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Medecine arabe ancienne et savoirs populaires: Une somme, une encyclopédie
Publié dans La Gazette du Maroc le 20 - 02 - 2009

Il fallait le faire pour qu'un trésor rescapé du passé ne sombre pas définitivement dans l'oubli. La pharmacopée traditionnelle marocaine de Jamal Bellakhadar, n'est pas un glossaire ni un traité de médecine, mais bien plus que cela !
Ils étaient cent, ils étaient mille, venus de toutes les contrées du monde musulman, appartenant à toutes les classes. La plupart avaient beaucoup voyagé. Les uns étaient devenus riches et célèbres, les autres, nés humbles, avaient choisi de le rester, mais avaient la considération et le respect de leur entourage. Tous étaient instruits des choses de la médecine et de bien d'autres choses encore. Et pourtant, pas un seul ne prétendait cumuler l'ensemble du savoir médical, détenir entre ses mains l'art total, ou réussir mieux que le voisin. Médecins, chirurgiens, rebouteux, apothicaires, psychothérapeutes, poseurs de cautères ou de ventouses, tout ce monde, touchant de près ou de loin à la science des soins, avait une profonde conscience des limites de la compétence de chacune et de tous, les uns vis-à-vis des autres - en toute humilité -, mais surtout limites de tous face à la volonté de Dieu, la seule qu'on ne puisse défier ou asservir. Mais humilité ne signifie pas pour autant faiblesse, démission ou fatalisme. Car tout malheur n'est pas forcément dicté par Dieu, toute épreuve n'est pas une sanction, et rien n'est plus contraire à la foi que l'inaction. Agissez, enseigne Le Prophète, car seule l'action peut ramener la paix du corps et de l'esprit. Mal, malheur, maladie, où est la différence dès lors que ce n'est pas une malédiction ? Partant de là, pourquoi ne pas tout essayer, ne pas agir jusqu'au bout, jusqu'à la frontière du possible et de l'impossible ? Alors -si Dieu le veut- obligatoirement le salut viendra. On imagine aisément combien ce formidable activisme, nullement contradictoire avec une profonde soumission à la volonté divine, pouvait être générateur d'énergie et d'espoir. Aujourd'hui, en médecine traditionnelle, les choses n'ont pas fondamentalement changé. Si les «tradipraticiens» sont moins instruits et moins considérés, moins nombreux et moins demandés, leur conviction activiste et leur esprit charitable demeurent entiers. Sollicité à n'importe quelle heure, le «tradipraticien» se rendra volontiers au chevet d'un grand malade, partagera le repas familial, se joindra aux prières communes et aux jeûnes de grâce pour le salut du malade. En toute simplicité, il discutera avec l'entourage des causes possibles de la maladie et des moyens à mettre en oeuvre pour la combattre. A aucun moment, la médecine de ces praticiens du peuple ne prend le visage d'un savoir immanent, d'une science aristocratique, d'une sentence qui tombe d'en haut, indiscutable et sans appel. L'entourage dans son ensemble participe à l'acte thérapeutique et aux soins. C'est en partie cela qui fait de la prise en charge du malade, en médecine traditionnelle, une affaire vécue et ressentie par tous comme un problème social du groupe tout entier, avant d'être un problème individuel, celui du malade. Le rituel médical - s'il existe bien, entouré d'une aura de symbolique musulmane - a cependant débarrassé l'acte thérapeutique proprement dit de toute prétention à une mise en scène individuelle du soigné ou du soignant. A la limite, la maladie - tout comme la mort - est considérée et traitée comme un problème normal de la vie du groupe, non comme quelque chose d'aberrant ou d'anormal. Ici, le tragique -si tragique il y a- vécu par tous en communion d'actes et de pensées, n'a rien de théâtral. Et puis il y a, ce qui accroît encore la “sociabilité” de cette médecine, la grande proximité régissant la relation soigné-soignant et la simplicité de cette relation. Le discours du «tradipraticien», sa façon de vivre, les modalités de soins, ne sont pas étrangères au malade et à son entourage. Ainsi, l'intégration au milieu du praticien se fait instantanément. Là encore, le groupe social tout entier se retrouve à travers la relation qui s'établit entre le malade et le thérapeute. N'apporterait-elle que du réconfort, cette médecine-là, par sa sociabilité, agit positivement sur la maladie. Chaleur humaine et charité, sollicitude et dévouement, autant d'attitude rendant à la médecine son visage humain et fraternel. Ne serait-on pas en droit d'attendre de cet art une aptitude à soulager au moins égale à celle de la technique ? Voilà pourquoi nous disons: la médecine traditionnelle dans nos pays est d'abord une science du rapport humain. En retour de ses services, le «tradipraticien» n'exige généralement aucune rémunération fixe. Les honoraires sont laissés à la discrétion du patient, chacun selon ses moyens: un cadeau princier, un peu de monnaie, un paiement en nature. La dignité de la profession s'en trouve rehaussée et, du même coup, sa crédibilité.
