Pour la première fois dans l'Histoire de l'Irak moderne, un Kurde accède à la magistrature suprême du pays. Ancien combattant, Jalal Talabani a été élu mercredi par l'Assemblée nationale transitoire comme président de la République. L'Assemblée nationale territoriale irakienne a élu, mercredi matin, le Kurde Jalal Talabani à la présidence de la République marquant une première dans l'Histoire de l'Irak moderne. Les députés irakiens ont également élu un sunnite, le président sortant Ghazi al-Yaouar, et un chiite, le ministre des Finances sortant, Adel Abdel Mahdi, vice-présidents. À noter qu'il n'y avait pas d'autres candidats pour ces postes. L'attribution de ces postes avait été négociée à l'avance entre les représentants des listes chiite et kurde et des politiciens sunnites. Les trois hommes ont obtenu les voix de 228 des 275 députés présents dans la salle, 29 ayant voté blanc. Ancien opposant, Jalal Talabani n'a pas caché son bonheur suite à son élection. « Ce qui était un rêve est en train de se réaliser, ces élections sont une bonne revanche sur la dictature », a-t-il avancé. Il a, par ailleurs, promis de faire ses premiers voyages officiels dans les pays victimes de l'Irak, en Iran et au Koweit. «Je vous promets de faire tout ce qui est en mon pouvoir pour mériter votre confiance», a déclaré le nouveau président à la Chambre des représentants. Il a aussi promis aux élus de la Chambre d'écouter leurs propositions et d'exécuter leurs décisions. Il a aussi juré de participer de toutes ses forces à l'établissement d'un régime démocratique, qui garantira les libertés et déracinera le terrorisme criminel et la corruption. «Notre peuple refuse de courber la tête, sauf devant Dieu, et nous demandons à tous de traiter l'Irak avec respect, de ne pas s'ingérer dans ses affaires intérieures et de ne pas aider les terroristes qui mènent une guerre d'extermination contre le peuple irakien», a ajouté Jalal Talabani. Il a, en revanche, appelé au dialogue les Irakiens qui portent des armes contre les forces étrangères. M.Talabani a qualifié de criminels ceux qui s'allient aux cellules d'Al-Qaïda. «Il y a une ligne séparant les terroristes liés à ceux de l'étranger et les Irakiens qui pensent que leurs opérations armées sont dans l'intérêt de l'Irak », a souligné le nouveau président. Né en 1934 à Koy Sanjak, dans une famille de lettrés kurdes, Jalal Talabani a fait des études de droit à Bagdad. Il a passé une grande partie de sa vie à lutter contre le pouvoir central de Bagdad. Son action militante s'est accélérée après la révolution de 1958 et le retour d'exil d'URSS du général Barzani. Membre du bureau politique du PDK en 1959, Jalal Talabani fait alors figure de «protégé» du général Barzani et de «jeune loup» radical, partisan de la lutte armée à outrance contre le régime du général Kassem. En 1964, Jalal Talabani rompt avec le général Barzani pour animer avec Ibrahim Ahmed (son beau-père) la révolte des «intellectuels» du PDK contre le général Barzani. Après l'accord sur l'autonomie kurde du 11 mars 1970 signé par Saddam Hussein et le général Barzani, Jelal Talabani est mis sur la touche. Il va s'exiler à Beyrouth et à Damas, où il noue d'étroites relations avec les dirigeants palestiniens. Jalal Talabani va ensuite revenir au-devant de la scène kurde irakienne suite aux accords d'Alger entre le Shah d'Iran et Saddam Hussein. Et en 1977, il fonde l'Union Patriotique du Kurdistan (UPK), dont il est le secrétaire général. La communauté Kurde représente entre 15 et 20 % de la population irakienne. Elle a été persécutée sous les différents régimes qu'a connu ce pays et notamment sous Saddam Hussein. Ce dernier avait massacré quelque 5.000 Kurdes en 1988. La liste kurde, de sa part, est arrivée en deuxième position aux élections générales du 30 janvier dernier. Elle compte 77 députés et figure derrière celle des chiites de l'Alliance unifiée irakienne, qui en compte 146.