Le tiers-monde qui vient claquer sa gamelle vide sur la table de l'Occident repu, cela rappelle Nikita Khroutchev, ancien président du conseil des ministres de l'ex-URSS, qui frappe avec sa chaussure le pupitre de l'ONU. C'était au début des années 60. Déjà le tiers-monde se manifestait. Si celui-ci existe encore, malheureusement, en revanche le non-alignement n'a plus de signification. Il faut rappeler que le tiers-monde est composé de nombreux pays musulmans, et que le Vatican est aussi une puissance financière, donc politique. D'un autre côté, si on se place du point de vue de la «rue arabo-musulmane», comme les Occidentaux l'appellent avec une pointe de mépris –qu'elle réagisse ou non- les guerres menées en terres musulmanes le sont par des armées chrétiennes venues de pays industrialisés. C'est évidemment simpliste, même si d'un côté il y a le Conseil de sécurité plus l'Allemagne et de l'autre l'OTAN moins la Turquie. «La rue» ne comprend pas que c'est un combat pour la démocratie. Elle caricature et ne voit que les troupes de l'OTAN qui font la guerre en Afghanistan. En Irak où la démocratie progresse chaque jour et les soldats qui l'imposent sont en partie atlantiques. Le sud du Liban est occupé par l'OTAN. Il y a bien quelques Asiatiques, car le safran rend la cuisine meilleure. Le hasard ne fait pas toujours son travail de hasard. La confrontation des civilisations n'existe que dans l'esprit des fanatiques. Au Liban, la guerre a été remplacée par une guéguerre pour le leadership en Europe. Le triangle classique. La France, l'Allemagne et l'Italie. Mais pourquoi diable les chars français ont-ils défilé dans Beyrouth pour se rendre au sud du fleuve Lytani où ils doivent officier ? Etait-il opportun de rappeler que le Liban est une création française, au risque d'indisposer les voisins ? On ne sait pas si les tankistes chantaient «le temps béni des colonies» de Michel Sardou. Il est probable que la ministre française de la Défense qui a visité ses troupes en tenue militaire s'est souvenue du mot de Jean Cocteau : «Vendre la peau de l'ours oblige à le tuer». Décidément les présidentielles de 2007 en déboussolent plus d'un. Dans ce trio, il y a un pays qui tire habilement son épingle du jeu. C'est l'Allemagne qui semble parcourue par un frisson revanchard. Grâce à la résolution 1701 de l'ONU, 3.500 soldats allemands et leurs navires vont patrouiller dans les eaux libanaises, contrairement à la constitution allemande. Non seulement l'Allemagne est libérée mais lavée de son passé puisqu'elle protège l'entité sioniste. Curieux tout de même. Pie XII couvre de son silence le génocide juif durant la 2e Guerre mondiale alors que le compatriote d'Angela Merkel, Benoît XVI, s'intéresse à l'Islam. Elle peut désormais revendiquer le port polonais de Gdansk et le rebaptiser Dantzig. A quand l'arme nucléaire ? Faut-il rappeler que le parti néo-nazi (NPD), xénophobe et anti-sémite, est représenté dans trois parlements allemands. Ne parlons pas des Etats-Unis qui sont gouvernés par des intégristes et un président aux pulsions fascisantes. Dans les pays occidentaux, l'extrême droite redresse la tête. En Italie, le fasciste Fini, du Nord, est réconforté par la dernière «sortie» papale. En Belgique, un commando d'extrême droite qui projetait des attentats a été arrêté, il y a peu. En Hollande… Arrêtons l'énumération. C'est simplement pour dire que les explications fournies par le Vatican constituent une confirmation en guise de démenti. Un pape ne fait pas son «mea culpa» ou ne bat pas sa coulpe. Autant lui demander de se confesser en public. Le passé fascine même l'Asie. Le Japon demande la révision de sa constitution pour mettre sur pied une armée classique. Il se sent menacé par la Corée du Nord affamée mais disposant, paraît-il, de l'arme nucléaire. C'est pour quand la sienne ? Le Japon a aussi des revendications territoriales. Les îles Kouriles sont toujours occupées par la Russie. Le pape ayant reçu des menaces, les gardes suisses vont peut-être troquer leurs hallebardes contre des missiles. La jeunesse hitlérienne de Sa Sainteté -comme le rappelle l'écrivain allemand Gunther Grass- n'est pas en cause. L'auteur des «Années de chiens» rappelle dans son dernier livre que Joseph Raitzinger ambitionnait déjà à l'époque de devenir prêtre. «Le sabre et le goupillon» chantait Jean Ferrat. Il faut malgré tout affirmer que si l'intervention du pape est scandaleuse, les incendies d'églises le sont tout autant. Allons, il ne faut pas se plaindre. Walker Bush a encore deux ans devant lui et les troupes étrangères au Liban ne repartiront pas demain. Il peut prendre au président américain la fantaisie de bombarder une usine iranienne. Cela fera un beau feu d'artifice que les troupes «de l'ONU» au Liban applaudiront à tout rompre.