Baisse du prix du ciment A force de pression depuis des années sur les pouvoirs publics, les cimentiers ont gagné une bataille dans leur croisade pour la transformation de la TIC. Le 5 juin dernier, l'Etat a en effet décidé de réduire de près des deux tiers le poids de cette taxe sur les combustibles industriels suite à la proposition des cimentiers de répercuter cette baisse sur le prix du ciment pour en faire bénéficier notamment le bâtiment. La mesure devait être appliquée à partir de juillet ou août. Ciment du Maroc donne le la, ce début de semaine. Le prix du ciment devrait connaître une baisse généralisée sur tout le territoire national dans les prochains jours. C'est du moins ce qui doit intervenir suite au compromis conclu entre les pouvoirs publics et les professionnels de ce secteur. En effet, en contrepartie de la décision des pouvoirs publics de réduire de près de 2/3 la TIC (taxe intérieure de consommation), les cimentiers avaient proposé de répercuter cette baisse sur le prix du ciment. La décision devait entrer en vigueur entre juillet et août. Cela n'a pas été le cas, puisque c'est juste en ce début de semaine que Ciment du Maroc s'est décidé à franchir le pas. Concrètement, cette société qui s'érige en précurseur dans le respect des termes du deal, applique une baisse différenciée de prix suivant les régions où elle a un site de production. Ainsi, sur son site d'Indusha basé à Laâyoune, la tonne chute de 16,3 DH HT. Sur Agadir, cette baisse est de 14,6 DH. Tandis que sur Marrakech et Safi, elle est respectivement de 13,6 et 13,8 DH. Selon les promoteurs de l'initiative, "cette baisse différenciée s'explique par deux facteurs : le niveau de consommation thermique et le process de fabrication utilisé". Autrement dit, si les autres professionnels devaient suivre, on risque d'assister à une véritable valse de prix faisant apparaître de l'inachevé au niveau du compromis ainsi trouvé. Sans doute est-ce là la raison essentielle qui fait que les professionnels traînent les pieds ! En tous cas, il faut s'y attendre. Même si baisse généralisée il y aura, elle ne sera pas uniforme. L'Etat a en effet cédé aux pressions des cimentiers sans imposer un prix auquel tous devraient se conformer. Son principal intérêt dans cette affaire était tout simplement de voir ces derniers contribuer aux efforts dans le bâtiment, à la nouvelle impulsion donnée au programme de logement social et par extension au développement des infrastructures de base ainsi que des capacités hôtelières et sportives. Pour rappel, le 5 juin 2003, les pouvoirs publics ont décidé de réduire de près de 2/3 le poids de la TIC sur les combustibles industriels. Ainsi, cette taxe est passée de 386,70 DH la tonne à 182,40 DH pour le fuel. Elle n'est plus que de 83,50 DH pour le coke de pétrole au lieu de 232,90 DH. En revanche, elle est restée inchangée pour les autres produits pétroliers comme l'essence et le gasoil. L'énergie représentant 60 à 70% des coûts variables dans le secteur cimentier, les professionnels, qui ont tous converti leurs usines au coke de pétrole (un des combustibles les moins onéreux), ont donc bien accueilli cette mesure qui devrait leur permettre de renforcer leur compétitivité. En effet, même si leur préférence allait à une taxation en bout de chaîne notamment sur le produit fini plutôt que sur les intrants énergétiques - la TIC renchérissait le prix du coke de 40%- l'établissement d'un calendrier de démantèlement de la TIC sur les combustibles s'inscrit parfaitement dans la logique du démantèlement tarifaire prévu dans les accords avec l'UE et avec les pays arabes. Par ailleurs, face à la disparition progressive des droits de douane, cette mesure permettra certainement à l'industrie marocaine de pouvoir tenir devant la concurrence directe des pays disposant soit d'une énergie à prix inférieur à celui du Maroc, soit d'une législation adaptée à l'utilisation d'une énergie de susbstitution. En tous cas, le prix actuel hors taxe du ciment est comparable à celui pratiqué dans la majorité des pays du pourtour méditerranéen. Les professionnels pensent qu'il pourrait davantage être abaissé si la fiscalité était alignée sur celle des pays voisins. A un peu plus d'une moyenne de 65 dollars la tonne de CPJ 45 vrac - baisse de la TIC intégrée - le prix du ciment est comparable à celui pratiqué en Espagne, inférieur à celui de la France et du Portugal. Toutefois, il est supérieur à ceux de la Turquie et de l'Egypte qui bénéficient d'une énergie beaucoup moins taxée, de subventions pour leurs investissements et d'une dévaluation de leur monnaie entre 2000 et 2002. Les investissements prévus L'industrie cimentière marocaine compte actuellement 10 usines, 3 broyeurs ciment et 2 stations d'ensachage. La capacité installée totalise10 millions de tonnes. Elle passera à 11 millions avec la mise en service deTétouan II, prévue courant octobre prochain. Sinon, pour la période quinquennale 2000-2004, les investissements à réaliser par les membres de l'APC (Association professionnelle des cimentiers) se montent à 5 milliards de DH. Quelque 500 millions par an sont affectés à l'achèvement de la mise à niveau des installations, la qualité, la sécurité et l'environnement. Quant au complément, il doit servir à la construction de deux usines : l'une à Tétouan et l'autre à Settat. La TIC, un impôt très décrié Historiquement, l'instauration de la TIC (taxe intérieure de consommation) dans la politique fiscale du secteur énergétique date de 1995. Depuis cette date, la TIC et la TVA constituent les deux principaux impôts prélevés sur les produits pétroliers. Ensemble, elles rapportent plus de 13 milliards de DH au budget de l'Etat. Très décriée, cette fiscalité et surtout la TIC, a alors fait l'objet de plusieurs propositions de réforme. Il a été notamment suggéré de décomposer cette taxe en part fixe et part variable suivant les variations du cours mondial du pétrole. Avec comme objectif de faire jouer un effet levier qui permettrait, à la fois, une auto-régulation et un amortissement d'éventuels chocs pétroliers. Mais cette proposition a été abandonnée parce qu'elle risquait d'occasionner un manque à gagner pour le budget de l'Etat. Depuis, il n'y avait pas de mesure de substitution. Sauf que, d'abord les cimentiers avaient obtenu le drawback sur la production exportée en 2000. Et que l'année suivante l'ONE avait également obtenu une réduction de cette taxe (TIC) sur le charbon utilisé à Jorf Lasfar.