Système de change flottant Il n'est pas d'usage de soutenir les autorités monétaires et financières que sont le ministère des Finances et Bank Al Maghrib, mais pour une fois ce sera le cas. En effet, dans les derniers entretiens qu'ils ont eus avec les experts du FMI en février et mars dernier, ils ont rejeté l'idée d'instaurer un système de change flottant. Il ne s'agit pas pour Fathallah Oualalou, ministre des finances et Abdelatif Jouahiri, gouverneur de Bank Al Maghrib, d'un attachement non justifié au système de change indexé à un panier de devises, mais d'une nécessité cruciale pour l'économie. En effet, les autorités monétaires ont bien eu raison d'affirmer que "le régime de change fixe en vigueur a bien servi l'économie Marocaine". Il est vrai que la balance commerciale marocaine va à vau-l'eau. Elle se dégrade de plus en plus. Et qu'en tout état de cause, l'instauration d'un système de change flottant aurait conduit purement et simplement à une faiblesse du dirham. Cela devrait en principe relancer la compétitivité et les exportations. Ce raisonnement est malheureusement faux dans le cas du Maroc. En effet, le dirham dépend surtout de la balance des paiements qui comprend, en plus éléments commerciaux, les paramètres purement financiers. Or, s'il est vrai que commercialement le Maroc a perdu beacoup de terrain, il ne fait aucun doute dans les dernières années les investissements et prêts privés étrangers ont afflué de toute part. De plus la force de l'euro face au dollar a incité les Marocains résidents à l'étranger à effectuer des transferts de plus en plus importants. La barre des 35 milliards de DH de transferts a été franchie. Cela a généré un excédent important de la balance de paiement qui n'est pas sur le point de s'inverser. D'ailleurs, le ministère des finances et Bank Al Maghrib ont rappelé à juste titre que «la balance des paiements est solide, l'inflation modérée, le taux de change effectif réel s'est déprécié depuis 2001, et les estimations du taux de change d'équilibre n'indiquent pas de désalignement». Devant la pertinence de cette argumentaire, les experts du FMI ont été obligés de reconnaître qu'ils se trompaient cette fois sur leur proposition. Il ont ainsi noté "que le régime en vigueur serait approprié si les particularités historiques du Maroc persistaient». C'est-à-dire que tant qu'il aura une "forte dépendance à l'égard des échanges avec la zone euro, et en cas de retombées modiques des chocs des termes de l'échange sur l'activité économique et de faiblesse relative des flux de capitaux", le Maroc aurait à gagner dans son système de change indexé. Cependant, les autorités monétaires à leur tour n'ont pas fermé la porte de la réforme du système de change. Elles affirment que "des analyses prospectives penchent pour une évolution graduelle vers un régime de change flexible". C'est d'ailleurs une voie inéluctable bien qu'elle ne soit pas opportune pour l'heure. En effet, comme le font remarquer les experts du FMI, "au fur et à mesure que l'économie se libéralise et risque d'être plus vulnérable aux chocs externes, un régime de change flexible lui permettrait de s'adapter plus facilement à ces chocs". Pour eux, une monnaie forte marocaine ne saurait être justifiée que par des réformes structurelles ayant pour effet de relever la productivité et l'efficacité. Cependant, dans la persistance des experts du FMI à recommander un système de change flottant, on peut se poser la question de savoir s'ils ne pensaient pas à une dévaluation du dirham. On est tenté de le croire dans la mesure où, c'est le premier rapport dans lequel le FMI insiste à ce point sur la mise en place d'un système de change flottant. Le fait est qu'un tel système a joué un rôle important dans le développement des pays du sud-est asiatique, mais c'est aussi lui qui a accéléré la crise de 1997. Le Maroc doit donc y réfléchir à deux fois avant de se lancer.