• Les centres d'appels, communément appelés call-centers, pourraient générer près de 100.000 emplois au Maroc à l'horizon 2005. • Aujourd'hui, les call-centers sont une dizaine à se partager le marché. • Les atouts du Maroc, comme de l'Inde, qui réussit, résident évidemment dans une main-d'œuvre bien moins chère qu'en Europe ou aux Etats-Unis, tout en ayant la capacité d'être aussi qualifiée. • Les professionnels jugent que le coût des télécommunications reste un frein au développement de leur secteur. Nés de l'intégration de la téléphonie et de l'informatique, dont les standards se sont stabilisés, les centres d'appels, communément appelés call-centers, permettent à des entreprises, moyennant une infrastructure de télécommunications appropriée et des équipements (matériels et logiciels) adéquats, d'améliorer leur système d'information et de faciliter l'accès du public aux services d'urgence, d'information, de renseignements... Au Maroc, les centres d'appels, pourraient générer près de 100.000 emplois à l'horizon 2005 (soit un peu plus de 40.000 postes de travail), sachant qu'un poste de travail nécessite 2 à 3 opérateurs. C'est en tout cas le potentiel que prévoient les professionnels du secteur. Pourtant cette activité est très récente au Maroc. Mis à part le centre de renseignements (160 et 120) de Maroc Telecom, les véritables centres d'appels ne se sont implantés au Maroc qu'à partir de l'année 2000, avec l'arrivée d'Atento. Depuis, Phone Assistance, Transcom Maroc, Altitude Maroc, Multi Performance... lui ont emboîté le pas. Aujourd'hui, ces call-centers sont une dizaine à se partager le marché. “On est obligé de constater qu'on a pris beaucoup de retard en ce domaine par rapport à certains pays du Sud, même si, en moins de deux ans, nous sommes arrivés à atteindre la barre des dix sociétés opérant dans le domaine des centres d'appels”, souligne un professionnel. Qu'est-ce qui explique alors cet engouement subit des investisseurs pour ce créneau? “Le télémarketing séduit de plus en plus d'entreprises au Maroc, et pour répondre à cette demande grandissante, les call-centers se créent. De plus, leur délocalisation connaît un réel essor”, justifie ce même professionnel. Même si les centres d'appels qui se sont installés misent à la fois sur le marché national et la délocalisation, la plupart d'entre eux sont arrivés sur le marché avec un client de référence, ou simplement un partenaire au niveau local ou international. A titre d'exemple, Atento s'est assuré le marché de Méditel, qui occupe environ 40 % de ses activités. Transcom Maroc s'est lié, dès son lancement, à son client Tele 2 (filiale du groupe auquel est rattaché Transcom WW), un provider de téléphonie fixe et mobile opérant dans plusieurs pays européens. A noter que Transcom Maroc résulte de la coopération entre deux entreprises, l'une marocaine (CBI), l'autre suédoise (Transcom WW), qui détiennent respectivement 40 et 60 % du capital. Une autre société, Cosmocall, est le fruit d'un partenariat entre la société marocaine Syntone et l'Américain Cosmocom. Il s'agit d'un call-center multimédia. “Le Maroc exerce une attractivité sur ces entreprises”, précise un professionnel. C'est à l'évolution du marché de l'emploi et de la législation du travail européenne, particulièrement française, qu'il le doit. “Les atouts du Maroc, comme de l'Inde, qui réussit, résident évidemment dans une main-d'œuvre bien moins chère qu'en Europe ou aux Etats-Unis, tout en ayant la capacité d'être aussi qualifiée. Ce qui a décidé, par exemple, la mutuelle française Liberté Santé à délocaliser la gestion de ses contacts clients à notre entreprise, ce sont essentiellement les coûts : nous étions 30 % moins chers que les meilleures offres françaises”, fait remarquer un autre professionnel, très optimiste quant au développement des call-centers marocains en termes de délocalisation, surtout pour le marché français. Aujourd'hui, les centres d'appels français sont confrontés aux contraintes de la loi Aubry sur les 35 heures, qui limite le nombre d'heures de travail, alors que le taux horaire hebdomadaire au Maroc avoisine les 50 heures. “Le niveau des salaires européens explique aussi, en partie, cette migration. Non seulement, le téléopérateur marocain est imprégné de la culture française, mais il coûte 3.000 francs français là où son homologue français coûte 10.000 francs”, souligne Driss Benomar, directeur général de Multi Performances. Le Maroc peut-il bâtir définitivement son avantage compétitif uniquement sur ce retard social, surtout qu'il est en concurrence avec d'autres pays du Maghreb? Sur cette question, les professionnels n'y vont pas par quatre chemins, en demandant aux pouvoirs publics que tous ces atouts soient consolidés, notamment en matière de coûts des communications et de législation. Ainsi réclament-ils à Maroc Telecom la révision à la baisse de ses tarifs. Selon un professionnel du secteur, une liaison spécialisée sur la France à partir du Maroc, et pouvant contenir jusqu'à trente lignes téléphoniques, coûte 300.000 dirhams, alors que de nombreuses lignes de Maroc Telecom sont inexploitées. “Nous devons tout faire pour ne pas tomber dans les mêmes pièges que le secteur textile, dont le principal atout compétitif était les bas salaires”, prévient un professionnel. “Avec l'attribution de la seconde licence de téléphone fixe, on peut penser que les prix des communications vont baisser”, estime Oscar Garcia Latorre, directeur général d'Atento Maroc, qui précise que Meditelecom est déjà candidat pour cette opération. Même optimisme chez Peter Riebel, directeur général de Transcom Maroc, qui rappelle que Maroc Telecom est en train de réviser ses prix. Si les professionnels jugent que le coût des télécommunications reste un frein au développement de leur secteur, ils estiment que l'absence d'une législation spécifique n'handicape pas réellement le développement de leurs activités. Qu'en est-il des opportunités et conditions de développement sur le marché national? Selon les professionnels, plusieurs secteurs de l'activité économique, notamment les assurances, les banques, les agences de voyage, l'informatique, l'automobile... , sollicitent leurs services. Selon eux, la réforme de l'administration pourrait également contribuer à la croissance de la demande nationale. “Des services publics pensent externaliser une partie de leurs prestations pour des raisons de performance, de coûts et de qualité du service rendu à l'administré”, affirme un professionnel dont le centre d'appels a décroché, le 1er avril courant, le marché de la CNSS. “Même les PME qui étaient réticentes commencent à s'y mettre”, précise un autre professionnel.