La mentalité conservatrice de la société marocaine reste imperméable à la pénétration de certaines professions encore «honnies» de notre système de valeurs et de références, comme les consultations de psy ou le recours aux services d'un détective privé. D'ailleurs, à valeur d'aujourd'hui, le bilan est vite dressé dans le pays : ils ne sont pas plus d'une poignée qui se compte sur les doigts d'une seule main. Et encore, car certaines tentatives d'implantation de ces professionnels méconnus du grand public et non reconnus par la loi (ils sont officiellement «agents de recherche» et non détectives), ont été carrément vouées à l'échec. Et qu'aux dernières nouvelles recueillies auprès de sources sécuritaires, leur nombre se réduirait actuellement à… deux personnes formant d'ailleurs un tandem. Plus encore, on parle d'un couple à Casablanca qui ne ferait que de la consultation de fichiers. Une sorte de « police privée », sans armes ni autorité d'intervention directe ou d'arrestations, versée dans la filature et la quête de renseignements, pas exclusivement conjugales ou familiales, mais pouvant englober les domaines pénal ou criminel, les méfaits économiques, les malversations commerciales, financières… et même les recouvrements de créances. «Nous ne sommes pas que des espions de cocus» Son regret après des études universitaires médicales et une formation en recherche et investigation pour détectives privés en France et au Canada : «Je n'ai pas pu intégrer la police française parce que je devais abandonner définitivement ma nationalité marocaine». En 2003, elle a plus d'une décennie d'expérience derrière elle pour se résoudre à rentrer au Maroc : «Je n'ai pas pu rester indifférente aux signes de changement qui me parvenaient en France. Le roi a fait beaucoup de choses magnifiques, notamment pour redonner la place qu'elle mérite à la femme marocaine». Après avoir ouvert un bureau de détective privée, elle négocia plusieurs missions au tarif minimal de 5000 DH l'unité. Fatiguée du peu d'écho que la profession avait dans notre pays, elle a songé à changer de registre en caressant le projet de se lancer dans la sécurité privée en montant une société de gardiennage. Fini le temps où ces professionnels étaient exclusivement confinés à une «brigade des cocus» engagés pour dénouer les mésententes des couples ou démasquer les tromperies conjugales. Ils affirment à qui veut l'entendre, qu'ils ont suivi des formations en conséquence pour se muer en véritables experts de la surveillance et du renseignement, passés maîtres dans l'art de la recherche des personnes et des biens. Mais qui sont-ils au juste en dehors de leur masque de détective privé ? Des chercheurs d'informations», des «enquêteurs libres», des «enquêteurs de droit privé», des «agents privés de recherche», des « professionnels de renseignements divers», des «enquêteurs d'assurances»… Une certitude : les perspectives d'assimilation de la profession au Maroc sont loin de leur faciliter la tâche, puisque les pouvoirs publics ne leur reconnaissent que le titre d'«agent privé de recherches». Toutefois, ils ne sont tolérés que lorsque l'objet de leur activité traduit des prestations tels le gardiennage ou encore la sécurité. Mais le métier souffre de l'indifférence générale pour ne pas être réglementé et ne nourrit pas son homme. Car souvent ils sont contraints de vivoter en exerçant dans l'anonymat. Et les avocats qui se montrent leurs principaux employeurs pour complément d'enquête ou de renseignement, ne sont pas légion à se bousculer au portillon. ■