Un autre élément joue en faveur de l'intégration de la médecine traditionnelle à la vie sociale : l'appartenance du savoir qui la sous-tend à la mémoire collective du groupe tout entier. Au point que ce savoir sort souvent du champ de la stricte exclusivité des professionnels pour revêtir un caractère d'«art familial». En effet, il n'y a pas un clan, une famille, qui ne possède en son sein une personne d'âge mûr, plus ou moins dépositaire des connaissances médicales du groupe et les exerçant au besoin au profit de celui-ci. Ces «médecins réservistes» se manifestent tout spécialement en période d'épidémie, de guerre ou en situation d'isolement du groupe. Au Sahara, chaque campement nomade a son guérisseur et dans l'Atlas, les douars isolés s'arrangent toujours pour retenir auprès d'eux l'une de ces personnes, généralement une femme âgée ou un « Taleb » itinérant n'ayant pas d'attaches particulières. En Afghanistan, aujourd'hui ravagé par la guerre, dans le camp de chaque faction, ce sont ces auxiliaires de santé qui -non sans succès- soignent les malades, pansent les blessés, extraient les balles, amputent et procèdent à toutes les opérations médicales nécessaires à la continuation de l'effort de guerre(...)
L'irruption de la médecine occidentale au Maroc, au début de la période du Protectorat, à l'intérieur d'une société autarcique et traditionnelle, créa de profonds bouleversements dans la pratique des soins et la mentalité médicale des populations de notre pays. Chassée de la place publique, dépossédée de son statut officiel, non sollicitée de surcroît par l'occupant, la médecine traditionnelle, forte de son emprise sur les larges masses, se réfugia dans une attitude hostile et conservatrice. Cette résistance farouche traduisait en réalité la position unanime de la société marocaine face au danger colonial: le refus de la déculturation. Dans ce conflit, la médecine traditionnelle se battait incontestablement à partir de bonnes positions. En effet, face au caractère brutal et non désintéressé de l'intervention médicale étrangère, la science traditionnelle des soins opposait un visage indiscutablement plus charitable, une attitude moins distante vis-à-vis des populations et mieux intégrée à l'environnement, c'est-à-dire finalement une plus grande sociabilité. D'où le large soutien qu'elle reçut des utilisateurs, la ténacité avec laquelle elle disputa sa clientèle aux médecins coloniaux et le succès relatif qu'elle remporta dans l'affirmation de son identité. Sa vitalité aujourd'hui encore, après un siècle environ de conflits, témoigne bien de son endurance et de sa crédibilité auprès des larges masses. Rien de tout cela n'aurait pu être - à l'heure des grandes souffrances endurées par le peuple - si la médecine traditionnelle marocaine n'avait eu une aptitude réelle à soulager. Et puis, petit à petit, au fur et à mesure des progrès de la pénétration coloniale, la tension baissa et l'antagonisme violent qui présidait antérieurement aux rapports entre les médecines, changea de nature. A sa place s'établit une relation officielle d'ignorance mutuelle, dissimulant mal des tentations secrètes de subversion et un nouvel état d'esprit de curiosité réciproque. A travers cette relation, ainsi dépassionnée, un regard nouveau de l'un sur l'autre se fit, rendant possible une approche plus réaliste de la différence et une évaluation objective de l'adversaire. Cette perception nouvelle du vis-à-vis, profita aux deux camps, chacun découvrant dans la supériorité de l'autre, les raisons de sa propre faiblesse. Indéniablement sur certains points - pose du diagnostic, épidémiologie, pathologie, chirurgie, technologie instrumentale et moléculaire, pharmacodynamie- la médecine traditionnelle enregistrait des insuffisances certaines, un moment où, en médecine moderne, l'accent était mis en premier lieu sur l'instrumentation et les explorations biologiques. Consciente de la situation créée par l'inégalité des moyens, la médecine traditionnelle, non sans un certain réalisme, procéda à un repli presque total de ses forces sur le terrain où elle se trouvait en meilleure posture : la thérapeutique. Davantage que cela, la pharmacopée marocaine, faisant preuve d'une grande capacité de réacommodation, assimila quelques produits modernes dont l'efficacité avait fait d'eux de véritables panacées: D.D.T., huile de foie de morue, liqueur de Dakin (largement employée aujourd'hui par les accoucheuses traditionnelles), coton hydrophile et pansements, iode, iodure de potassium, aspirine, nivaquine, etc. Cette rééquilibration par redéfinition de la compétence et assimilation permanente de la nouveauté, jointe à une vocation humanitaire et sociale démontrée quotidiennement, fut que la médecine traditionnelle marocaine resta toujours hautement impliquée dans l'évolution du pays. D'où sa maintenance aujourd'hui encore, presque intacte, après un demi-siècle de conflits et de rivalités. De son côté, la médecine moderne dut, elle aussi, composer. Imperceptiblement, presque à son insu, elle assista, impuissante, au débordement du contexte superstructurel et psychosocial qu'elle avait elle-même créé autour des notions de soin, de maladie, de santé, par des éléments relevant de la mentalité médicale populaire et possédant une forte emprise sur les esprits en raison de leur conditionnement moral et affectif. Ainsi, la relation soigné/soignant, les conceptualisations sur la maladie et la mort, l'enfance et la sénilité, le rapport existant entre agent pathogène et antidote, la notion même de pathologie, l'ambiance du déroulement de l'acte médical lui-même, tout cela fut profondément affecté par les attitudes traditionalistes de la société.
