Lettre de Washington Avec les préparatifs de la campagne en vue des élections présidentielles, un nouveau sondage montre que le président George W. Bush est en train de perdre un soutien considérable parmi l'électorat arabe-américain. Le sondage a été effectué à la mi-janvier par l'Institut Zogby International pour le compte de l'Institut arabe américain auprès de 500 électeurs arabes américains à l'échelle nationale avec une marge d'erreur de +/-4,5 %. Selon ledit sondage, si les élections se tenaient aujourd'hui, 28 % seulement des Arabes américains voteraient pour reconduire le président. Par contre, 40 % voteraient pour “n'importe quel candidat démocrate” alors que 32 % voteraient soit pour une candidature indépendante ou bien sont encore indécis quant à la personne qu'ils soutiendraient pour la charge suprême. Les résultats de ce sondage révèlent une érosion continue du soutien apporté à Bush parmi les Arabes américains. Lors des élections présidentielles de 2000, Bush a raflé 44,5 % des voix de la communauté d'origine arabe. Dans un sondage effectué en juillet 2003, la cote du président Bush est tombée à 34 % alors que dans celui de 2004, ce soutien s'est dégradé pour atteindre 28 %. Cette érosion est davantage reflétée dans les attitudes des Arabes américains envers l'ensemble des résultats du travail de Bush en sa qualité de président. En octobre 2001, 83 % des Arabes américains appuyaient l'accomplissement du travail du président. Alors qu'en juillet 2003, ce pourcentage est tombé à 43 %. Aujourd'hui, 38 % seulement des Arabes américains approuvent le rendement de la tâche du président. Selon le sondage, la politique proche-orientale du gouvernement américain constitue une raison majeure dans cette perte de soutien. Lorsque les Arabes américains ont été interrogés sur l'influence de la politique proche-orientale de l'Administration américaine dans la détermination de leur vote, les deux-tiers ont affirmé qu'elle était “très importante”. En même temps, quand on leur a demandé d'évaluer la gestion du président Bush du dossier du Moyen-Orient, 18 % seulement des Arabes américains ont approuvé la politique du gouvernement dans la région alors que 78 % ont exprimé leur désaccord. Une autre préoccupation des Arabes américains a trait à la politique gouvernementale envers les libertés civiles et le traitement réservé aux immigrants. Plus de la moitié des personnes interrogées ont déclaré que cette question était importante dans la détermination de leur vote. Et dans cette partie également, il y avait une préoccupation largement répandue relative au comportement du gouvernement américain. Côté démocratie, les électeurs arabes américains démontrent à ce stade un fort soutien de l'ancien gouverneur de l'Etat de Vermont Howard Dean pour la candidature présidentielle de son parti. 36 % des Arabes américains ont exprimé leur préférence pour Dean lors des primaires du parti démocrate. Aucun autre démocrate n'a reçu un résultat à deux chiffres. Le général à la retraite Wesley Clark a eu le soutien de 9 % des Arabes américains, suivi par le sénateur John Kevy avec 6 %. Le sénateur Joseph Lieberman n'a eu que 5 % des voix et 4 % pour le membre du Congrès Richard Gephardt. Le sénateur John Edwards et le congressman Dennis Kucinich ont reçu respectivement le soutien de 3 % des électeurs arabes américains démocrates. Dans la mesure où la campagne pour la désignation du candidat démocrate est encore à ses débuts, un tiers des Arabes américains sondés ont indiqué qu'ils sont encore indécis quant au candidat qu'ils soutiendront lors de ces primaires. Il est intéressant de relever qu'un nombre important d'Arabes américains qui soutiennent Howard Dean sont ceux qui déclarent également que le Moyen-Orient est l'une des questions les plus importantes dans ces élections. Bien que la communauté arabe américaine soit réduite (environ 3,5 millions à l'échelle nationale), elle est concentrée dans plusieurs Etats- clefs comme le Michigan, l'Ohio, la Pennsylvanie et la Floride. Au cours des dernières élections, ces Etats ont fait preuve d'une concurrence farouche entre Démocrates et Républicains. Si la chute du soutien au président reflétée dans le dernier sondage effectué par l'Institut Zogby International et l'Institut arabe américain se poursuit jusqu'aux élections présidentielles de novembre prochain, cela pourrait se traduire par la perte de dizaines de milliers de voix pour le président Bush dans chacun de ces Etats-clefs. C'est cette concentration d'Arabes américains dans ces importants “Etats de terrain de bataille” qui justifie l'attention accordée à la communauté cette année. Alors que le vote arabe américain ne sera pas le facteur décisif dans les élections de 2004, la communauté peut faire la différence. C'est pour cette raison que les candidats sont à la recherche du soutien arabe américain en abordant ses préoccupations. Le sondage en question démontre que les Arabes américains sont des électeurs attentifs. La communauté englobe de fortes bases de soutien démocrate et républicain, mais compte également un nombre d'électeurs dont le soutien ne peut être acquis que par les candidats qui abordent les questions fondamentales. A titre d'exemple, alors que le soutien du président Bush demeure en quelque sorte fort parmi les électeurs arabes américains républicains (Bush remporte 57 % des voix de ceux qui se déclarent républicains), dans les rangs des démocrates et des indépendants, il paye le prix de n'avoir pu répondre aux préoccupations de la communauté au sujet des importantes questions relatives au Moyen-Orient et aux libertés civiles. Beaucoup de choses peuvent changer au cours des dix prochains mois. Comme le président Bush conserve le pouvoir de la gestion des affaires, il peut prendre une action décisive dans un certain nombre de domaines pouvant avoir un impact décisif sur l'électeur. Par exemple si le président joue un rôle plus actif pour ramener la paix en Palestine, 37 % des Arabes américains se disent plus enclins à le soutenir. De même, si l'Administration américaine devait changer de comportement au sujet des libertés civiles, cela pourrait également améliorer la position du président parmi l'électorat arabe américain. Traduit de l'anglais par Noureddine Boughanmi * James Zogby, président de l'Institut arabe américain de Washington.