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Un Marocain veut intenter un procès à George Bush
Publié dans La Gazette du Maroc le 19 - 07 - 2004


Hamed Abderrahmane, rescapé de Guantanamo
Le Marocain originaire de Sebta, Hamed Abderrahmane Ahmed, qui a passé plus de deux ans dans le camp illégal de Guantanamo comme ennemi de l'Etat américain a été extradé en Espagne où il a purgé cinq mois de prison avant que le juge Garzon ne le libère, mercredi 15 juillet dernier, faute de preuve l'incriminant. Rentré chez lui à Sebta, le jeudi 16, il a clamé son innocence et déclaré avoir vécu en enfer pendant des années. Il n'a pas exclu la possibilité d'intenter un procès à George Bush pour crime contre l'humanité et violation des droits humains sur un citoyen innocent qui a été torturé et incarcéré sans preuves pendant plus de 24 mois.
C'est une libération sous caution de 3000 euros qui a redonné la liberté à Hamed Abderrahmane Ahmed, un Marocain natif de Sebta qui porte la nationalité espagnole et qui était selon les services de renseignements espagnols, le seul ressortissant de Madrid à vivre dans la prison de Guantanamo. Agé de 29 ans, il a été arrêté au Pakistan comme un membre des Talibans. Il purgera cinq mois dans les prisons afghanes où il a dû vivre un enfer sans nom et sur lequel il revient en poussant un énorme cri de soulagement de l'avoir quitté. Mais c'était juste un changement de décor, le passage d'un cercle à l'autre en se faisant transférer par les troupes américaines vers l'île de Guantanamo à Cuba, où le destin avait scellé pour un temps son sort. Hamed parle de cette époque comme du pire épisode de sa vie et il n'est pas prêt d'oublier ces deux années en camisole orange, traité comme une bête par des militaires gonflés à bloc qui le considéraient comme un dangereux criminel.
Voyage au bout de l'enfer
Hamed Abderrahmane affirme avoir fait le voyage en Afghanistan " pour apprendre le coran et les sciences religieuses ". Il nie tout lien avec Al Qaïda ou un quelconque groupe terroriste : "religieux, oui, mais pas terroriste ni criminel ". Pourtant quand les forces américaines lui mettent la main dessus, il est embarqué comme un criminel, un terroriste taliban de la pire espèce. Sans revenir sur ce qu'il a vécu à Guantanamo, il laisse entendre en affirmant qu'il va poursuivre par des voies légales le gouvernement américain pour tout le mal qu'il a vécu. Il dit pourtant que cette traversée de l'enfer aura un impact profond sur sa vie et n'oublie pas , dans la foulée, de condamner les attaques terroristes du 11 mars à Madrid. De son séjour afghan, il y a peu de détails, mais on sait qu'il avait rejoint ce pays bien avant la guerre où il avait des contacts qui lui avaient facilité le passage vers la région dirigée par les Talibans. Il n'y a cependant aucune preuve de son implication militaire aux côtés des taliban. Pourtant pour les Américains et les Espagnols, son engagement était prouvé. Reste à avoir des preuves qui manquent terriblement à son dossier, somme toute, semblables à tant d'autres qui ont tous été libérés de Guantanamo après des mois d'incarcération. Mais suivant cette logique, le simple voyage en Afghanistan, à cette époque, constituait un délit grave et passible de tous les châtiments, ce que Hamed n'était pas sans savoir mais pour lui, il n'y avait aucune intention de combattre qui que soit ni de tuer un quelconque ennemi. Et c'est ce qu'il avait affirmé aux Américains à plusieurs reprises alors qu'ils s'acharnaient à le considérer comme un " combattant ennemi ".
