Handling À la suite d'un appel d'offres international pour l'ouverture à la concurrence de l'activité assistance au sol, l'ONDA a été assigné en justice par une société hispano-portugaise, Flightcare, pour abus de pouvoir. Recalée en seconde position, Flightcare a obtenu gain de cause dans son premier recours intenté devant le tribunal administratif de Rabat. Tout d'abord, plantons le décor. Un organisme public lance en fin 2003 un appel d'offres international pour la concession de l'une de ses principales activités. Plusieurs consortiums et sociétés de droit privé répondent favorablement et manifestent leur intérêt. L'enjeu est de taille et l'activité à céder présente d'importantes perspectives d'avenir à l'ensemble des soumissionnaires. Après ouverture des plis, l'Office a procédé à un classement des prétendants, en fonction de plusieurs critères, entre autres, techniques et financiers. Jusque-là, tout se passe comme prévu. L'office entame les négociations avec le premier candidat, comme le stipule le cahier des charges, sur les détails de son offre et sur le planning de déploiement de son réseau. Consultations faites, les propositions du premier opérateur ne répondent pas aux attentes de l'office. Celui-ci se tourne vers le deuxième candidat sur la liste, toujours selon les termes du cahier des charges, en vue de négocier les mêmes aspects opérationnels et financiers de son offre. L'entente est évidente et chacune des parties trouve son compte. L'appel d'offres est alors adjugé au second candidat et un communiqué de presse est diffusé pour la circonstance. Le choix de l'organisme public est aussitôt contesté par le premier opérateur. Et la suite des évènements, dans pareils cas, signifie un recours devant la justice, plus précisément devant le tribunal administratif de Rabat. La polémique est donc engagée. L'affaire prend, à première vue, la dimension d'un scandale d'Etat où sont impliqués aussi bien l'office que le ministère de tutelle. En plus clair, l'ONDA ( l'Office national des aéroports) et le ministère de l'Equipement et du Transport. La partie plaignante est un consortium composé de sociétés marocaines et de la société hispano-portugaise, Flightcare. La concession mise en cause, vous l'avez bien deviné, est l'assistance en escale dans les aéroports du pays. Libéralisation avortée L'affaire en question remonte à mai 2003, lorsque l'ONDA a lancé un appel d'offres international pour l'ouverture à la concurrence de l'activité d'assistance en escale. L'objectif étant de permettre aux compagnies aériennes qui desservent le pays d'être servies à pied d'égalité et avec un meilleur rapport qualité/prix. C'est l'Etat qui se désengage au profit d'un opérateur dans le cadre de la concession des marchés publics au secteur privé. Cette démarche constitue, en elle même, un premier pas vers la libéralisation, tant attendue, du transport aérien. Karim Ghellab, fraîchement nommé ministre de l'Equipement et du transport, place ce chantier en priorité et élabore un cahier des charges, conforme à la loi en vigueur, sur la base duquel une dizaine de sociétés soumissionnaires ont postulé. Pour accélérer le processus, le ministère de tutelle, à travers l'ONDA, a exigé des candidats de se conformer uniquement au cahier des charges établi en avance qui stipule entre autres que : “L'offre la mieux notée sera retenue en premier pour l'engagement d'une série de négociations portant sur les détails et les modalités d'application de l'offre. En cas de non-aboutissement de celles-ci, l'offre venant en deuxième position sera retenue pour des négociations similaires et ainsi de suite”. Le règlement est donc clair et dispense tout candidat soumissionnaire qui ne souhaite pas y adhérer. La procédure telle qu'elle a été établie prévoit un examen des offres selon un certain nombre de critères (notamment les capacités professionnelles, l'offre financière… ). Le cahier des charges stipule aussi que les offres seront classées en fonction du total des notes reçues pour chacun des critères, en cas d'égalité entre deux offres, la commission procèdera au partage des candidats par tirage au sort. Ce qui n'est pas le cas. La meilleure note attribuée pour le premier classement a