Nabil Benabdallah, ministre de la Communication et porte-parole du gouvernement, revient sur le bilan de l'équipe Jettou et commente les prochaines échéances électorales. Benabdallah parle également de son parti et de l'ouverture du PPS sur les jeunes et une nouvelle élite. LGM : Les membres du bureau politique du PPS sont unanimes. Votre parti fera un score exceptionnel en 2007. Comment êtes-vous arrivé à cette conclusion ? Nabil Benabdallah : Je me base sur les potentialités du parti. Je me base sur les qualités de nos candidats. Nous sommes en train de mettre en avant des candidatures fortement concurrentielles à fort potentiel électoral. L'objectif est d'avoir le maximum de sièges, ce qui augmentera le nombre de voix obtenues par le PPS. Nous avons travaillé avec des couches récalcitrantes au niveau électoral, avec les jeunes, des élites sectorielles et les femmes. Cette approche et l'image de nos candidats me poussent à vous dire que nous serons parmi les cinq premiers partis après l'annonce des résultats des élections législatives de 2007. Vous êtes très optimiste ? Je suis raisonnablement optimiste. Je vous signale qu'en 2003, lors des élections communales, nous étions en 6ème position… Et lors des législatives de 2002 ? Nous avions raté le coche. Pourquoi ? Mauvais choix des candidats. Vous parlez de virement de cap au PPS. Pourtant vous avez ouvert vos portes à des gens du MP, l'Istiqlal, RNI… faites-vous dans la transhumance politique ? Nous ne sommes pas les seuls. Personne n'est en mesure de dire qu'il n'a pas reçu des politiques d'autres bords. Il n'y a pas un parti politique qui n'a pas ouvert, une fois, ses portes à n'importe qui. C'est déplorable, mais il faut le reconnaître. Malheureusement, ceux qui sont restés en dehors de ce processus, se sont retrouvés fortement marginalisés. C'est un combat politique qui se déroule avec des procédés qui ne sont pas les plus éthiques… Pourquoi le PPS l'a fait ? Si nous n'avions pas fait ce choix, nous allions nous retrouver sans groupe parlementaire au niveau des deux chambres. Et sans groupe parlementaire, vous n'avez aucune présence dans le champ politique marocain. Les plus grands partis l'ont fait. Nos deux partenaires de la Koutla ont accueilli des personnes qui étaient dans d'autres partis. C'est dommage que le PPS, qui a une image de parti progressiste, accepte cette donne, mais c'est la réalité politique. Lors de votre congrès, vous avez mis l'accent sur la nécessité de convaincre les jeunes de participer à la vie politique. Est ce une stratégie de sortie d'impasse ? Je crois que vous l'avez perçue. Nous voulons nous libérer de cette contrainte et aller chercher quelques députés pour avoir le nombre requis pour prétendre à un groupe parlementaire. Bien au contraire, nous voulons réussir les élections et être présents au niveau des deux chambres. Nous avons des candidats honnêtes, sérieux et travailleurs. Nous avons imprimé cette orientation avant même notre 7ème congrès. Nous voulons démontrer que le PPS est un parti qui se rajeuni et qui s'ouvre aux élites. D'ailleurs, la preuve est que 200 personnes ont rejoint le comité central qui compte aujourd'hui 468 membres. Sur les 200, plusieurs d'entre eux n'ont pas six mois de vie partisane. Pour réconcilier les jeunes avec la politique, il faut leur démontrer qu'ils n'ont pas besoin de 25 ans d'expérience pour rejoindre la direction du parti et avoir un poste de responsabilité. Votre expérience avec le PSD, est-elle un échec ? Je ne la perçois pas de cette manière. C'est une expérience positive. Il faut savoir que le PSD est une formation issue de l'OADP et il avait quitté cette formation parce qu'il y avait une divergence lors du vote sur la Constitution de 1996. À un moment précis de la vie politique marocaine, nous étions proches du PSD et nous avons travaillé ensemble. Dans le processus de rapprochement, il y a eu des divergences entre nous. Ils ont choisi de revenir à la matrice qui n'est autre que l'UNFP dont est issu l'USFP. Dans tous les cas, ils restent