Un verre, ça va. Deux verres… Bonjour les dégâts. Connaissez-vous les seuils à ne pas dépasser, les idées reçues à éliminer et les effets de l'excès d'alcool sur la santé psychique ? Lisez. Vous le savez, l'alcool n'est pas un produit ordinaire. Certes, prendre l'apéritif entre amis ou boire un verre après le travail sont des gestes sociaux courants, mais tout le problème est de savoir quand s'arrêter. La plupart du temps, l'abus d'alcool est associé à l'ivresse ou à la dépendance. Pourtant, l'alcool devient problématique avant l'ivresse, car l'alcool devient dangereux même si on n'en ressent pas les effets, même si on n'est pas ivre ou dépendant. Rappelons les seuils d'une consommation modérée : pour l'homme, elle est de 3 verres d'alcool par jour maximum (soit 36 g d'alcool pur), chez la femme, de 2 verres (24 g d'alcool pur). Et, est-il besoin de le rappeler, consommation zéro pour les femmes enceintes et les enfants. Petits verres, grandes vérités Bien des idées fausses circulent au sujet de l'alcool, en particulier celle que l'alcool «donne des forces». Faux. Certes, l'alcool éthylique, ou éthanol, apporte 7 calories par g d'alcool lorsqu'il est métabolisé dans le foie, mais sa transformation produit aussi de l'acide lactique qui gêne le travail musculaire. De plus, ces calories sont dépourvues de pouvoir énergétique, car elles ne fournissent ni sels minéraux, ni protéines, ni vitamines. Comme la consommation d'alcool tend également à diminuer l'appétit, ce phénomène explique en partie pourquoi les grands buveurs présentent des carences en vitamines, qui peuvent déterminer des troubles cérébraux ou neurologiques. Par ailleurs, si la consommation d'alcool peut avoir initialement un effet stimulant chez certaines personnes en leur donnant un sentiment d'euphorie, lorsque la quantité d'alcool devient plus importante, elle provoque au contraire une somnolence car l'alcool agit sur le système nerveux. Dans le pire des cas, elle peut provoquer un coma. Les effets sur la sexualité n'existent pas plus. Au contraire, des travaux ont montré que pour de faibles doses d'alcool, les performances masculines sont diminuées. Tout au plus, l'alcool provoque-t-il une certaine désinhibition en modifiant les centres de contrôle cérébraux des émotions ! Cela ne sert pas non plus à grand chose de boire de l'alcool dans l'idée de se réchauffer. Certes, l'ingestion d'une boisson alcoolisée procure une sensation de chaleur en dilatant les vaisseaux sanguins présents sous la peau. Mais la chaleur produite s'échappe immédiatement de l'organisme par les pores de la peau. A terme, la température corporelle est donc diminuée (d'un demi-degré pour 50 g d'alcool absorbé) et les personnes ayant beaucoup bu risquent l'hypothermie, parfois mortelle. La consommation d'alcool ne désaltère pas non plus. Elle tend même à induire une déshydratation, car l'alcool possède un effet diurétique. Cette perte d'eau pourrait être à l'origine de la sensation si désagréable de «gueule de bois», qui ne réclame d'autre traitement que le repos, la consommation d'eau ou de jus de fruits en abondance et de l'aspirine. Enfin, sachez que si vous avez abusé de la bouteille, la consommation d'un café ne pourra guère vous aider à vous dégriser, car celui-ci ne modifie pas le taux d'alcool dans le sang (alcoolémie). Diluer l'alcool dans de l'eau avant de le boire n'arrangera pas plus votre affaire. Pour éliminer les effets de l'alcool, une seule chose est efficace : le temps. Dépression et boisson Statistiquement, les hommes sont moins dépressifs que les femmes. Mais il suffit de dépasser les statistiques pour découvrir qu'en fait, l'éthanol qui passe directement dans le sang altère la santé physique (cancers, affections digestives, maladies cardio-vasculaires...) et perturbe l'équilibre psychique. L'alcool peut, en effet, révéler ou aggraver une dépression, et l'alcoolique patent est toujours dépressif. D'ailleurs les premiers signes de la dépression - les insomnies, la fatigue, l'irritabilité, le désintérêt général - sont ceux de l'alcoolisation. Caractérisée par une perte d'énergie, d'intérêt, un ralentissement psychomoteur, un sentiment de dévalorisation, une difficulté de concentration, une indécision plus grande, des pensées morbides, la dépression se situe aux antipodes de la virilité ! L'idéal masculin se définit en effet par la force, l'action, la puissance, la maîtrise, le pouvoir. Il est illustré à merveille par l'image de l'homme des cigarettes Malboro : un homme dur, solitaire parce qu'il n'a besoin de personne, impassible, viril à souhait. Un homme que l'on imagine mal déprimé, se bourrant d'anxiolytiques et s'allongeant sur le divan de son psy et abusant de la bouteille pour noyer son chagrin. Parce que la dépression est également, faut-il le préciser, masculine. Mais les hommes ont plus tendance à la cacher, car le fait de soigner un coup de blues ou d'oublier ses soucis en buvant un ou deux verres n'écorne pas son image... bien au contraire, ça reste très viril ! Certes cette représentation masculine est un archétype mais il n'en reste pas moins que les hommes ont plus de difficultés à parler d'eux-mêmes, à analyser leurs états d'âmes et à communiquer. Les psychologues ont pendant longtemps distingué deux types de réponses au stress : la lutte ou la fuite, jusqu'à ce que des études plus focalisées sur les femmes révèlent un troisième type d'attitude. Face à un problème ou à une situation difficile, celles-ci se recentrent sur leur famille et vont chercher auprès de leurs amies, de leurs soeurs le soutien nécessaire. Ce qui explique peut-être qu'elles sont plus nombreuses à se faire aider quand ça va mal. Attribut masculin par excellence, l'alcool a une fonction d'intégration. La première beuverie s'apparente souvent à une sorte de rite d'initiation signant le passage du monde de l'enfance à celui des hommes adultes. Quand les doses restent modérées, l'alcool peut jouer à plein son rôle de lubrifiant social mais dès qu'elles augmentent, les problèmes apparaissent. Et les hommes sont les premiers concernés : 14 % des décès masculins contre 3 % chez les femmes sont liés à l'alcool. L'écueil à éviter est de soigner la dépression sans prendre en compte le problème d'alcool. D'une part les antidépresseurs associés à l'alcool s'avèrent catastrophiques et d'autre part une psychothérapie sans sevrage pourra durer des années sans résultat. Ce n'est pas parce que l'alcoolique aura compris les raisons qui l'ont poussé à boire qu'il ne touchera plus à un verre. La priorité est d'arrêter de boire, puis de chercher à comprendre le pourquoi...