Qui pouvait penser qu'un acte délibéré d'un simple citoyen marocain contre le roi fantoche Mohammed Ben Arafa, pouvait être le détonateur de la résistance armée des Marocains contre l'occupation et pour le retour de feu Mohammed V et l'indépendance nationale. ? Allal Ben Abdallah dont nous venons de célébrer le 11 septembre dernier le 53ème anniversaire de son acte martyr, était et reste encore, l'authentique symbole de la résistance armée contre le colonialisme. Pour le commun des Marocains, Allal Ben Abdallah était, et reste encore, l'authentique symbole de la résistance armée contre le colonialisme. Jusqu'à aujourd'hui, les Marocains, toutes catégories sociales et toutes couleurs politiques confondues, s'accordent à témoigner respect et considération pour ce personnage humble dont l'acte héroïque a été décisif dans la lutte pour le retour d'exil de Feu Mohammed V et dont le couronnement aura été la fin du protectorat et la proclamation de l'indépendance nationale. Un authentique fils du peuple Ne serait-ce que parce qu'il n'a jamais appartenu à un parti politique proprement dit ou à une quelconque organisation de résistance, qu'elle soit secrète ou agissant au grand jour. En second lieu, parce qu'il a su choisir le moment opportun pour accomplir son opération historique. Un 11 septembre 1953, soit 20 jours, jour pour jour, après l'exil de feu le Roi Mohammed V et sa famille vers l'Ile de Madagascar, dans l'océan indien, le 20 août de la même année. Il était à juste titre, le premier citoyen marocain qui déclara spontanément la guerre à l'administration coloniale et ses valets. L'histoire retiendra surtout que c'est l'acte martyr de Allal Ben Abdallah qui aura été le détonateur du mouvement de la résistance armée, avec la création partout à travers le pays, de branches armées, de cellules secrètes et de l'Armée de Libération nationale qui seront dés lors des interlocuteurs incontournables dans toute solution de ce qu'on appelait déjà en France : la "crise marocaine". Allal Ben Abdallah a aussi donné un bel exemple à tous ses compatriotes en administrant cette belle leçon de bravoure et de sacrifice, tant aux colons véreux, qu'au reste des Marocains encore hésitant sur la façon de lutter contre le fait accompli colonial. De Guersif au Quartier Akkari de Rabat Pour ceux qui ne le savent pas encore, le vrai nom de ce pionnier de la résistance nationale est Zerouali Allal Ben Abdallah. Il est natif de 1916 dans le village de Guersif, non loin de la ville de Taza et avait exactement 37 ans lorsqu'il avait accompli son acte. Issu d'une famille modeste, on garde de lui l'image d'un jeune ouvrier polyvalent, exerçant toutes sortes de métiers en vue de subvenir aux besoins de sa petite famille. De la région de Taza, il décide alors de s'installer à Rabat, au célèbre quartier populaire d'El Akkari où il résida durant de longues années. Un quartier connu pour avoir toujours été un fief de la résistance nationale naissante et où résidait également une importante communauté algérienne et de nombreux Marocains ayant servi dans les rangs du FLN algérien. Il etait très connu pour sa droiture et son esprit sociable. Pour l'amour sincère qu'il a toujours voué a sa patrie et son Roi. Il s'illustra de très belle manière lorsqu'il était l'un des premiers commerçants de la "joutia" d' El Akkari à organiser regulièrement dés l'aube des années quarante, les festivités de célébration de la fête du Trône. Après Fès et Rabat-Salé, la célébration de la Fête du Trône s'étendra à toutes les régions du Maroc. Histoire de signifier à l'occupant que le protectorat français ne pouvait en aucun cas se substituer au Sultan légitime. Même s'il restait discret sur ses véritables intentions tout ou long des années 1952 et 1953 qui virent feu le Roi Mohammed V engager un bras de fer avec l'administration coloniale, Allal Ben Abdallah avait réussi à conquérir les cœurs de nombreux compatriotes. Certes, il n'était pas suffisamment lettré pour accéder à la presse de l'époque et pour adhérer à une quelconque structure politique. Mais il était un authentique marocain. Nationaliste et pieux, il était fier d'être originaire de cette région de Taza, terre des vaillants cavaliers et combattants, qui avaient donné une belle leçon de nationalisme aux forces coloniales espagnoles et françaises notamment lors de l'épopée de la guerre du Rif déclenchée pour l'Emir Mohamed Abdelkrim Khattabi. La résistance armée Mieux encore, il n'avait consulté ni informé personne sur ses intentions. C'est en effet au soir du 10 septembre 1953, alors qu'il se trouvait chez lui, après avoir entendu parler de la première prière du vendredi du nouveau Sultan fantoche Mohammed Ben Arafa dans l'enceinte du Mechouar à Rabat, qu'il décide de passer à l'acte. Il prit alors sa voiture, une Ford de couleur grise et se rendit aux alentours du palais Royal dans le cercle de Touarga. A 12 heures 40 mn précises et alors que le cortège de Ben Arafa se dirigeait vers la mosquée "ahl Fès" dans l'enceinte du Palais Royal, il se lança à l'assaut de Ben Arafa. Il payera de sa vie cet acte héroïque dont l'effet immédiat, aura été de réveiller la conscience des Marocains et de convaincre la classe politique, que la seule alternative efficace qui leur restait, était la lutte armée. Un citoyen comme les autres Ceux qui l'ont connu, en particulier ceux appartenant aux professions libérales ou issus de milieux les plus défavorisés : ouvriers, petits commerçants, voisins de palier et jeunes du quartier Akkari, se rappellent encore qu' "il ne supportait plus de partager son temps entre le travail et la maison. Il était décidé à accomplir un grand acte armé, traduisant la colère du peuple marocain et sa désapprobation devant le fait de remplacer le Roi légitime par un sultan à la solde du colonialisme". Il donnait ainsi le coup d'envoi de la résistance armée qui dura prés de deux années avec la création de l'Armée de libération nationale, tant dans les zones d'occupation française qu'espagnole et dont la résultante a été, l'engagement de milliers de Marocains dans la résistance et l'ouverture des longues et laborieuses négociations d'Aix -les Bains, puis le retour triomphal de feu Mohammed V en novembre 1955 et la proclamation officielle de l'Indépendance du Maroc en Mars 1956. Ce qui distingua le plus Allal Ben Abdallah des autres grands noms de la résistance, est le fait qu'il n'appartenait a aucun parti politique. Même si le Sultan Ben Arafa est sorti indemne de cette opération, l'histoire retiendra que Allal Ben Abdallah a accompli le premier acte de sacrifice pour le retour du Roi Mohammed V et pour l'indépendance du Maroc. Un acte qui ne tardera pas à faire tâche d'huile. Traduit de l'arabe par Omar El Anouari