Révélations sur la Commission du 11 mars Fracassant : tant de tollé pour finalement innocenter José Maria Aznar. Contre tous les pronostics, el présidente n'aura pas de mauvais points en septembre, lors de la divulgation des conclusions de l'enquête sur le 11 mars. A peine un “blâme” pour négligence... Entre-temps, le PSOE joue le trouble-fête au sein de la Commission. Selon un haut responsable espagnol qui a requis l'anonymat, la Commission du 11 mars s'apprête à innocenter José Maria Aznar, en septembre prochain, lors de la réunion qui abordera les conclusions et censures émanant de l'organe d'investigation. Ce coup de force qui sera publié dans un mois dans le cadre d'une synthèse de travail de la Commission, est le fruit des tractations qui sont menées en ce moment tous azimuts dans les coulisses des partis politiques espagnols. Selon l'objectif général de cette Commission, ses membres siégeant devront élaborer leurs conclusions en se basant uniquement sur les analyses et comparutions menées dans le cadre de l'enquête. Mais il est flagrant que des fuites ont émaillé les premiers jours d'août et l'on parle même de tractations entre le PSOE et le PP d'Aznar pour un compromis de base avant la divulgation des documents censés rester secrets. L'on s'attend aussi à ce que la Commission dise qu'Aznar n'a pas menti, qu'il a dit la vérité et qu'il n'y a pas eu, de sa part et de celle de son cabinet, de négligence. Le blâme de “négligence” est la seule censure qui viendra sans doute condamner Aznar en septembre. On lui reprochera une baisse de vigilance quant aux menaces terroristes qui planaient depuis plusieurs mois sur le territoire espagnol et les imprécisions qui ont vu le jour avant le 11 mars dans le cadre de la lutte anti-terrorisme. L'éventualité qu'Aznar sorte indemne de la Commission d'enquête paraît peu éventuelle aujourd'hui en Espagne, et pourtant les tractations dont nous faisons état ont déjà penché et tranché résolument pour une esquive de la dimension politique de l'affaire du 11 mars. Ainsi, en apparence, durant tous ces jours passés, la plupart des formations politiques ont donné clairement leur position défavorable à la relaxe de José Maria Aznar. On parle d'“erreur” si le gouvernement du PSOE, qui aura le dernier mot devant la Commission, refuse de ne pas réprouver la prestation de l'ancien gouvernement avant et après le 11 mars. Certains partis cherchent par tous les moyens à faire comparaître José Maria Aznar. Mais selon d'autres voix, le PSOE en personne refuse de se plier aux exigences des partis pour des raisons encore obscures : “Il faut éviter qu'Aznar comparaisse. C'est aussi le but de la Commission.” Le PSOE, qui fait volte-face après sa sortie inquisitrice au lendemain des attentats, serait d'accord sur le fond avec les partis de l'opposition, mais nullement sur la forme. Soufflant le chaud et le froid, il accuse le PP mais ne mettra pas en septembre de clause sur la “responsabilité” de l'ancien gouvernement dans la non-prévention des attentats. Le PSOE est actuellement en train de remuer ciel et terre pour convaincre les autres partis de ne pas déposer de motion de censure à l'encontre d'Aznar. Pourquoi ? La police et les services de renseignement dans le collimateur Dans la suite logique de ces arrangements qui écarteront Aznar des affres du rapport final, c'est la police et les services de sécurité espagnols qui paieront les pots cassés. La “responsabilité” de l'inaction de Madrid sera imputée à la Guardia civil et les hommes chargés de la sécurité sur le territoire espagnol. On dira que c'est le système et notamment les failles de coordination entre les services, leurs mauvaises relations, la torche froide des renseignements et l'inadéquation des moyens de la lutte qui ont fait le 11 mars. Il ressort en effet que la police a accumulé les bavures et les incompétences depuis au moins 2001 alors qu'elle était censée lutter, sur son territoire, depuis cette date, contre la cellule espagnole d'Al-Qaïda. Dernière sortie en date contre la police, c'est le PP qui attise la flamme en déclarant, encore, que l'ETA reste une piste à ne pas écarter dans les enquêtes. Ce n'est autre que Mariano Rajoy, second d'Aznar et ancien candidat aux élections de mars, qui l'affirme. Il est repris par Angel Acebes, l'ex-ministre de l'Intérieur, qui dit également qu'aucune piste ne doit être abandonnée à ce jour et que les séparatistes basques demeurent des commanditaires potentiels de ces attentats. Cette thèse, qui déroute la Commission peu avant la publication de ses conclusions, vise très précisément l'affaire de la vente des explosifs et leur préparation qui, selon des experts, seraient similaires à celles de l'ETA. Il s'avère aussi que les deux uniques témoins dans l'affaire des explosifs, le Marocain Rafa Zouheir et l'Espagnol Emilio Trashorras, sont demandés par plusieurs membres de la Commission pour comparaître en septembre, avant la rédaction des fameuses conclusions de l'enquête. Des témoins importants que le PP et d'autres petits partis demandent à comparaître alors que le PSOE refuse de les voir à la barre. Le jeu du chat et de la souris s'inverse subtilement. Pourquoi encore cette fois-ci, le PSOE refuse de céder aux doléances des membres de la Commission ? D'autres contradictions entre les témoignages La commission d'enquête parlementaire espagnole sur les attentats du 11 mars à Madrid a tenté de démêler d'autres contradictions qui se sont accumulées au cours des témoignages. L'ancien commissaire de la sécurité urbaine de Madrid, Santiago Cuadro, a été invité à expliquer comment il avait pu être aussi précis et déclarer à son supérieur, le 11 mars, vers midi, que l'explosif utilisé était de la dynamite “Titadyne”, ce qui revenait à désigner un peu trop rapidement le mouvement séparatiste basque ETA comme le responsable des attentats qui ont fait 191 morts et 1.900 blessés. Coup de théâtre, Santiago Cuadro a catégoriquement démenti avoir fait une telle affirmation, rapportée devant la commission, par l'ancien directeur adjoint de la police Pedro Diaz-Pintado. Il a affirmé qu'il avait seulement indiqué à son supérieur, le 11 mars, qu'il y avait des “indices” qui permettaient de penser que l'explosif utilisé était de la dynamite “probablement renforcée” avec un cordon détonateur. Il a ajouté qu'il “est sûr d'avoir dit dynamite”, et non pas “Titadyne”. “J'en suis certain et personne ne pourra me faire changer d'avis”, a-t-il asséné, convaincu que son supérieur direct a menti devant la commission. Face à cette contradiction entre deux hauts responsables de la police sur un point essentiel, les parlementaires ont cherché en vain à expliquer comment le mot “dynamite” prononcé par Santiago Cuadro, avait pu être entendu “Titadyne” par M. Diaz-Pintado, évoquant un simple lapsus, la mauvaise qualité de la communication téléphonique, l'énorme pression à laquelle étaient soumis les enquêteurs, ou encore la précipitation. L'erreur d'identification de l'explosif a son importance car plusieurs responsables de la police ont souligné devant la commission que cette appréciation erronée avait aussitôt orienté l'enquête vers l'ETA.