Au même moment, l'ingéniosité des populations à trouver dans la nature des remèdes simples à leurs souffrances, obligeait la médecine officielle à faire évoluer ses positions concernant la phytothérapie traditionnelle, dans la mesure où celle-ci offrait des réponses plus adaptées aux situations de pénurie. De la sorte se produisit une interpénétration entre deux génies, deux savoir-faire d'inspirations totalement opposés, interpénétration non encore assumée par les deux parties, mais laissant entrevoir déjà la possibilité d'un véritable dialogue pour le plus grand bien de la pratique médicale dans ce pays et la bonne santé de ses habitants. Ainsi émergera un art médical véritablement national, puisant aux deux sources du modernisme et de la tradition, et faisant se retrouver, sous l'égide du progrès social, deux valeurs nécessaires à tout développement : la science et l'humanisme…
Thérapie pharmaceutique. Ces médicaments qui rendent encore plus…malades !
C'est tout comme pour les fruits consommés par des Marocains qui n'y retrouvent plus la saveur d'antan. Idem pour les produits laitiers, le bon café aux arômes caractéristiques tassés et autres produits et articles de grande consommation. C'est pareil, car les médicaments n'échappent guère à cette redoutable logique contraire à toute éthique dans le service client. Nous savons déjà que le principe actif de tout médicament produit et commercialisé dans nos pharmacies est l'un des plus faibles au monde, comparé aux produits similaires dans les pays de référence, mais il est un autre phénomène qui déçoit des pans de plus en plus larges de la population à la recherche d'une médication efficace qu'elle semble ne plus trouver. C'est que la prise des médicaments achetés au pharmacien du coin, souvent en mode d'automédication, sans passer par la charge onéreuse des ordonnances médicales, paraît ne plus provoquer les effets décrits dans la notice d'emploi. « C'est drôle, mais le médicament que je viens de prendre ne me fait aucun effet thérapeutique », s'écrient d'aucuns. « La triche aurait-elle gagné même la fabrication des remèdes au Maroc ? », se scandalisent d'autres. Le plus grave, c'est que certains produits de marque identique ne se… dissolvent pas de la même manière et, sachant que les Marocains sont de plus en plus abonnés aux maux de tête et aux douleurs, l'exemple du Panalgic effervescent, très largement demandé, se dilue dans l'eau soit lentement, soit rapidement, soit intégralement, soit partiellement pour produire un effet douteux. Mais que se passe-t-il dans nos murs au moment où la bataille du générique est tranchée par les pouvoirs publics et que les bio-équivalents sont désormais exigés pour les licences de commercialisation ? La profession des médecins du secteur privé témoigne de ces lamentables dérapages constatés dans la propagation du charlatanisme médical et de l'automédication ouvrant la voie à tous les abus. Exemple : prenons le cas d'un patient atteint de toux et à qui le pharmacien délivre un médicament antitussif, tandis que ce patient est affecté d'une tuberculose. Résultat : non seulement, on aura un malade dans un stade avancé de la tuberculose, mais aussi et surtout toutes les autres personnes qu'il a contaminées entre temps. C'est dire que la vente de médicaments sans ordonnance médicale peut s'apparenter à un « meurtre sans préméditation » dans les cas les plus risqués. Certains exemples sont tout simplement renversants : les ordonnances sont verbalement prescrites par l'entourage du patient, chacun se la jouant expert ou chevronné en la matière sans passer par les cabinets des blouses blanches. Ainsi que l'utilisation du remède sans consulter la notice d'emploi. Résultat : un patient allait commettre l'irréparable en se voyant fortement conseillé de consommer par voie auditive des gouttes …buvables !!!
