Entretien avec Abdelilah Benkirane, membre du secrétariat général du PJD Abdelilah Benkirane est furieux. Il ne mâche pas ses mots pour dénoncer la campagne de dénigrement menée contre le PJD par la deuxième chaîne publique. Benkirane se dit froissé par les propos des intervenants et par les reportages diffamatoires diffusés par 2M lors de l'émission " Moubachara Maakoum ". La Gazette du Maroc : la semaine dernière, le parti a été invité à débattre du terrorisme dans le cadre d'une émission “Moubachara Maakoum” diffusée par la deuxième chaîne. Comment évaluez-vous l'émission et quelle en est votre réaction ? Abdelilah Benkirane : écoutez. Une fois encore, nous étions l'objet d'agissements irréfléchis et d'une campagne de dénigrement bien orchestrée par la directrice de l'information, Samira Sitail, qui cherche par tous les moyens à porter atteinte à notre parti. Comme vous l'avez certainement remarqué, la deuxième chaîne a tout fait pour accuser et montrer du doigt le Parti de la justice et du développement à travers des reportages mal inspirés, téléguidés, diffamatoires et par la qualité même de certains invités qui ne portent pas le parti dans leur cœur. De toutes les façons, nous avons répondu, en guise de bonne foi, à l'invitation de 2M et notre représentant s'en est très bien sorti puisqu'il a remis, à chaque fois, ses interlocuteurs à leur place. Au lieu de débattre de la lutte antiterroriste, 2M a préféré s'en prendre à notre parti par ses propres moyens en favorisant des hostilités d'un autre âge qui visent à porter atteinte à l'ensemble des militants du PJD Mais pourquoi vous acharnez-vous tant contre la direction de l'information de 2M ? Qu'est- ce qui vous fait prendre cette position ? Vous savez rien ne se fait à 2M sans l'aval préalable de sa directrice générale de l'information qu'est Samira Sitail. L'émission " Moubachara Maakoum " a été préparée par les services de rédaction qui relèvent directement de sa direction. Pour l'émission en question, il faut se rendre à l'évidence qu'il y avait un fil conducteur élaboré par les soins de Samira Sitail, les axes des interventions ont été discutés préalablement avec les invités et les reportages ont été également visualisés par cette même personne avant la diffusion, en direct, de l'émission. Les buts étaient on ne peut plus clairs pour dénigrer et diffamer notre parti à chaque fois que l'occasion s'y prête. Et cette fois, comme à plusieurs reprises, 2M n'a pas manqué à ses habitudes. Pensez-vous, une fois encore, que vous étiez " victime " de la deuxième chaîne publique, après ce qui s'est passé lors de l'incident du Tsunami ? Le mot victime est mal placé parce que ni Samira Sitail, ni personne d'autre ne pourra compromettre la bonne marche du PJD. Ce sont des comportements insignifiants qui ne méritent pas qu'on s'y attarde. Nous sommes au-dessus de toute tentative de déstabilisation aussi grotesque soit-elle qu'elle soit orchestrée par cette bonne femme qui, à mon avis, n'ira pas loin. Il y a à peine quelques semaines de cela, 2M avait tenté la même chose sans pour autant toucher, ni de loin ni de près, le parti et l'ensemble de ses militants. La chaîne s'est inclinée devant les décisions de la HACA ( la Haute autorité du champ audiovisuel ) qui l'ont obligée à diffuser une mise au point conséquente et à reconnaître ses erreurs. Aujourd'hui, la même chaîne récidive. Elle répète le même scénario avec d'autres figurants aux ordres qui n'ont pas atteint leurs objectifs. Je profite de cette occasion pour dire à Sitail la phrase suivante : “Vous n'avez pas créé le Parti justice et développement pour pouvoir penser le décomposer aussi facilement que vous le prétendez. Qu'elle le veuille ou non, notre parti est résolument déterminé à combattre et à lutter avec acharnement contre toute forme de terrorisme que nous dénonçons ouvertement et formellement. Si 2M nous attaque aujourd'hui, comme dans un passé très récent, c'est parce qu'il y a des lobbies bien connus dans le pays que la force politique du parti et son affluence dérangent”. Comment pensez-vous corriger ou effacer cette image qu'on vous colle depuis les tristes évènements du 16 mai à Casablanca? Depuis cette date, nous étions, et nous le sommes toujours, les premiers visés et concernés par ces tristes évènements qu'a connus le pays. Le PJD n'a jamais opté pour la propagande et les slogans populistes et ambigus susceptibles de pousser ou d'inciter, directement ou indirectement, quiconque à agir ou à choisir la violence comme moyen d'action. Au contraire. nous avons toujours tenu à prêcher la modération. La modération dans nos idées, dans nos discours, dans nos actions et aussi dans nos revendications. Cela dit, à 2M, Sitail se trompe d'ennemis et se concentre sur le PJD pour le rendre responsable d'actes criminels atroces commis par de jeunes égarés qui se revendiquent de l'Islam. Vous avez récemment déclaré à un journal que le parti se réunirait ce week-end pour discuter des mesures à prendre pour réagir contre " les machinations de 2M " à l'encontre de votre parti. Qu' avez-vous décidé finalement de faire ? En effet, nous ne sommes réunis samedi 12 mars courant et nous avons décidé tout simplement de ne pas réagir. C'est tellement grotesque et saugrenu que l'ensemble des instances du parti ont décidé, à l'unanimité, d'ignorer les comportements indignes d'une chaîne publique qu'est 2M. Vous savez, l'émission se voulait provocatrice, diffamatoire, préméditée pour nuire au parti et servir les intérêts de certains individus qui souhaitaient polémiquer au sujet d'un non-événement, pour réitérer ce qui a été fait lors du précédent incident du Tsunami. Nous, à l'intérieur du parti, nous avons décidé, cette fois-ci, de ne pas leur donner cette nouvelle chance. De ce fait, nous n'irons pas à la HACA et nous considérons que le sujet est définitivement clos. Et chacun de nous assumera ses responsabilités vis-à-vis de l'autre. Ce qui s'est passé à 2M coïncide avec la tenue d'une conférence de presse à Oujda par certains de vos militants qui ont annoncé leur départ du parti. Quelle est votre réaction ? Ecoutez. Même si je n'ai pas de détails sur cette affaire, je peux néanmoins avancer que c'est une action qui est, à mon avis, courante dans tous les partis politiques du pays. Nous sommes démocrates et nous ne pouvons pas obliger telle ou telle personne à rester dans nos rangs. Le groupe que vous citiez s'est retrouvé, à mon avis, marginalisé et a refusé d'occuper la place qui est la leur. Ce sont peut-être les seules raisons qui les ont poussé à partir vers d'autres cieux. Vous savez, la politique est faite ainsi. On ne peut rien y changer. Toutefois, il faut signaler que la région de l'Oriental constitue toujours l'une des forces non négligeables du PJD qui reste un leader dans cette région . Je qualifierai cette affaire de non-événement qui n'aura aucune conséquence sur la bonne marche du parti. Certains observateurs estiment toutefois que la prédominance de l'idéologie du Mouvement de l'unification et du renouveau ( MUR) sur votre parti a été mise en exergue dans cette scission ? Il ne faut jamais faire l'amalgame entre l'association qu'est le MUR et le parti du PJD. Si la majorité des militants du parti sont issus du MUR, cela n'explique pas que les décisions du parti sont discutées, ou bien même, soumises à l'appréciation des membres du MUR. Il n'y a aucune contradiction dans ce que je vous dis. Et en plus, il n'existe aucune loi qui interdit à ce que tel ou tel membre d'une association soit partisan dans tel ou tel parti politique.