Retour en Espagne
D'une prison à une autre comme si le destin voulait lui faire voir les affres de la nouvelle démocratie dans le monde où l'on juge les gens sans tribunal et sans avocats. Arrivé en Espagne, il se soumet au jeu des médias. Avec beaucoup de disponibilité, Hamed Abderrahmane Ahmed, a pu répondre à des questions écrites de la station de radio Cadena Ser avant d'être enfermé dans la prison de haute sécurité de Soto del Real, à son arrivée de la base de Guantanamo. Il précise alors qu'il "n'avait rien à voir avec les Talibans ou Al Qaïda et qu'il se trouvait en Afghanistan pour des études religieuses. Après le 11 septembre, leurs enseignants leur ayant conseillé de quitter le pays, Hamed et son ami Abdellah ont pris la route, mais son ami a été tué lors d'un bombardement à Jalalabad et lui-même s'est fait prisonnier ". Les Américains ne lui avaient jamais accordé le bénéfice du doute et n'ont même pas enquêté sur lui puisqu'il a été oublié à l'instar de tous ceux qui étaient là par hasard et au cas où ils pourraient savoir quelque chose. Hamed n'hésite pas, l'ombre d'une seconde, de détailler les moments durs vécus à Cuba : il raconte les sévices exercés sur lui à Guantanamo et a révélé que "la direction du camp abreuvait les détenus de musique "patriotique" US diffusée par hauts-parleurs, notamment "Born in the USA" de Bruce Springsteen. Les détenus s'enveloppaient la tête dans des serviettes mouillées pour combattre la chaleur et la musique tonitruante". Entre coups arbitraires, privations et tortures hyper sophistiquées, ce jeune homme a dû faire face à des traitements inhumains qui l'auront traumatisé à vie. Des séances de tabassages pour un oui ou un non, des insultes, des chiens qui viennent attaquer des détenus à poil, des rasages forcés, de la nourriture malgré soi par intraveineuse s'il le faut et d'autres particularités de la prison made in USA. A son retour en Espagne, il crie son soulagement : "tout est pour le mieux, j'ai quitté l'enfer."
L'inculpation du juge Garzon
Transféré en Espagne de Guantanamo le 14 février 2004, Hamed Abderrahmane Ahmed a été inculpé par le juge Baltazar Garzon le jeudi 26 février et incarcéré, après trois heures d'interrogatoire au cours duquel il aurait reconnu s'être rendu en Afghanistan pour rejoindre les Talibans après avoir fait partie d'une cellule islamiste de 5 ou 6 personnes en Espagne. Ses avocats ont annoncé qu'ils feraient appel pour la mise en détention provisoire et qu'ils envisageaient aussi de déposer plainte contre le gouvernement US pour tortures. Les premières heures qui ont suivi son arrivée en Espagne ont été pour lui les plus déterminantes. Il ne savait pas à son arrivée quel sort le juge Garzon lui réservait et sa détention a été une réelle surprise parce qu'il pensait que toute cette affaire était bouclée du moment qu'il rentrait chez lui en Espagne. Garzon, à l'époque, était en pleine euphorie sur le démantèlement de la cellule espagnole et voulait à tout prix des informations supplémentaires. Hamed était la bonne personne, au même titre que Lahcen Ikasierren, extradé lui aussi de Guantanamo via Madrid où il a été entendu par le juge Garzon concernant ses liens avec la cellule espagnole et les attentats du 11 septembre. Sans oublier que les deux Marocains sont originaires de Sebta et ont partagé la fournaise taliban et l'enfer de Guantanamo. "Taliban, oui. Islamiste intégriste, également, mais ni terroriste, ni membre d'Al Qaïda ". C'est cette déclaration qui aura marqué tant par la franchise du propos que par la décision de ce jeune homme à dire ce qu'il avait sur le cœur sans détours.
En niant toute relation avec le réseau terroriste d'Oussama Ben Laden, qu'il a critiqué sans détours, il a aussi réprouvé sans ambiguïté les attentats du 11 septembre qui sont pour lui un acte criminel où des innocents ont trouvé la mort : " ce qui est contraire aux lois de l'islam ". Toute cette disponibilité n'a pas eu aux yeux du juge Garzon de l'importance pour changer d'attitude à l'égard d'un homme qui déclarait en toute clarté le fond de ses convictions en détaillant ses appartenances idéologiques qui ne font pas de lui nécessairement un terroriste. Le juge espagnol a maintenu à l'encontre d'Abderrahman l'accusation d'appartenance à " une bande armée " et l'a envoyé à la prison de Soto del Real, après avoir séjourné, depuis son arrivée, dans l'unité pénitentiaire de l'Hôpital Gregorio Marañón de la capitale espagnole. Selon les rapports médicaux et psychiatriques, établis par les médecins qui l'ont vu, le prisonnier a déjà recouvré un bon état de santé. Les deux avocats du Marocain, Javier Nart et Marcos García Montes, avaient annoncé à cette période qu'ils comptaient demander à Garzon " l'élargissement de leur client en raison de l'absence de preuves sur ses liens avec Al Qaïda ". Tous les deux ont aussi avancé qu'ils entreprendront des "actions pénales contre le gouvernement de Washington pour la "détention arbitraire" ou "séquestration" du citoyen espagnol ".
