Le Maroc a marqué des points. En présentant son plan d'autonomie à plusieurs capitales occidentales, les responsables marocains ont exprimé la volonté du royaume à faire quelques concessions et surtout que le projet d'autonomie rentre dans le cadre d'une vision nationale. Promesse tenue. Il y a tout juste un an, le Souverain avait entamé une dynamique concernant l'autonomie au Sahara. Depuis, beaucoup de choses ont évolué. Après plusieurs étapes, le Maroc a modelé une proposition intéressante qui a été présentée aux capitales occidentales. Le plan d'autonomie, soulevé par le royaume, est pour le moins qu'on puisse dire révolutionnaire à tous les niveaux. Avec beaucoup de pragmatisme, les responsables chargés du dossier ont fait un grand bond en avant. Tout d'abord, le Roi avait demandé aux partis de faire leurs propositions. Unanime, la classe politique avait plaidé pour une autonomie plus large. Même si certaines nuances ont été relevées. Mais sur le principe, il n'y avait pas de point de discorde. Dès lors, le Souverain a nommé le CORCAS qui devait se pencher sur l'application de cette autonomie sur le terrain. Après moult tractations, un projet est ficelé. Les points les plus importants laissent présager que le Maroc est prêt à résoudre définitivement ce conflit. De plus, il émane de la proposition marocaine, une maturité certaine. Certes, le Maroc aurait fait certaines concessions, mais le but est de répondre aux attentes de la communauté internationale et résoudre un problème qui perdure depuis plus de trente ans. C'est dans ce contexte qu'une délégation, dirigée par le ministre de l'Intérieur, Chakib Benmoussa, le ministre délégué à l'Intérieur, Fouad Ali El Hima, le ministre délégué aux affaires étrangères, Taïb Fassi Fihri et le directeur général de la DGED, Yassine Mansouri, a sillonné les capitales occidentales pour convaincre. Le Maroc propose une autonomie qui permettra au prochain gouvernement du Sahara de gérer tous les secteurs. Deux départements dépendront directement de Rabat : les Affaires étrangères et la Défense. En plus, le drapeau et la monnaie ne sont pas négociables, bien au contraire, les autorités marocaines sont intraitables à ce niveau. Cependant, la nouveauté est que la justice de la prochaine localité sera locale. En d'autres termes, les juges Sahraouis ne dépendront pas de Rabat, mais du gouvernement autonome. Un changement de taille, sachant que tous les jugements au Maroc sont prononcés au nom de Sa Majesté. Dans la même logique, les affaires islamiques seraient gérées par le gouvernement autonome. Les prêches du vendredi ne seraient plus contrôlées par le Ministère des Habous, mais les autorités locales auront la possibilité de développer des thèmes adaptés aux coutumes de la région. Une tournée qui exprime la volonté du Maroc à dépasser les clivages. Le pouvoir local aura toute la latitude à créer ses propres institutions notamment la police et les différents corps d'administration. Concernant la collecte des impôts, elle se fera localement et une partie sera versée à Rabat. Un point, très important, a été relevé par la proposition marocaine. Les richesses des provinces du Sud seront partagées équitablement. Il s'agit essentiellement des revenus de la pêche et des phosphates. Ce protocole sera appliqué aussi dans le cas où d'autres minerais seraient découverts. L'approche marocaine n'est pas uniquement régionale. Bien au contraire, elle rentre dans le cadre d'un projet national qui englobe une vision très large. Les infrastructures engagées et les réformes lancées préparent le Maroc à une régionalisation avec un Sahara autonome. Les officiels du royaume et le Roi veulent finaliser le projet d'autonomie avant de se pencher sur la régionalisation. A titre d'exemple, le Rif serait concerné par cette approche. Le développement humain et économique, étayé par les programmes d'investissement, devront préparer chaque région à soulever ce défit. Si la France, la Grande Bretagne, les Etats-Unis, l'Allemagne et la Russie ont répondu favorablement à la démarche marocaine, l'Espagne de Zapatero n'a pas encore soutenu ouvertement le Maroc. «Zapatero doit agir en prenant en compte l'opposition et surtout le Parti Populaire qui est viscéralement contre l'autonomie au Sahara. Même au sein du PSOE, certains demandent toujours l'organisation d'un référendum. En plus, le Premier ministre espagnol cherche d'abord l'intérêt de son pays. Et cet intérêt passe par des garanties sur Sebta et Melilia et surtout de bonnes relations avec l'Algérie, premier fournisseur de gaz de l'Espagne», soulève un journaliste espagnol. Par contre, les autres pays occidentaux ont agréablement reçu le message marocain. Les Etats-Unis en tête ont compris que le règlement de cette question est primordial dans leur guerre contre le terrorisme. La région du Sahel est manifestement un refuge pour les terroristes d'Al Qaïda. Le conflit du Sahara et la présence du Polisario dans le sud algérien sont deux facteurs qui ont permis à ces groupes de se développer dans cette région. Les dernières infiltrations d'armes et les attentats commis au Maghreb témoignent de la gravité de la situation. En réglant ce conflit, la région serait assainie. Une attitude que le gouvernement américain a bien compris. C'est dans ce contexte que des responsables sécuritaires marocains ont eu attache avec des responsables du Polisario. Brahim Ghali serait pour une négociation avec le Maroc et jugerait le plan d'autonomie très encourageant. Même Abdelaziz El Marrakchi, le président du Polisario, ne serait pas totalement contre. Mais le régime algérien veille à ce que toutes les tentatives d'apaisement n'aboutissent pas. Les généraux algériens mettent en avant Ould Bouhali pour faire pression sur Abdelaziz. Un jeu de pression qui permet aux Algériens de contrôler la direction du Polisario. La preuve, le défilé militaire qu'a organisé l'Algérie à Tifariti. Le but, créer une crise avec le Maroc alors qu'il s'apprête à présenter aux Nations Unies son plan d'autonomie en avril prochain. En ignorant les basses manœuvres algériennes, le Maroc a joué la carte de la sagesse.