Après avoir effectué une tournée dans les autres pays du Maghreb, Condolezza Rice a consacré la fin de son périple pour des entretiens marathons avec le gotha sécuritaire et diplomatique marocain. La secrétaire d'Etat américaine, en fin de mandat, s'est contentée de réitérer les engagements de l'oncle Sam envers le Maroc. Condolezza Rice a débarqué à Rabat dans la soirée du samedi 06 septembre dans la discrétion la plus absolue. Les services de presse de l'ambassade américaine, en général très diserts sur ce genre de visite, avaient maintenu le black out total sur les détails de l'arrivée de Rice au Maroc. Pour des raisons de sécurité, la secrétaire d'Etat américaine ayant été l'objet de menaces terroristes quelques jours avant qu'elle n'entame sa tournée au Maghreb, puisqu'un jihadiste a appelé à l'assassiner durant son périple au Maghreb. Sur cette question, la numéro deux du département d'Etat américain, ne semble pas particulièrement remontée: «Les terroristes essaient. Ils choisissent des cibles et malheureusement il y a eu une série d'explosions ici. Je ne pense pas qu'un risque particulier existe dans cette région», avait-elle précisé à ce sujet à Alger, en réponse à la question sur une menace d'attentat d'Al-Qaïda au Maghreb à son encontre. En tout cas, si le souverain n'a pas reçu Rice, le Maroc n'a pas lésiné sur les moyens pour l'accueillir : tout le gotha sécuritaire et diplomatique a été mobilisé pour prendre part aux entretiens. Le Premier ministre marocain Abbas El Fassi, le ministre de l'Intérieur Chakib Benmoussa, et le chef des renseignements militaires Yassine Mansouri, sans oublier l'incontournable Taieb Fassi Fihri. «Les questions d'ordre régional et particulièrement l'état actuel des relations intermaghrébines, les perspectives de la construction de l'Union du Maghreb Arabe (UMA) et la question du Sahara marocain ont été au menu de ces discussions», a-t-on précisé au niveau des Affaires étrangères. Les entretiens ont porté sur les relations maroco-américaines, ainsi que sur le processus de réformes engagées par le Maroc et soutenues par l'Administration américaine. Sur la question du Sahara, les Etats-Unis n'ont pas changé de position, plus que jamais, l'administration Bush appuie une solution a précisé à Rabat la secrétaire d'Etat américaine. «Ce que nous recherchons, c'est une solution mutuellement acceptable. Il va y avoir une nouvelle série de négociations, nous allons la soutenir, il y a de bonnes idées sur la table et il y a des moyens d'aller de l'avant», a déclaré Rice lors de la conférence de presse organisée à l'issue de sa visite à Rabat, dernière étape de sa tournée maghrébine. La chef de la diplomatie américaine a estimé « qu'il est temps que ce conflit soit résolu. Il y aura bientôt une nouvelle série de pourparlers. Nous apporterons notre soutien à ces discussions, à cette médiation, il y a de bonnes idées sur la table et des moyens d'aller de l'avant», a-t-elle confié aux journalistes à Rabat après des entretiens avec des responsables marocains soulignant qu'il y aura un nouveau round de négociations sur la question du Sahara que les Etats-Unis vont soutenir. Faisant allusion aux pourparlers précédents entre les deux parties en conflit, Rice a tenu à rassurer tout le monde «Nous n'avons pas besoin de recommencer à zéro. J'espère que nous pourrons avancer et résoudre cette question. Nous avons soulevé la question du Sahara avec le Secrétaire général de l'ONU avant d'entamer cette tournée maghrébine». En effet, depuis juin 2007, l'ONU supervise des négociations directes entre le Maroc et le Front Polisario sans oublier l'Algérie. Quatre rounds de pourparlers ont eu lieu à Manhasset, près de New York, sans parvenir à une avancée notable. La responsabilité de l'impasse est imputée par le Maroc aux caciques du Polisario qui refusent de discuter du «plan d'autonomie au Sahara» proposé par le royaume. Le Front Polisario campant sur un plan de règlement prévoyant plutôt la tenue d'un référendum d'autodétermination. Un cinquième round est cependant prévu mais on n'en connaît ni la date ni le lieu. Le Secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-Moon, devant d'abord régler la question de la succession de Peter Van Walsun. Fin août, le diplomate néerlandais Peter Van Walsum avait démissionné de son poste de médiateur de l'ONU pour le conflit du Sahara. Walsum, en fonction depuis trois ans, avait provoqué l'ire des indépendantistes sahraouis en avril dernier en déclarant dans un rapport d'évaluation destiné au Conseil de sécurité qu'«un Sahara occidental indépendant n'est pas une proposition réaliste». La responsable américaine s'est dite convaincue que les relations bilatérales vont se hisser à un niveau plus élevé «où l'on pourra travailler ensemble sur les défis régionaux et mondiaux auxquels nous faisons face tous». Au delà de ces salamalecs, est-ce-que le Maroc gagne dans «cette amitié qui unit les deux peuples frères?». Il y a bien eu le fameux accord de libre-échange (ALE) signé entre le Maroc et les Etats-Unis, et entré en vigueur le 1er janvier 2006 mais que vaut réellement cet accord ? Les Etats-Unis exportent vers le Maroc une moyenne de 475 millions de dollars par an de produits, notamment les avions, les machines et les céréales. L'accord est supposé renforcer la présence d'entreprises américaines au Maroc dont le nombre atteint actuellement 120 sociétés avec un investissement estimé à plus de 600 millions de dollars. L'ALE prévoit la suppression des droits de douane sur plus de 95% des produits de consommation et des produits industriels importés dans le cadre des échanges commerciaux entre le Maroc et les Etats-Unis. Jusqu'à présent, les échanges commerciaux avec les USA ne comptent que pour 4.7% du commerce extérieur marocain, contre 56.9% avec l'Union Européenne. Robert Zoellick, représentant américain au commerce, avait confié, au lendemain de la signature de cet accord de libre-échange, que celui-ci avait peu d'importance pour les Etats-Unis du point de vue financier et économique. Ce qui veut dire explicitement, que l'objectif essentiel de l'offensive américaine sur le royaume, est le renforcement de son influence politique dans la région appréhendée dans le cadre d'une stratégie de recomposition complète des alliances politiques dans la région arabe et moyen-orientale. Enfin, la plupart des observateurs s'accordent à dire que la visite de la secrétaire d'Etat au moment où le gouvernement Bush est en fin de mandat, n'aura pas plus d'impact qu'un simple dîner d'adieu.