Le mardi 2 Octobre 2007, la Coalition mondiale contre la peine de mort et la Coalition marocaine contre la peine de mort ont organisé une conférence de presse à l'occasion de la Journée mondiale contre la peine de mort, à Rabat. Un point important pour revenir sur la problématique de la peine de mort au Mort entre le moratoire et l'abolition. Avec cette double réalité : nous avons un couloir de la mort dans la prison centrale de Kénitra, sans aucune exécution. Pourquoi maintenir cette loi dans le système pénal national puisqu'elle est déconnectée avec la réalité ? Et comment analyser la frilosité du gouvernement devant une décision institutionnelle qui pourrait offrir une meilleure image d'un Etat de droit ? Aujourd'hui, 131 pays ont aboli la peine de mort ou renoncé à son application. Les derniers à avoir sauté le pas sont le Libéria, la Côte d'Ivoire, le Mexique et le Gabon. À ce jour, aucun des 22 pays de la région du monde arabe n'a aboli la peine de mort. Le Maroc, la Tunisie et l'Algérie n'exécutent plus depuis au moins dix ans, mais condamnent toujours à la peine capitale. Retour sur la question avec les condamnés à mort eux-mêmes. 75pays dans le monde maintiennent encore la peine de mort. 12 pays du Moyen-Orient et d'Afrique du Nord continuent à prononcer des condamnations à mort et à procéder à des exécutions. Au Maroc, 133 condamnés à la peine capitale dont 9 femmes. Aucune exécution depuis 1993, pourtant le Maroc nuit à son image sur l'échiquier mondial en maintenant une loi obsolète du fait même qu'elle est sujette à un moratoire. Mais un moratoire n'est pas une abolition. Comme l'a souligné Michel Taube, l'une des figures les plus emblématiques de la lutte contre la peine de mort, qui pense qu'un retour à l'exécution est toujours possible. Il suffit d'une situation extrême pour ordonner une exécution. Moratoire universel Nous sommes face à un choix. Il faut abolir et tourner une page. Et c'est ce flou qui reste comme une épée de Damoclès. Un pas pourrait être franchi si la communauté internationale trouve un consensus pour un vote d'une résolution des Nations Unies en faveur d'un moratoire universel sur les exécutions dans le monde. Les mouvements abolitionnistes de la peine de mort se sont fixés cette ligne à dépasser en vue d'une réelle réflexion mondiale sur la peine capitale. Et c'est le thème de la journée mondiale contre la peine de mort, célébrée le 10 octobre : le moratoire universel. Est-ce possible ? Le Maroc entre déjà depuis 1993 dans cette case des états qui ont décidé du moratoire. Plus d'exécution, mais on prononce toujours des peines de mort. Dans le fond, selon plusieurs participants à cette conférence de Rbata, « c'est la même chose. Le moratoire n'est pas une abolition. C'est un pas en avant qui peut être un pas en arrière. Il suffit d'une décision pour que les exécutions reprennent ». Pourquoi pas?? Un autre cas Tabit ou des terroristes qui menacent la sécurité et la stabilité du pays ? C'est d'ailleurs dans ce sens que la Coalition mondiale contre la peine de mort et la Coalition marocaine contre la peine de mort ont organisé le 2 octobre dernier une conférence à Rabat pour faire le point sur les raisons qui expliquent le choix de ce thème. Une conférence marquée par l'espoir de voir le Maroc faire un pas de plus, un pas décisif pour faire partie des états qui ont rejeté la peine capitale. De ce fait, le Maroc pourrait être le seul pays arabe à s'affranchir d'une loi aussi cruelle que négationniste. De nombreuses personnalités qui oeuvrent pour que le gouvernement marocain tranche et prenne une position définitive, ont souligné les enjeux et les défis qui résultent d'une telle démarche. De Abderrahim Jamaï, président de l'Observatoire national des prisons, à Amina Bouayache, présidente de l'OMDH, en passant par des noms comme Abdelilah Benabdeslam, le coordinateur de la Coalition marocaine contre la peine de mort, Odile Sidem-Poulain, ancienne secrétaire générale de la Ligue internationale des droits de l'Homme ou Antoinette Chahine, ancienne condamnée à mort au Liban, des figures aussi éminentes ont débattu de la peine capitale au Maroc et dans le monde arabe avec un souci d'exactitude et surtout sans langue de bois en mettant les choses au clair. Les abolitionnistes arabes De ce débat, on a pu comprendre la situation des abolitionnistes arabes, tous confrontés au silence de plomb qui plane sur la question dans leurs pays. La tâche est ardue, mais un premier point serait un acquis de taille sur lequel les défenseurs du droit à la vie pourraient capitaliser. «Les pays arabes doivent se prononcer en faveur d'un moratoire universel sur les exécutions », souligne Antoinette Chahine. C'est là un appel qui va peser lors des votes pour une résolution sur un moratoire universel sur les exécutions. Vote qui sera soumis aux Etats membres de l'Organisation des Nations Unies au cours de la 62ème assemblée générale de l'ONU. Malgré un climat de confiance, beaucoup d'intervenants n'ont pas caché leurs craintes devant quelques refus. À ce niveau, il faut, comme l'a laissé entendre Odile Sidem-Poulain, prendre en compte les réalités politiques de chaque pays arabe. Il faut composer avec les climats qui règnent dans certaines régions où de telles décisions ne seront pas faciles à envisager. 5 millions de signatures Le chiffre est symbolique, certes, mais il a son poids. Ce ne sont pas les cinq millions de signatures attendues pour une pétition universelle qui vont faire changer d'avis à 6 milliards d'individus, tant le débat est culturel et social, plus que politique parfois, mais les abolitionnistes voient dans cette liste, une volonté mondiale pour créer une société internationale sans peine de mort. Le projet est ambitieux, mais très utopiste, compte tenu des réticences de nombreux pays avec à leur tête les USA et la Chine. Sans parler des pays arabes où les dernières condamnations à mort, prononcées entre 2006 et 2007, sont un déni de tous les efforts fournis depuis plus de dix ans pour préparer le terrain à la promulgation de nouvelles lois «plus humaines et plus en adéquation avec l'image d'un état de droits ». Au Maroc, selon plusieurs activistes présents lors de cette conférence de Rabat, les dernières condamnations à mort sont en déphasage avec les intentions exprimées par nombre de responsables marocains sur «l'imminence de l'abolition de la peine de mort». Que pourra changer ce chiffre par rapport à la situation dans le couloir de la mort de la prison centrale de Kénitra? Beaucoup de choses. D'abord, le moratoire reste une menace pour les premiers intéressés qui craignent le retour des exécutions. Ensuite, savoir de façon définitive que la peine capitale est abolie équivaut à des condamnations à perpétuité de facto. Celles-ci pourraient, dans l'ensemble, être commuées en réclusion à durée déterminée. Avec l'espoir d'une libération, même au bout de trente ans de réclusion criminelle. Ce qui n'est pas la même chose que d'être d'abord condamné à mort pour ensuite espérer une réduction de peine. L'équation n'est pas la même et pour s'en rendre pleinement compte, il faut parler aux principaux intéressés, c'est-à-dire les locataires du pavillon B du couloir de la mort.