Le concert de Warda le 16 mai dernier, l'un des moments les plus émouvants de la 8ème édition de Mawazine, restera gravé dans les mémoires. La grande diva de la chanson orientale entretient une relation affective avec le pays qui vient de lui rendre le plus vibrant des hommages. Venus des quatre coins du pays, ils étaient plus de 30000 à chanter en chœurs les mémorables morceaux de la rose d'Algérie. La surprise fut grande quand le conseiller du roi Mohamed Mouatassim lui remet le Wissam Alaouite de l'ordre de commandeur. Le geste est plus que symbolique à plus d'un titre. Née à Puteaux dans la région parisienne d'un père algérien et d'une mère libanaise, Warda a entamé sa carrière à l'âge de 11 ans en animant une émission pour enfants à la RTF. Au Tam-Tam, cabaret du quartier latin que gérait son père et centre d'activité du FLN avant sa fermeture en 1958, elle fréquente les grands noms de la chanson orientale et maghrébine dont Mohamed Fouiteh et Amr Tantaoui qui l'encourageaient à poursuivre une carrière prometteuse. De cette époque date ses premiers refrains dont « Ya mraouah lelblad » de Zaki Khraef et « Bladi ya bladi » de Jamoussi. Hymnes patriotiques qui seront suivis par « Ya hbibi ya moujahid », « ana min al jazair, ana arabia », « al watan al kabir » et « al jil assaid », composés par Mohamed Abdelouahab et interprétés par Sabah, Chadia, Najat Saguira, Abdelhalim Hafez et Mohamed Kendil, sans oublier « Dalila al jamila » consacrée à la Palestine. Au retour de la famille royale marocaine de son exil, Warda chanta pour le prince Moulay Hassan. En 1956 elle enregistre « Nachid sidi Mohamed », gravé dans l'un des 78 tours de Pathé Marconi célébrant l'indépendance du Maroc. Des amis se souviennent de son séjour à Casablanca où elle fréquentait le Coq d'Or de Salim Halali et entretenait des relations intimes avec les artistes marocains dont Hajja Hamdaouia et Bouchaib Bidaoui. De retour en Algérie en 1962, après l'exil au Liban et des séjours en Egypte, Warda se marie et met un terme à sa carrière. En 1972, la voilà de retour sur scène pour la célébration du dixième anniversaire de la révolution. Le succès après ce premier come-back, est foudroyant. Libre, elle s'envole pour le Caire, se marie avec Baligh Hamdi, le plus novateur des compositeurs arabes, et les tubes se succèdent. Le public de Rabat a fredonné avec plaisir et nostalgie les « Fi yaoum wa lila », « Hikayati maa azzaman », « Akdeb alik », « khallik hina », « Ismaouni », « Laoula al malama »… A l'aise dans tous les genres du monde arabe, à l'écoute de l'air du temps, elle surprend avec « Harramt ahibbak » et « Bitouannas bik » qui relèvent de la dance music, concoctés par Omar Batticha et Salah Charnouvbi. Warda venait d'affronter, avec succès, les jeunes stars qui l'avaient enterré trop vite. ■