C'est souvent pareil avec les gens talentueux: ils ne parlent pas beaucoup, comme si toute leur énergie était consacrée à leur passion. Sana Redwani n'échappe pas à la règle. Etudiante en 2ème année de stylisme-modélisme au Collège Lasalle de Casablanca, la jeune fille est toute en nuances : réservée, mais pas timide, elle se confie, mais ne se livre pas. Pourtant, à 21 ans elle peut se vanter d'une jolie performance : au concours international de mode «Emple World» qui s'est déroulé récemment en Chine, elle était la seule fille représentante du monde arabe et du continent africain, excusez du peu. La chose n'était pas acquise d'avance puisqu'il fallait passer l'obstacle d'une rigoureuse sélection des meilleurs croquis. Sana a envoyé les siens à Pékin, et elle a été retenue. Le thème du concours, c'était «Les caractéristiques de l'art chinois». Sur place, deux jours de préparation pour le grand défilé : essayages, musique, maquillage, rien n'est laissé au hasard : «C'était vraiment intéressant pour moi, j'ai pu voir le niveau de création des autres stylistes, notamment au niveau de l'innovation des matières. J'ai vu ce que c'est que les techniques professionnelles». Le jour du défilé ? «C'était stressant, il y avait beaucoup de monde. C'était ma première expérience professionnelle. J'avais le numéro 21, et nous étions trente jeunes du monde entier». Elle a présenté cinq tenues, mélange de contemporain et de traditionnel, dont un boléro (petite veste) noir avec une seule manche et dont elle a conçu elle-même les accessoires. «Pour certaines tenues, j'ai utilisé la finition des maâlems avec des artisans de Marrakech, ville dont je suis originaire. J'ai constitué ainsi une collection de vêtements en noir, avec des motifs en or pour valoriser l'ensemble». Résultat : l'obtention d'un certificat de participation du continent. Au fait, comment Sana Redwani est arrivée à la mode? «Quand j'étais enfant, j'avais un parrain, Adolfo de Velasco, grand créateur de mode. C'était l'un des premiers à avoir représenté le Caftan marocain à l'étranger. Comme il m'a accompagné pendant toute mon enfance à Marrakech et qu'il était proche de ma famille, je me suis investi dans la mode un peu pour lui rendre hommage». Modeste, Sana n'en est pas moins ambitieuse : elle voudrait reprendre et relancer la ligne de haute-couture que son parrain possédait, c'est son objectif. Et sa définition de la mode ? «La mode, c'est une personnalisation. Tu donnes ta personnalité à ta tenue. Le même jeans peut être porté différemment par deux personnes». Maintenant, Sana est déjà en train de préparer le défilé de fin d'année du Collège Lasalle : en plus des tenues qu'elle a présentées en Chine, elle va présenter des vêtements pour enfants, histoire de se diversifier et de se tester : «Cette expérience en Chine, m'a donné du punch pour continuer et donner toujours le meilleur de moi-même» confie-t-elle avec simplicité. Il y a en effet peu de chance pour que Sana Redwani en reste là. Représentante du monde arabe et de l'Afrique en Chine, Sana n'en fait pas tout un plat, et c'est désormais elle-même qu'elle veut représenter, à travers ses collections et ses créations. Un «Au revoir» courtois et bref, Sana est déjà partie.