Les maux du secteur du textile Malgré les efforts déployés par ses opérateurs depuis des années pour maintenir le cap, le textile marocain est rongé par beaucoup de maux. La lenteur des réformes et l'inexistence d'une stratégie claire pour le secteur le condamnent à l'anarchie. Les entreprises marocaines du textile ont résisté jusqu'à maintenant, tant bien que mal, contre vents et marées. Parmi les principales difficultés auxquelles font face les opérateurs du secteur depuis des années, la montée en puissance des industries du textile de pays comme la Tunisie ou la Chine, la perte de la compétitivité, la rareté des financements alloués au secteur, la perte rapide des marchés étrangers, le déficit patent en compétences humaines qualifiées, le vieillissement des équipements de production et l'inexistence d'une stratégie nationale spécifique au secteur. Les entreprises qui réussissent aujourd'hui à rentabiliser leurs activités sont celles qui répondent à une demande spécifique. Elles disposent pour cela de ressources humaines très qualifiées et sont à la pointe des dernières technologies. Aussi, sont-elles parvenues à créer leurs propres marques. Un pari et une stratégie gagnante que plusieurs entreprises du secteur n'ont jamais pu entreprendre ni mettre en oeuvre. Mais, ces entreprises qui réussissent aujourd'hui ne représentent que la moitié du secteur. L'autre moitié rencontre actuellement des difficultés énormes. Certaines d'entre elles préfèrent même se convertir dans l'informel. C'est dire qu'il y a urgence à mettre en place des mécanismes pour restructurer ce secteur stratégique de l'économie marocaine. Il y a urgence puisqu'il faut se préparer à l'ouverture totale de l'économie marocaine. Pour gagner ce pari de l'ouverture à l'horizon 2010, il faut qu'il y ait une stratégie qui concerne toutes les entités du secteur. Les opérateurs doivent miser sur le professionnalisme du personnel, sur la technologie, sur la créativité et sur les stratégies de commercialisation gagnantes. Certaines entreprises du secteur, disposant de moyens financiers importants et entretenant des relations d'excellence avec des groupes étrangers, sont mieux outillées pour hisser leur compétitivité au rang des entreprises des pays concurrents directs du Maroc, comme la Chine, la Tunisie, la Malaisie et l'Egypte. D'autres, aux moyens financiers limités et produisant essentiellement pour le marché marocain, attendent depuis toujours que les pouvoirs publics les soutiennent financièrement - par le jeu des incitations fiscales, par l'adoption de stratégies nationales de promotion commerciale et par la diversification des moyens de financement - et techniquement - par la mise en place de structures publiques de conseil et de programmes de transfert technologique - dans leur combat pour l'avenir. Si, il y a quelques années, quand le discours sur la mise à niveau du secteur était à la mode, les experts et les industriels s'accordaient sur la nécessité de former le personnel des sociétés de textile, d'équiper les structures de moyens de production sophistiqués, de promouvoir les produits de textile marocains sur les marchés étrangers, de faciliter l'accès des entreprises à des moyens de financements suffisants, on se rend compte aujourd'hui que, pratiquement, rien n'a été fait pour atteindre ces objectifs. A titre d'exemple, il a fallu trois longues années aux dirigeants de l'AMITH (Association marocaine des industries du textile et de l'habillement) pour amener l'Etat à accepter une partie des doléances des opérateurs du secteur et signer ainsi l'accord-cadre sur le textile ! Combien d'années faudra-t-il encore attendre pour voir l'application des dispositions qu'il apporte et palper les premières retombées sur le secteur ? Peut-être des dizaines d'années ! En attendant, la “flexibilité” aidant, les opérateurs du secteur taillent dans le vif de leurs effectifs. Ils sont obligés, avancent-ils, de licencier des travailleurs faute de commandes suffisantes. Ceci leur permet de réaliser des économies importantes. Les salaires sont aussi gelés depuis des années et la création de nouveaux emplois se fait au compte-gouttes lorsqu'il y a des commandes importantes nécessitant une main-d'oeuvre supplémentaire... non qualifiée.