Après avoir terrassé à 82 % l'hydre de l'extrême droite, qui avait menacé d'étouffer “ le pays des lumières ”, le nouveau président qui se succédait à lui-même se devait de réaffirmer ses promesses dans un discours au milieu du public. Il l'a fait et a précisé sa pensée par cette phrase-clé : “ j'ai entendu et j'ai compris votre appel”. L'assistance a applaudi à tout rompre. Visibles de loin, les drapeaux marocains et algériens n'ont pas frémi, ignorant la harangue du général De Gaulle aux Français d'Algérie : “Je vous ai compris”. Deux jours plus tard, un nouveau gouvernement était constitué, se distinguant par l'entrée de Nicolas Sarkozy et de Tokia Saïfi, Algérienne d'origine. À chaud, tous les journalistes français ont désigné celle-ci comme étant issue de l'immigration. Rectification le lendemain. La secrétaire d'Etat au développement durable –qu'on se le dise, la précarité est désormais bannie en France-, est devenue d'origine algérienne. Que s'est-il passé ? C'est que Nicolas Sarkozy est lui-même issu de l'immigration. Malgré tout, il ne faut pas confondre. Au cours de la dernière campagne présidentielle, pour couper court à toute allusion déplaisante, il a rappelé que son père avait quitté la Hongrie en 1950 pour devenir franco-gaulois. Le fils, Nicolas, a embrassé très jeune la politique et ne pouvait pas ne pas entrer en gaullisme. C'était naturel. Tokia Saïfi est de droite, elle aussi, mais d'une autre nuance. On peut en conclure, avec certaine facilité, que la conduite à droite pour un immigré mène à destination. Au Front national même. Donc, Nicolas Sarkozy est issu de l'immigration et ne peut en être qu'expert. C'est légitimement qu'il a obtenu un ministère de l'Intérieur enrichi de la sécurité intérieure et des libertés publiques. Les immigrés maghrébins et les sans-papiers ont, peut-être, compris finalement le sens du “je vous ai entendu” gaullien du président français, car ils sont désignés depuis longtemps comme les responsables de “l'insécurité” en France, même au sein de villages dont les habitants n'ont jamais vu un Noir ou un Maghrébin. Le nouveau ministre de l'Intérieur... etc, tiendra ses promesses et sera loyal, car il a de l'ambition, et le délire sécuritaire est un excellent tremplin. Les bottes de Le Pen chaussent bien. La juxtaposition du mot loyal avec le nom de Sarkozy fait sourire en France. Au début de sa carrière politique il avait bouté le gaulliste Charles Pasqua hors de Neuilly-sur-Seine - une des banlieues parisiennes chics - et en était devenu maire, puis député. Il avait alors servi loyalement Jacques Chirac, jusqu'à l'élection présidentielle de 1995. À cette occasion, il avait servi loyalement Edouard Balladur. Petite traversée du désert après l'échec de celui-ci. Puis il avait resservi loyalement le nouvel-ancien président français, jusqu'à l'obtention de ce ministère qui lui va comme un gant. Son regard loyal, aigu et acéré comme un scalpel l'y prédisposait. C'est le Nick l'anguille du milieu politique. Au cours de la campagne présidentielle passée, il a déclaré à la télévision qu'il réprouvait la décision de “ce recteur qui avait accepté que des jeunes filles manipulées entrent en classe avec un foulard sur la tête”. Il a insisté plusieurs fois sur le mot “manipulées”. C'était clair. Temps du foulard explosif. Et dire qu'il est aussi en charge des cultes. Puis, répondant à la question d'un journaliste, le futur ministre de l'Intérieur, etc, avait prévu la création prochaine de “groupements régionaux d'intervention” qui comprendront des policiers, des gendarmes, des douaniers, des agents du fisc et des magistrats. Répression, toute ! Arnold Schwarzenegger ne sera pas engagé parce qu'il est trop cher. Cependant, la vie est moqueuse parfois. Le député-maire de Neuilly-sur-seine a pour facteur l'ancien candidat trotskiste à la présidence. Vingt-sept ans, licencié en droit et facteur. En France, la politique est facétieuse. Chez nous, heureusement, la politique ne connaît pas ces dérèglements. On s'en tient à la réglementation de rigueur. Notre démocratie s'appuie sur la transparence, rendue possible par une politique nette et propre, au point qu'il ne faille la manipuler qu'avec des gants blancs. Pour ne pas y laisser d'empreinte. La politique nationale ne recommande que la souplesse d'échine nécessaire pour être à l'équerre. La meilleure position si l'on veut démarrer en trombe. Et arriver assis