Enfin, le tant controversé projet de loi portant nouveau code de la circulation routière vient d'être adopté par le Parlement sur fond de consensus général piloté par le ministre de l'Equipement et du Transport. Karim Ghellab, ministre de l'Equipement et du transport a su mener, avec des trésors de patience, sous des tonnes de pressions des lobbys professionnels et syndicaux, et à la faveur d'une ouverture à toutes les critiques et suggestions, un long et périlleux exercice de débat démocratique jusqu'au bout. Avant de restituer, dans le consensus général, un code de la route prêt à l'emploi. Et si le dirigeant Istiqlalien a mis un point d'honneur à tenir tous ses engagements et à prendre en ligne de compte toutes les remarques et suggestions se rapportant aux amendements du nouveau texte (près de 300 amendements ont été incorporés à la nouvelle mouture), que ce soit pendant les discussions des commissions bicamérales, lors des réponses aux questions hebdomadaires, dans les colloques et séminaires consacrés au secteur, ou encore pendant les épuisantes et interminables réunions tenues avec les professionnels et syndicats de transporteurs, toutes catégories confondues, qu'en sera-t-il dans l'autre camp au moment de passer à la vérité des pratiques de la conduite quotidienne. Infléchir l'hécatombe routière Si d'aucuns ont mis du zèle à crier victoire trop tôt pour mettre en avant la suppression des peines privatives de liberté dans la mouture approuvée, et d'avoir allégé le poids des pénalités pécuniaires aux infractions du code, ils se trompent de cible et s'emmêlent les priorités. Car le vrai débat, qui a longtemps été dévoyé au prétexte d'une «transposition suédoise» au Maroc, n'est pas dans l'élimination des sanctions d'emprisonnement redoutées par les routiers et conducteurs, encore que les cas réprimés par le code pénal restent toujours en vigueur, mais dans la finalité espérée d'infléchir nettement l'hécatombe routière qui fait des milliers de victimes mortelles chaque année. C'est d'ailleurs dans ce souci primordial que Ghellab a toujours défendu bec et ongles son projet comme en témoigne sa première déclaration à l'issue du vote de la première Chambre qui a approuvé la nouvelle loi lundi dernier : «Le Code de la route, adopté lundi soir par la Chambre des représentants, est de nature à ouvrir de nouvelles perspectives aux efforts visant à réduire et à prévenir les accidents de la circulation». En s'attachant à privilégier l'argument dissuasif que le gouvernement aspire à mettre en œuvre en vue de faire de cette loi un instrument efficient et opérationnel de répression des contrevenants aux dispositions du Code de la route. Grand vainqueur de cette épreuve qui a connu des menaces de grèves, des tensions surchauffées, des manifestations sectorielles, des «bagarres rangées» dans une pléthore de réunions : la démocratie. Jamais projet de Loi n'a fait l'objet au Maroc d'un si grand intérêt de l'opinion publique, d'une si forte mobilisation de toutes les instances institutionnelles et législatives et d'une si puissante implication des professionnels et des syndicats de transporteurs. Désormais, la balle est sur le bitume dont les usagers doivent prouver leur bonne foi et leur sens de l'honneur pour respecter la totalité des dispositions de la circulation routière. Ils doivent surtout comprendre que l'abandon des peines privatives ne signifie nullement l'impunité pour les contrevenants dangereux et les récidivistes indisciplinés. Car si les sanctions réprimant les infractions au code sont allégées, en revanche la loi pénale sera, ce coup-ci, pleinement appliquée. ■