Le caméléon, Jalal Talabani, l'actuel président de la République fédérale d'Irak, est resté en dehors du piège de la signature de la décision visant à exécuter l'ancien président, Saddam Hussein. «Mam» Jalal aurait ainsi voulu laisser ce dernier mourir «chiite» et non kurde. Ce, alors que toutes les régions du Kurdistan explosaient de joie à l'annonce de la pendaison de celui qui était considéré comme étant leur ennemi numéro 1 depuis la création de l'Etat irakien en 1921. Ce qui est désormais certain, c'est que les «Safaouïnes», purs produits du chiisme perse en Irak, paieront, tôt ou tard, le prix de leurs slogans prononcés lors de l'exécution de celui qui est devenu «Al-Chahid Al-Qaed». Ils n'ont laissé aux «ennemis» sunnites de Saddam Hussein-qui sont si nombreux en Irak-aucune chance de s'exprimer dorénavant. D'autant qu'il serait difficile pour eux de répondre présents à l'initiative prise par le premier ministre chiite, Nouri al-Maleki, qui est devenu, avec Abdel Aziz Tabatabaei (alias Al-Hakim) et Moktada al-Sadr, les ennemis privilégiés des sunnites. En tout état de cause, les historiens se pencheront après les tensions qui avaient accompagné l'exécution de l'ancien président irakien par ces chiites, sur l'analyse d'un fait marquant ; et, par là, répondre à la question suivante :est-ce que le régime de Saddam Hussein pouvait-il, en réalité, vivre plus que 25 ans, de 1968 à 2003, s'il avait adopté d'autres choix dans des étapes clés ? Il est prématuré de comprendre les tenants et les aboutissants des décisions prises par l'ancien chef de l'Etat d'Irak. La seule décision qu'il aurait dû éviter, c'était probablement l'invasion du Koweit ; et non celle d'attaquer l'Iran pour endiguer l'exportation de la révolution islamique de l'Imam Khomeïni. A l'époque, Saddam Hussein n'avait pas un autre choix. Surtout, lorsqu'on a appris plus tard que la situation interne était sur le point d'exploser dans les régions chiites s'il n'avait pas pris cette décision fatale. En déclarant la guerre aux Perses, il est apparu comme le sauveur de la nation arabe et le défenseur des intérêts de l'Occident dans la région. Le devoir de ces historiens, c'est de montrer tout cela, témoignages et documents à l'appui. Loin des réactions et des agitations qui avaient suivi son exécution le premier jour d'Al-Aïd d'Al-Adha, force est de souligner que Saddam Hussein était déjà mort politiquement depuis 1991. Alors qu'il était dans les années 70 le héros de la nationalisation du pétrole, champion de l'octroi de l'autodétermination aux kurdes, et le victorieux de la guerre d'Al- Qadissia/bis contre les iraniens. La disparition de Saddam Hussein devra sans aucun doute créer des changements sur le terrain en Irak. L'accélération soudaine de son exécution, coïncidant avec le report de l'annonce de la nouvelle stratégie qui sera adoptée par George Bush, veut dire qu'il y aura prochainement un nouveau départ. Ceux qui s'attendaient, notamment après la publication du rapport Baker/Hamilton à une marche arrière, allant jusqu'à la programmation d'un retrait graduel de l'Irak, ont été très surpris par l'adoption d'une stratégie basée sur une nouvelle offensive. De ce fait, il n'y a aucune contradiction entre l'accélération de l'exécution de Saddam Hussein, l'augmentation du nombre des soldats américains, et l'ouverture par le gouvernement irakien, des portes de l'armée devant les Bâasistes. Les Américains et les forces de coalition, en majorité chiites, qui sont au pouvoir, estiment que le principal obstacle qui complique leur tâche dans l'absorption de ces Bâasistes, réside dans la libération de ces derniers de leur leadership historique. Chose faite maintenant. Cela dit, les «nouveaux» Bâasistes vont désormais, tôt ou tard, rejoindre les négociations qui décideront de l'avenir de leur pays. Ceux qui ont pris la décision d'exécuter Saddam Hussein, sont parfaitement conscients qu'un tel acte rapprochera encore plus l'Irak d'une guerre civile ouverte. Cependant, ils ont pris ce risque. Car ils pensent, semble-t-il, que la meilleure voie à prendre pour éviter cette guerre, c'est de jouer au bout du gouffre. Dans cette foulée, les Américains deviennent des intermédiaires. Ce qu'ils ont démontré en faisant pression sur Al-Maleki et ses alliés chiites pour récupérer le cadavre de l'ancien président irakien et de le transporter jusqu'à sa ville natale d'Al-Aoujah. A Washington, on affirme qu'il n'est pas sûr que l'Irak d'après Saddam sera plus sanglant qu'avant sa disparition. Cette exécution pourrait probablement libérer définitivement les chiites de leur obsession permanente de vengeance et les sunnites, de supporter éternellement les méfaits d'un régime qui soi-disant défendait leurs intérêts. Reste à savoir maintenant comment les Etats-Unis feront pression sur leurs alliés chiites afin de prendre leurs distances envers Téhéran. Un bras de fer qui s'annonce assez complexe. L'administration Bush qui avait vendu Saddam à Al-Maleki, n'est apparemment pas prête à trop attendre le renvoi de l'ascenseur. Quoi qu'il en soit, il n'y a plus aucun espoir ni au présent ni au futur de sauver l'Irak des projets de vengeance qui se profilent à l'horizon.