été celle du groupement hispano-portugais Flightcare-Celebi-Finamco qui a, jusqu'à présent, rempli les conditions acquises. Sauf qu'il fallait aussi entrer en négociations avec l'ONDA pour détailler l'offre. En effet, et après l'annonce du classement des soumissionnaires, l'ONDA a entamé, conformément au règlement de l'appel d'offres, des négociations avec ce groupement, premier du classement, sur les détails d'application de son offre, en fixant la date limite de ces négociations au 9 décembre 2003. Passé ce délai, et en cas d'échec, l'ONDA se réserve le droit d'engager des négociations avec le second, qui n'est autre que le groupement Tap-Globalia-Finance.com. Dans un document interne de l'ONDA, on peut lire que : “l'ONDA a cherché en particulier à obtenir des précisions sur l'offre et des compléments quant aux dispositions contractuelles et au planning de déploiement de l'opérateur sur les différentes plates formes”. C'est ce qui a été fait, lors du deuxième round des négociations, mais Flightcare-Celebi-Finamco a campé sur ses premières positions principalement au niveau de son offre financière. Aucun progrès, aucune contre-proposition. Les éléments apportés par le premier groupement au classement n'ont pas répondu pleinement aux espérances de l'ONDA qui a engagé parallèlement des discussions similaires avec le second opérateur sur la liste. Comme son nom l'indique, il s'agit là d'un appel d'offres international pour l'ouverture à la concurrence. C'est le meilleur offrant, et rien que lui, qui remportera cet important marché aéroportuaire. La date limite est fixée au 19 décembre 2003. Le facteur temps constitue une contrainte majeure pour l'ONDA qui comptait boucler cette opération avant la fin du mois de décembre 2003. Critères objectifs Et c'est ce qui s'est passé justement puisque le deuxième opérateur en lice a présenté une meilleure offre en termes technique et financier. Avant même l'expiration du délai fixé par l'ONDA, le groupement Tap-Globalia-Finance.com a été retenu et adjugé après une série de négociations fructueuses. Son deuxième offre financière ( voir tableau-LGM posséde ledit document ) est de loin la plus importante par rapport aux propositions des autres candidats soumissionnaires. Aussi bien en termes de tarifs prestations fournies aux compagnies aériennes qu'en mouvements prévisionnels et des redevances versées à l'ONDA, le groupement TAP-Globalia-Finance.com a distancé tous ses concurrents et s'est placé en tête des candidatures. Son business plan est très prometteur et prévoit rien que pour les redevances destinées à l'ONDA des sommes très compétitives par rapport à l'offre de Flightcare. Entre 2004 et 2007, les redevances passeront, par exemple, de 2,8 millions de Dhs à 13,4 millions de Dhs alors que la première offre limitée à l'horizon 2007 portent sur 2,8 millions de Dhs/an. Idem pour le minimum garanti qui excédera les 5 millions de Dhs par an pour Globalia alors que l'offre de Flightcare se situe à 3,2 millions de Dhs pour les mêmes prévisions. Autre argument avancé par les responsables de l'ONDA, l'actionnariat ainsi que l'étendue du réseau des deux groupements dans le monde international de l'aérien. En effet, les deux groupements ( Globalia et Flightcare ) sont aussi actionnaires dans deux sociétés ( Eurohandling et Iberhandling ) qui opèrent essentiellement dans les aéroports espagnols. Dans le cadre des négociations entamées avec les deux groupements, il s'est avéré que Globalia est le plus présent (que ce soit en termes de capital ou de capacités professionnelles) dans ce domaine d'activité en Espagne. Cet argument a plaidé bien évidemment en faveur de Globalia pour prendre en charge l'activité Handling au Maroc. Sans oublier son programme de développement qu'il a déjà initié dans le pays ( la ligne Charter entre Casablanca et Madrid ) et sa volonté affichée d'investir dans le secteur du tourisme. Aujourd'hui, l'appel d'offres n'a pas encore abouti puisque l'ONDA a été assigné en justice pour abus de pouvoir. Sur la forme, et uniquement sur la forme, le tribunal administratif a déjà statué en référé. Il a ordonné de bloquer la concession en attendant d'examiner le fond du dossier à partir du 20 mars prochain.