jeunes (Youssef, né en 1983, et Zarzouz, né en 1988) pris en flagrant délit révèle que 16 autres complices étaient dans le coup ! Une descente à Sidi Mâarouf, à Grigouane, au quartier Baladia, à Derb Lihoudi et à Derb Chorfa permet ainsi aux enquêteurs d'arrêter les complices et saisir des motos de grosse cylindrée. La plupart des accusés sont des élèves. Leur âge varie, en effet, entre 13 et 18 ans. Quelques-uns sont des repris de justice. Treize portables, dont certains très sophistiqués (double caméra, par exemple), une somme de 15.000 DH, des chaînes et des bagues en or sont également saisies. Pas moins de 92 actes criminels sont avoués par les 16 jeunes arrêtés qui, à leur tour, ont dénoncé sept autres complices et trois receleurs au quartier Koréa. Une autre descente permet l'arrestation des complices et la saisie de 4 motos, 3 portables, une somme de 1.080 DH et des bagues en or. Ceux-là avouent avoir commis 64 actes criminels. L'enquête conduit à l'arrestation aussi d'une certaine Latifa, alias “Jouika”, pour recel (elle écoulait le butin à Souk Chtaïba). Recel juteux qui lui a permis de s'acheter un appartement à Hay El Baraka, à Derb Moulay Rachid. Latifa est mère de deux enfants, dont un vit en Italie. Il est, lui aussi, recherché pour vol. Lorsqu'il lui arrive de revenir au pays, il ne se prive pas de reprendre ses mauvaises habitudes. A noter que les présumés coupables se servaient de grosses motos pour accomplir leurs forfaits. Des fois, ils utilisaient de simples moto-bécanes dont ils “gonflaient” le moteur en sciant une partie du cylindre. La bande des jeunes et “Jouika” ont été déférés devant le juge d'instruction pour constitution d'association de malfaiteurs, vols à l'arraché, recel…