Football La crise est désormais bien installée dans le football national et c'est à tous les niveaux qu'elle est dramatiquement vécue par les différents acteurs. Plus grave, les appels au secours pathétiques adressés aux pouvoirs publics pour une aide et un soutien semblent perdus dans le silence. Un seul mot résume la situation du football marocain : catastrophe. Et cet état se retrouve partout et se répercute sur l'ensemble sans qu'aucune clairière d'espérance n'apparaisse à l'horizon. Au déficit incommensurable des infrastructures voilà que les dernières pluies ont rendu impraticables quelques terrains entraînant la fermeture de ces stades et donc condamnant les équipes qui les utilisaient à la transhumance (WAC, Raja, Chabab). Ce qui n'est pas sans affecter davantage des finances déjà fort insuffisantes. Tous les clubs sont en cessation de paiement de leurs joueurs et de leurs fournisseurs. Le Wac, par exemple, vient de faire l'objet d'une saisie de son car pour non règlement de son équipementier local (500.000 dh). Quant aux joueurs qui traînent des arriérés de prime, on les recense partout. Ce qui pousse certains à "émigrer" vers les pays du Golfe pour quelques piges avant de revenir pour retrouver la compétition nationale. Le championnat est devenu une sorte de gare routière avec des journées tronquées pour cause d'engagement de quelques clubs dans des épreuves de prestige à l'étranger. Et comme si ces aller-retour ne suffisaient pas, voilà que des sélections nationales s'en vont également répondre à des invitations, privant les équipes de leurs meilleurs éléments. Bref, c'est le vrai souk comme dans ces cars de voyageurs avec des gens assis et d'autres debout, en quête d'une place pendant le trajet entrecoupé de multiples arrêts. Comment dès lors peut-on ramener le public au stade quand le spectacle est des plus affligeants!… Le casse-tête de la Coupe arabe Le football marocain n'est même plus capable d'offrir une belle affiche. Ou même d'honorer une compétition de dimension internationale pourtant demandée et obtenue auprès d'une instance arabe et progammée au pays avec la bénédiction de la FRMF. Il est bien sûr question de la Champion's League Arabe devant regrouper 12 clubs du 17 janvier au 2 février 2003 à Fès et à Casablanca. On a déjà évoqué ce cas la semaine dernière pour tirer le signal d'alarme et au lieu de demander son report auprès de l'Union arabe de football, les co-organisateurs du Mas et du Wac n'ont rien fait sinon s'en remettre à la FRMF qui n'a fait que confirmer ce que nous avions écrit, soit l'inopérationnalité des complexes de Fès et Casablanca. Evidemment il restera la solution de rechange, faire disputer cette Champion's League dans des petits stades de fortune parfois sans éclairage alors que certaines rencontres sont prévues… en nocturne. Au-delà du problème infrastructurel les deux clubs marocains, faute de sponsors, sont incapables de subvenir aux frais de cette coupe arabe et donc d'honorer le cahier des charges afférent. Le Wac, par la voix de son président, a carrément demandé à la FRMF une subvention spéciale d'un million de dirhams, sinon de se dégager de cette grande fête. Lassée par ces tergiversations, l'UAF vient de décider de disputer cette épreuve à Jeddah. Autant dire que tout le football national est dans le pétrin et on ne voit pas d'où pourrait venir le miracle pour relancer la machine maintenant que tout un chacun sait que les différentes autorités gouvernementales n'avanceront pas un sou à ce sport. On en est d'autant plus convaincu dans les diverses sphères du ballon rond que le sport en général a été sciemment oublié et que depuis deux mois cette omission n'a pas été réparée. Ultime bouée de sauvetage pour le football, le possible retour du groupe Darmon mais avec un apport financier moindre en ces temps de disette. Les pontes du football national sont prêts à lui dérouler le tapis rouge et accepter toutes ses nouvelles conditions. Décalage Vaincre la misère L'avènement du sport dit d'élite ne s'est réellement imposé dans les pays émergents qu'avec le concours des collectivités locales et, depuis, c'est devenu une tradition ancrée dans les esprits des édiles de participer au financement des clubs représentatifs d'une ville, voire d'une région. Et le phénomène s'est accentué avec la décentralisation où chaque commune mobilise des crédits pour développer des politiques sportives. Des politiques certes inégales mais toutes au service de la pratique sportive car, en fin de compte, les politiques transversales des collectivités locales touchent à plusieurs domaines : éducation, citoyenneté, insertion sociale, loisirs, culture et sport… Si tout cela est un lieu commun dans bien des pays, tout reste à faire au Maroc malgré les divers discours ou déclarations d'aide et de soutien au sport par les pouvoirs publics. Un demi-siècle après son indépendance, le royaume en est toujours à financer le sport avec des subventions allouées aux fédérations par le département de tutelle, à peine revues à la hausse en certaines occasions spéciales. Le volet infrastructurel étant encore défaillant avec le déficit que tout un chacun connaît, on se gardera de limiter le débat au seul aspect financier de l'aide qui doit être apportée aux clubs et là, le constat est effrayant puique rien n'est fait au sein de leur circonscription aux clubs. Sans doute le temps est enfin venu de rappeler aux collectivités locales la "partition" qu'elles doivent jouer dans l'animation du sport et de leur contribution à son développement par le truchement des clubs, viviers de la jeunesse. La question a à maintes reprises été invoquée, surtout en temps de crise du sport national et à chaque fois, après tout un battage médiatique, les décideurs au niveau politique ne respectaient pas leurs engagements. Des accords de partenariat entre fédérations et collectivités locales sont demeurés sans lendemain, même supervisés au moment de leur conclusion par le tout-puissant ministre de l'Intérieur!… Qu'en sera-t-il une fois de plus en cette ère d'alternance-bis que vit le royaume ? Les premiers signes de renouveau ne sont guère à l'optimisme et l'encouragement avec l'oubli volontaire de la nomination d'un responsable de tutelle. La crainte est d'autant plus forte que l'omission se prolonge depuis la constiution du gouvernement voilà deux mois. Il est permis d'espérer qu'un jour on se souviendra de "l'oubli" et qu'on procédera enfin à la désignation d'un Haut commissaire au sport. Mais le plus important est de contraindre les collectivités locales à s'associer à la dynamique du développement du sport et donc à leurs prises en charge des clubs. Car il n'y a rien de plus pénible que d'assister aux incessants cris d'alarme et de désespoir des clubs manquant de tout et particulièrement de ressources financières stables. Ce sport de la misère a assez duré et ne saurait accompagner le saut qualitatif du royaume dans plusieurs domaines.