Le 28 mai 2009, s'est éteinte à Nice, Sara Alexander. L'auteur, compositeur et chanteuse polyglotte et cosmopolite, a consacré son existence au service du rapprochement israélo-palestinien. E n 1986, le public Marocain découvrait une chanteuse hors catégories au festival de Marrakech où elle partageait l'affiche, entre autres, avec Sapho et Alpha Blondy. Aux identités multiples et racines diverses, Sara Alexander, fille d'immigrants turcs et roumains, juifs et tziganes, est née à Jérusalem en 1942. Premier prix de violon au conservatoire de Haïfa, elle s'est fait connaitre surtout grâce à son jeu inégalable de l'accordéon qu'elle manie à merveille. En 1967, elle quitte Israël après la guerre des 6 jours pour s'installer en Provence. C'est en France qu'elle commence à confectionner son propre répertoire, « des paroles de prêche dans le désert, chantées sur sa guitare pour défendre obstinément l'apaisement » écrit Bouziane Daoudi. En 1979, elle enregistre à Marseille son premier album, « Shalom-salam », sur le bateau de la paix de l'ancien pacifiste israélien Abie Nathan. Depuis, elle ne cesse de sillonner le monde, en compagnie de musiciens métisses en provenance des quatre coins de la Méditerranée, pour défendre le rapprochement entre Palestiniens et Israéliens, entre juifs et arabes, la cause de la paix et des droits de l'homme. Sur les routes, elle croise et côtoie sur scène Joan Baez, Peter Seeger, Leonard Cohen, Miguel Angel Estrella, le groupe palestinien Sabreen, où se produit la chanteuse Kamilia Joubrane, ainsi que le regretté grand poète Mahmoud Darwich. Le 27 septembre 2003, elle déclarait à l'occasion du concert donné au parc des expositions à Paris et où participait Marcel Khalifa, Djamel Alam, Manu Dibango et Sapho, « La seule vérité qui existe est la recherche de la paix envers et contre tout » avant de poursuivre « si les colonies et les idiots ne sont pas démantelés, il n'y aura pas de paix. ». En 2005, à la veille des émeutes en banlieue, elle avait entamé une tournée musicale dans les quartiers populaires d'Ile de France, afin de contribuer à apaiser les tensions intercommunautaires. Avant de tirer sa révérence, Sara Alexander mettait les dernières retouches à la traduction de l'Arabe d'un recueil du poète de Nazareth, l'ami et le complice George Farah. Comme reliques, Sara Alexander nous lègue une dizaine d'albums dont le dernier « Cosmopolis », d'un style electro-world, est sorti en 2006 et deux livres testamentaires, « Shalom-Salam », publié en 1999, et « l'urgence d'aimer », sorti chez l'Harmattan en 1984. Quant à ses cendres, elles ont rejoint la Provence, sa terre adoptive, pas loin de la mer Méditerranée. ■ Un style inédit Au carrefour du jazz, du folk et de la pop, la musique de Sara Alexander se veut un hymne au métissage et au dialogue des cultures. Un style inédit, concocté dans la mouvance de la world music, qui se nourrit d'innombrables racines imbriquées les unes sur les autres. Poèmes apostrophant l'injustice, mélopées proche orientales, gémissements tziganes, lamentos balkaniques, cris gitans, nostalgie des steppes asiatiques, danses Gnaoua et folk juif, l'ensemble mélangé aux rythmes et musiques actuelles. La musique de Sara Alexander, transgressant langues et frontières, se veut inédite et novatrice au service de la paix, de la reconnaissance mutuelle et de la cause des droits humains.