Si le programme nucléaire iranien préoccupe tellement les dirigeants des Etats-Unis et d'Israël, les problèmes du pouvoir au Pakistan devraient les rendre insomniaques. Le président pakistanais, Pervez Musharraf confronte, à l'heure actuelle, le plus grand défi, depuis qu'il a arraché le pouvoir à travers un coup d'Etat militaire en 1999. Cependant, alors que les armes nucléaires du Pakistan sont, d'après les rapports des services de renseignements occidentaux, sous contrôle «hermétique», les interrogations se posent déjà sur la persistance de cette situation en cas de dérapage. Ces mêmes rapports indiquent que les bombes nucléaires pakistanaises sont démantelées, les parties constituantes éloignées les unes des autres, mais contrôlées quand même par un seul service formé de l'élite de l'armée. D'autant que tout est supervisé directement par le président Musharraf. Néanmoins, la poursuite du défi, qui monte chaque jour d'un cran de la part de l'opposition politique, voire même religieuse, finira par contraindre Musharraf à réviser les scénariis possibles. Y aura-t-il un coup d'Etat militaire qui changera la donne ? Ou bien, verra-t-on l'arrivée au pouvoir d'une équipe extrémiste qui s'alliera aux groupes islamiques radicaux, pour acquérir à la fois la popularité et le soutien ? Ou alors, faut-il imaginer que les successeurs du savant nucléaire, Abdelkadir Khan, iront jusqu'à vendre la technologie nucléaire au plus offrant de par le monde ? Et, le plus dangereux seraient que ces nouveaux décideurs aient des relations avec Al-Qaïda qui tente depuis des années d'acquérir des armes de destruction massive. Une série de questions logiques qui demande des réponses rapides. Rappelons, que lorsque Musharraf est arrivé au pouvoir, les Etats-Unis étaient les premiers à le critiquer. Ils ont très peu traité avec lui. Leur comportement n'a changé qu'à partir des attentats du 11 septembre 2001 et du déclenchement de la guerre d'Afghanistan. Musharraf avait mis alors le paquet pour soutenir la campagne militaire de Washington. Depuis, les critiques ont cessé, et le président Pakistanais est devenu un allié essentiel et fiable dans la lutte contre le terrorisme et l'islamisme. Le mariage d'intérêts entre les deux parties existe et résiste contre vents et marées. Les Etats-Unis ont besoin de Pervez Musharraf, d'autant qu'il a lui-même besoin de leur soutien, notamment, après que le nombre de ses ennemis ait augmenté et commence à présenter un véritable danger pour son pouvoir qui, pour la première fois, est menacé. L'intérêt a incité l'administration Bush à octroyer au Pakistan de Musharraf des aides militaires en majorité, pour un montant de 10 milliards de $ depuis 2001. Les observateurs estiment que ces aides se poursuivront malgré les défis et les erreurs qui entachent l'image du régime. Le monde libre sait parfaitement que les Etats-Unis ont critiqué récemment les mesures de répression prises par Musharraf. Ce même monde est conscient que Bush aurait demandé à son allié pakistanais d'organiser les élections législatives et que ce dernier a annoncé qu'elles auraient lieu le 15 février prochain. Il semble qu'il n'y a pas de grandes divergences entre les positions des Américains et des Pakistanais sur le fond des problèmes, même s'il s'agit de la démocratie dans ce pays. De sources concordantes à Washington, on apprend que le président pakistanais aurait mis ses alliés américains au courant de ses intentions. Cela dit, le reste n'est qu'une mise en scène. Pour preuve, Washington insiste sur le processus démocratique et Musharraf écarte le haut tribunal présidé par son ennemi juré, le juge Iftikhar Chaudri, qui est assigné à résidence. Le bras de fer en cours, entre Musharraf et ses adversaires politiques ne fait que commencer. Reste à savoir maintenant, si les vainqueurs seront les politiques démocrates comme Benazir Bhutto, l'ex-Premier ministre et chef du Parti du peuple pakistanais (PPP) ou Nawaz Chérif, actuellement en exil en Arabie Saoudite, ou alors le général Ashfak Parvez Kiani, le chef adjoint de l'armée qui n'a pas dit encore son dernier mot ? En tout état de cause, le nucléaire pakistanais serait au cœur du changement qui, apparemment a été reporté à plusieurs reprises.