Seigi Hinata, Ambassadeur du Japon au Maroc Le succès de la récente visite royale dans l'Empire du Soleil Levant continue de susciter l'intérêt des commentateurs et observateurs. C'est le commencement d'une nouvelle ère de partenariat stratégique ciblant l'aide (multiforme) au développement économique et social. Seigi Hinata, ambassadeur du Japon au Maroc, livre son témoignage à travers cette interview accordée à La Gazette du Maroc. Il y met l'accent sur les perspectives de relations pleines de promesses entre le géant asiatique le Maroc, «pays économiquement émergent», présenté comme un modèle pour les pays en développement. La Gazette Du Maroc : Le Japon est un acteur majeur sur la scène mondiale. Comment peut-il appuyer le monde arabe dans ses efforts de développement ? Seigi Hinata : Nous sommes conscients de notre responsabilité en tant que deuxième puissance économique dans le monde, c'est pour cela que nous fournissons beaucoup d'aide aux pays et aux régions qui souffrent de sous-développement à cause de conflits et de pauvreté. En ce qui concerne le monde arabe, il faut d'abord consolider la paix et puis focaliser sur le rétablissement économique, le Japon contribue à la réalisation d'une paix permanente au Moyen-Orient, surtout entre les Palestiniens et les Israéliens. Notre premier ministre visitera prochainement la Palestine et Israël pour les encourager à poursuivre le processus de paix. Le Japon contribue aussi à la construction d'une nation démocratique en Irak et nous avons déjà financé plus de 5 billions de dollars pour le rétablissement de son infrastructure d'électricité, d'eau potable et d'éducation, et nous encourageons les pays arabes aussi à procéder à la réalisation de réformes démocratiques. Quel est le bilan de la coopération bilatérale maroco-japonaise depuis votre nomination ? Le bilan est positif. Le Japon reste le deuxième bailleur de fonds pour le Maroc, et notre coopération qui est partiellement constitué de prêts en Yen, dons et assistance technique destinés au développement économique et technique du Maroc. Dernièrement, pendant la visite de Sa Majesté le Roi au Japon, trois accords ont été signés pour le financement d'un projet d'assainissement de l'ONEP et pour le projet d'électrification rurale de l'ONE ainsi que sur un octroi de facilités en devises dans le cadre du développement global du pays. Le Maroc atteint un niveau de développement qui pourrait aider les pays moins développés avec son expertise, et ce en collaboration et par le financement du Japon. C'est pour cela que nous avons collaboré avec l'Agence Internationale de Développement ma-rocaine pour former 400 cadres sub-sahariens au Maroc par le biais du financement du Japon dans les centres de formation professionnelle, ce qu'on appelle la coopération triangulaire. Et lors de la visite royale, il a été signé un don pour l'équipement de la bibliothèque nationale qui est en cours de construction. Quel a été l'impact de la visite royale sur les relations maroco-japonaises ? C'était la première fois que le Japon eu l'honneur d'accueillir le Roi du Maroc comme hôte d'Etat à Tokyo. Mais il ne faut pas oublier qu'entre notre famille impériale et votre famille royale, il y a déjà des liens étroits d'amitié, tissés depuis les années 80. Votre prince héritier avait visité le Japon en 1987 et le notre, quatre années plus tard, en avait fait de même au Maroc. Les échanges entre les deux familles continuent toujours. C'est dans ce contexte que la visite royale a été effectuée, et lors du dîner d'Etat offert en l'honneur de SM le Roi par leurs majestés impériales, notre empereur a mentionné dans son discours qu'il gardait un bon souvenir de la visite de SM le Roi en tant que prince héritier en 1987. Ce qui est important, c'est que les sentiments d'amitié entre la famille impériale et la famille royale sont partagés, et tout aussi bien par la population japonaise que par la population marocaine. Donc les relations amicales nippo marocaines resteront fortes et solides. A vrai dire, il y a beaucoup de progrès dans le Royaume, et pourtant, le Maroc et le Japon ne se connaissent pas bien vue la distance et vue le volume d'échanges, alors la visite royale a donné l'occasion à la population japonaise pour tisser des relations avec le Maroc et penser à son développement, et ses opportunités au niveau du tourisme et des affaires. Que pensez-vous de l'avenir des relations de votre pays avec le Maroc ? L'avenir s'annonce prometteur. D'abord, parce que le Maroc a réussi à devenir un pays émergent économiquement et que ce pays est actuellement un grand chantier et un modèle de développement pour les pays sub-sahariens. Ce qui importe, c'est que cette tendance continue dans l'avenir sans interruption. Dans ce cas là, il y aurait certainement plus de leaders économiques japonais qui s'in-téresseraient au Maroc comme un pays candidat pour leur investissement et leur business. Le Maroc possède aussi un attrait touristique avec beaucoup d'héritages culturels universels comme Fez, Marrakech et Meknès. C'est pour cela que dernièrement on a constaté une augmentation du nombre de touristes japonais visitant le Maroc. Cela aussi doit continuer. Dans le courant de l'année prochaine on va célébrer le 50ème anniversaire de notre amitié; donc il y aura l'Année du Maroc au Japon et l'Année du Japon au Maroc, ainsi que des événements culturels dans les deux sens. Quel rôle le Japon pourrait-il jouer en vue d'une solution définitive au problème du Sahara marocain ? Le Japon a toujours soutenu un règlement définitif de ce problème par la voie du dialogue entre les parties concernées et cela sous l'égide des Nations Unis. C'est pour cela que le Japon soutient les efforts de l'envoyé personnel du secrétaire général des Nations Unis pour trouver une solution politique et définitive du problème de Sahara. D'autre part, le Japon continuera son assistance hu-manitaire aux réfugiées des camps de Tindouf. En 2002, le Japon avait accordé une aide d'une valeur de 600.000 dollars pour les réfugiés de Tindouf par le biais du Programme Alimentaire Mondial. Et en 2003, nous avions accordé une aide humanitaire en nourriture de 269 tonnes de boites de conserve de poisson. Le Japon porte espoir que cette situation qui a trop duré trouvera bientôt une fin favorable. Que pensez-vous du train de réformes entreprises par SM le Roi Mohamed VI ? Nous avons beaucoup d'intérêt et nous évaluons à leur juste valeur les réformes entreprises au Maroc dans le sens de la démocratie et surtout pour réaliser l'égalité entre les femmes et les hommes. C'est un grand avancement qui mérite d'être applaudi chaleureusement. Comme il a été mentionné dans la déclaration commune publiée à la fin de la visite royale au Japon, nous partageons la pensée selon laquelle ces réformes se fassent selon les principes de l'appropriation et le respect de la diversité de chaque pays. De toute façon, ce qui est important c'est que nous, les japonais et les marocains, nous commencions ensemble à partager solidement les valeurs démocratiques. Je peux vous dire que L'INDH est une initiative importante qui mérite d'être encouragée, c'est dans ce cadre que nous avons signé un accord avec 12 associations non gouvernementales pour bénéficier d'un don japonais d'une valeur de 707.754 dollars en vue de renforcer davantage les excellentes relations d'amitié et de coopération existantes entre le Japon et le Maroc.