La cité nichée sur les rives de l'Oued Oum Rabii a fait l'objet de plusieurs chantiers de réhabilitation sans redonner à la ville son statut d'espace urbain où le patrimoine tient une place de choix. Malgré de nombreuses bonnes volontés, Azemmour souffre de négligence et de laisser-aller, alors que c'est là un joyau de l'histoire du pays. Azemmour est une ville d'Arts et d'artistes. Une cité qui aurait pu allier son historicité à son développement futur tant il est vrai que son cachet authentique demeure l'un des plus représentatifs d'une manière de vivre, une certaine approche de l'urbanisme et de l'architecture. Avec des villes comme Assilah, Chefchaouen et Larache, Azemmour aurait pu jouir du même intérêt pour lui restituer son lustre d'antan et une certaine aura qui en faisait à la fois un carrefour d'arts et une cité-comptoir dédiée au commerce et aux différents négoces. Le cachet de l'ancienne médina On ne peut se rendre compte de la beauté et du charme d'une telle ville sans déambuler dans les dédales de sa médina, très typique d'un certain regard sur la composition architecturale des places anciennes. Pour les spécialistes, qui ont visité la ville d'Azemmour, que ce soient les professeurs d'urbanisme de l'Ecole de Berne ou des étudiants en architecture de France, de Hollande ou des USA, Azemmour présente plusieurs spécificités : d'abord, la médina est tournée vers l'Oued et la mer. Un positionnement qui en fait, avec Larache, les deux villes marocaines à avoir fait de l'eau l'élément principal de la conception urbanistique. On comprend d'ailleurs l'intérêt des Suisses pour un tel paysage urbain du fait que de nombreuses villes suisses sont construites au bord de l'eau : «cette particularité d'une petite ville avec deux versants d'eau qui la délimitent est très intéressante», relève, un étudiant de l'école de Berne dont la thèse porte sur l'élément aqueux et son impact sur l'architecture. Avant de préciser que souvent les villes dites d'eau sont des villes de rivière ou de lac, mais une combinaison d'un océan et d'un fleuve «octroie un aspect plus fort quand la ville est mise en valeur». Mais Azemmour n'est pas une ville qui est mise en valeur. Une visite de deux jours dans l'enceinte de la médina révèle une insouciance criarde. Entre détritus amassés aux coins des rues, et la vétusté des maisons qui nécessitent des travaux d'urgence pour les restaurer, les Zemmouris assistent à l'étiolement d'une ville-symbole, d'une place forte chargée d'histoire et qui mérite que l'on s'y intéresse en tant que patrimoine national tant sur le plan historique que sur le plan urbain. Des projets pour le futur La ville n'est pas tout à fait oubliée, non plus. Aujourd'hui, avec la construction de maisons d'hôtes et l'installation de plusieurs artistes sur place, créateurs marocains ou étrangers, la médina retrouve un soupçon de vie. Cet engouement qui ne dure que depuis cinq ans agit comme un déclic puisque de nombreuses volontés sont aujourd'hui conscientes de ce que cette ville pourra incarner pour peu que l'on s'en charge immédiatement. Les travaux ont été identifiés par de nombreux architectes marocains qui ont été les premiers à attirer l'attention sur l'importance d'un travail de fond pour réhabiliter la ville d'Azemmour. Le dallage des ruelles pour éviter les flaques d'eau stagnantes qui génèrent des odeurs insupportables, des travaux de restaurations pour conserver les petites portes qui sont autant de voies d'entrées vers le centre de la cité, sans oublier l'aspect identitaire d'une ville à qui sied le blanc marié au bleu. Et dans ce sens, des tentatives ont vu le jour, et le visage de quelques ruelles a déjà bel et bien changé. La chaux, quelques peintures murales, des éclairages, un assainissement digne d'une grande ville, et Azemmour deviendra une place d'Arts et de cultures où les moussems comme celui de Moulay Abdellah et Moulay Bouchaib et Lalla Aicha L'bahriya retrouveront un écrin moderne pour y coucher l'héritage historique d'hier.