Le droit à la santé pour tous : Un projet en mal de rodage
Un des principaux chevaux de bataille du premier gouvernement d'alternance conduit par El Youssoufi qui l'a érigé en projet de société fondé sur le credo inclusif « Le droit à la santé pour tous », et que l'Exécutif Jettou a tâché de mettre en œuvre, depuis le projet phare d'AMO (Assurance maladie obligatoire) éprouve beaucoup de difficultés à en normaliser les mécanismes de fonctionnement. Ce projet est en mal de rodage tandis que les corollaires AMO, le RAMED (Régime d'assistance médicale pour les économiquement faibles) végète encore à l'état expérimental dans la région pilote du Tadla-Azilal, et INAYA ciblant les professions libérales et travailleurs indépendants, attend toujours son heure. Quelles difficultés ou carences sont alignées selon de nombreux témoignages de bénéficiaires de la couverture médicale : lenteur bureaucratique, rejet de dossiers de maladies, retards de remboursement, voire pas de remboursement du tout, parcours du combattant pour la prise en charge des pathologies lourdes ou graves, conflits à répétition entre gestionnaires et prestataires de soins, tarifications anarchiques des actes médicaux, médicaments trop chers et faiblement actifs…bref, les tares constatées sont multiples et béantes pour espérer des progrès sociaux palpables et salutaires dans ces conditions pour les Marocains assurés et démunis. On ajoutera les pratiques au quotidien dans des hôpitaux qui servent plus de dortoirs et continuent de fonctionner comme avant, le calvaire des urgences où les patients sont laissés pour compte. Mais où va le pays à cette cadence ? Quand cesseront les errements et l'impéritie coupables des décideurs et professionnels? Si l'AMO caresse l'ambition de garantir la couverture à terme de 30% de Marocains, toujours est-il que plus des deux tiers de nos populations demeureront toujours en fracture médicale et sanitaire totale. Alors que bon nombre d'entre elles sont sujets aux pathologies les plus redoutées dont les plus graves naturellement. Et nous savons que nombre de nos citoyens meurent par automédication inappropriée, incapacité à effectuer des check-up de santé ou à financer les soins de longue durée ou les interventions chirurgicales lourdes comme les opérations cardiovasculaires, les greffes rénales et autres. Et si d'aucuns n'hésitent pas à diagnostiquer que « La santé …tue au Maroc », ou encore « L'Hôpital, ce grand malade ! », c'est pour mettre en garde contre l'étendue des mortalités infantiles et adultes qui sévissent par défaut de système de prévention et de couverture efficace. Chaque citoyen qui meurt abandonné dans la nature, est un cas de conscience social troublant et douloureux. Sauver une vie humaine est un devoir moral incontournable requérant l'attention des gestionnaires et prestataires de soins ainsi que la mobilisation des moyens nécessaires et suffisants pour rompre avec le bricolage, l'improvisation, l'anarchie et autres travers moralement peu recommandables. Sauf bien sûr, si dans nos murs, le Serment d'Hippocrate se soit définitivement mû en…serment d'hypocrite !
Syndicat national des médecins du secteur libéral..Pour une pratique citoyenne et sociale
C'est le mois dernier, au cours duquel s'était tenu le Congrès national accueillant 213 congressistes élus dans 20 régions, à raison d'un congressiste pour 20 adhérents, autour du thème « 50 années pour une pratique médicale libérale et sociale», que fut célébré le cinquantenaire de la création du SNMSL, 1er Syndicat Professionnel des Médecins du Secteur Privé du Maroc dont le président fondateur est feu Dr TAZI Abderrahmane. Revendication centrale de la corporation scientifique : militer pour la révision du dahir du 7 Juin 1949 organisant l'Ordre des Médecins. Promouvoir la pratique citoyenne et sociale dûe à la profession médicale a été une dominante des débats au congrès. Le SNMSL est un syndicat professionnel, regroupant les médecins spécialistes et les médecins généralistes exerçant dans le secteur privé au Maroc. Sa vocation consiste à préserver et à renforcer l'unité syndicale au sein des médecins du secteur libéral au Maroc. Le syndicat vise également la défense des intérêts professionnels, matériels, moraux et sociaux des médecins du secteur libéral, à titre individuel et collectif. Il est habilité de ce fait à intervenir auprès des pouvoirs publics ou judiciaires et des différents acteurs intervenant dans le domaine de la santé au Maroc, pour défendre les intérêts des médecins du secteur libéral et promouvoir la médecine libérale au Maroc.


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