dans le giron de la gauche. On a l'impression que les partis de la Koutla sont d'accord sur un seul point. La réforme constitutionnelle. Lors du choix du code électoral, vous vous êtes déchirés… Non, nous avons divergé sur le code électoral, mais nous sommes d'accord sur plusieurs choses. Concernant la réforme constitutionnelle, au moment où il y aura un consensus autour de cette question avec l'aval de Sa Majesté, nous donnerons nos propositions. Nous avons la même vision au niveau économique et social. Nous sommes d'accord sur l'importance de la transparence de l'économie et la poursuite de l'assainissement de l'administration et l'introduction de règles de bonne conduite pour éviter les pratiques de corruption. Pour les trois partis de la Koutla, la priorité demeure la question sociale. Il ne faut pas occulter ces points… Sur le terrain, vous n'avez jamais pu être d'accord. Les exemples les plus frappants sont les élections législatives et communales… Au niveau du programme, nous sommes en accord. Concernant la loi électorale, nous avons divergé pour des questions partisanes. Finalement, le Conseil Constitutionnel a remis les pendules à l'heure. Ce qui est grave c'est que nous n'arrivons pas à décliner un message clair à l'opinion publique même si nous sommes sur la même longueur d'onde. Les partis de la Koutla et ceux de la majorité ont relevé le défi de l'alternance avec le gouvernement Youssoufi et celui de la relance économique et sociale avec le gouvernement Jettou. Notre bilan est bon. Les partis de la Koutla constituent l'ossature de cette expérience. Cela dit, il y a d'autres problèmes notamment, la pauvreté, la misère, la marginalisation. Mais, nous avions le potentiel pour réussir ce défi. Nous avons prouvé que nous étions meilleurs que ceux qui ont gouverné avant nous. Nous nous adressons à l'opinion publique en leur disant que nous sommes fiers de notre bilan et nous allons aux élections ensemble, même si nous ne sommes pas sur les mêmes listes. Nous allons nous retrouver ensemble au gouvernement ou à l'opposition. Vous êtes bien les seuls à le dire… Malheureusement, les partis de la Koutla rentrent dans des calculs politiques. Qui va avoir la Primature ? À mon sens, il faut d'abord gagner les élections et ensuite réfléchir ensemble. Dans ce pays, il y a des institutions et une Constitution qui précise que le Souverain choisit le Premier ministre. À partir de là, le gouvernement est constitué. Pour nous, la réforme constitutionnelle doit élargir les prérogatives du Premier ministre, sans pour autant toucher à l'article 19. Cet article constitue un facteur de stabilité et la garantie des libertés publiques. L'expérience Jettou ? C'est un Premier ministre connaisseur des questions politiques, économiques et sociales. À mes yeux, c'est un homme politique d'un grand talent et avec flair politique. Aujourd'hui, il est vrai qu'il serait intéressant d'allier la compétence à la couleur politique. Cela dit, les deux tiers de ce gouvernement sont issus des partis politiques. Il faut valoriser les partis politiques pour aider les gens qui veulent changer et démocratiser les formations politiques. À qui pensez-vous ? Aux jeunes générations qui cherchent à sortir de la tutelle des caciques… Le PPS rejette tout rapprochement avec le PJD … Absolument. Nous considérons qu'autour de Sa Majesté, il y a une œuvre de modernisation, de démocratisation et de réforme. C'est un projet progressiste. Le PJD est un parti fortement conservateur, lorsqu'il ne défend pas des points de vue réactionnaires. L'Istiqlal est un parti conservateur ? Sur toutes les questions que le gouvernement a présentées, l'Istiqlal a contribué massivement dans l'aboutissement de ces projets. Le code de la famille, l'IER, modernisation de l'économie…les militants de l'Istiqlal sont dans une vision progressiste, contrairement à ceux du PJD. Si le prochain gouvernement est formé avec le PJD… Le PPS n'y sera pas. L'opinion publique jugera tous nos partenaires qui changeront de cap et s'allieront avec le PJD.