Pourquoi Hamed a été libéré ?
C'est malgré les décisions du responsable judiciaire Pedro Rubiera qui voulait maintenir le Marocain en prison " pour éviter tout risque de fuite", que le juge Baltazar sGarzon a décidé de la libération sous caution du présumé activiste d'Al Qaïda. Dans son rapport de liberté concernant le Marocain, le juge espagnol a rappelé qu'il y a des aspects de la détention du jeune homme "qui sont absolument contradictoires aux règlements juridiques espagnols et internationaux… qui concernent toutes les personnes qui ont été incarcérées dans cette prison américaine" de Guantanamo. Le juge a précisé que la décision du tribunal suprême des USA qui reconnaît aux prisonniers de recourir à un tribunal ordinaire, n'a pourtant pas "trouvé une solution au problème de la détention et de l'élimination des droits des détenus de ce centre militaire". Le juge Garzon a expliqué que Abderrahmane, selon les rapports de la prison de Alcala-Meco, où il a été transféré après son passage par Soto del Real, " est un sujet qui possède une personnalité normalement structurée " en ajoutant qu' " à ce moment précis et surtout eu égard au traumatisme psychologique vécu durant cette période de deux ans d'incarcération à Guantanamo et en Afghanistan, dont il veut à peine parler, il se note un sentiment de dépendance et de soumission avec une dépression et de l'apathie ". tout un aspect psychologique important qui a fait que le juge Garzon a changé son fusil d'épaule pour permettre la liberté au Marocain. Le juge Garzon a ajouté que durant cette période d'emprisonnement en Afghanistan et à Guantanamo " il y a eu une violation des droits fondamentaux des détenus, en les maintenant loin de toute possibilité de se défendre comme il est prévu selon toutes les lois et conventions internationales". Suite à cette libération surprise, le juge Garzon a détaillé les raisons qui le poussent à défendre le cas Abderrahmane. Il a affirmé qu'il a été " privé de tout droit légal " en ajoutant que le temps de la détention a pris des proportions inimaginables sans aucune forme d'explication sur les crimes et les délits qui sont imputés au prévenu. Le détenu n'a jamais eu connaissance de ses droits ni appris la nature des charges qui pesaient sur lui, ce qui l'a poussé à garder le silence jusqu'à ce qu'il soit extradé vers l'Espagne. Le prévenu a aussi été soumis à des interrogatoires en dehors de toute légalité sous des techniques qui sont en contradiction avec la législation et la Constitution espagnoles.
Le retour à Sebta
Pour la famille : " c'est un traumatisme à vie " qui ne finira pas avec cette liberté retrouvée après des mois de tortures dans cette prison américaine qui défie toutes les lois internationales. Hamed, lui, ne veut même plus entendre parler de cette période américaine sur l'île cubaine. Il estime que c'est trop tôt et qu'il faut attendre le moment venu pour apporter son témoignage de ce qui se passe dans cette prison qui n'obéit à aucune règle humaine. Pour ses sœurs Nasiha et Najat, c'est un calvaire qui a " stigmatisé leur frère pour la vie ". Selon les proches du dossier de Hamed, ses avocats et conseillers, il est clair qu'une poursuite en bonne et due forme verra le jour contre George Bush et son gouvernement qui ont mis des innocents dans des prisons, sous la torture et l'humiliation pendant des années en faisant fi de toutes les conventions mondiales. Cette incarcération abusive, les mauvais traitements, les coups et blessures, le poids du traumatisme psychologique et ses séquelles ne peuvent être passés sous silence. Il faudra réagir en demandant des comptes aux tortionnaires de l'armée américaine et à leur chef, le Président américain en personne. Un procès est donc prévu pour les prochaines semaines qui s'ajoutera à d'autres procès déjà engagés contre le gouvernement américain au Pakistan, en Afghanistan, en Grande Bretagne et ailleurs.


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