Le discours du Roi Mohammed VI à l'occasion des 20 ans de l'accession au trône lance un appel à un changement profond du modèle de développement marocain et inscrit les lignes directrices de l'avenir. Analyse du discours royal avec Amine Laghidi, vice-président du Conseil africain des mines et de l'Energie et Président des Pôles Logistique et du Commerce International de l'Union Africaine des PME. Posant les jalons d'une nouvelle vision, une nouvelle stratégie de développement marocaine faite pour tous les citoyens et qui tourne autour du citoyen, le discours du Roi à l'occasion de ses vingt ans de règne, a dressé un constat réel de la vie des Marocains et ouvert la voie à une restructuration, une nouvelle étape, du développement du pays, en tenant compte des acquis mais aussi des disparités, notamment sociales que le Royaume cherchera à supprimer au cours des prochaines années. Après des initiatives très fructueuses et d'autres qui n'ont pas rencontré le succès escompté durant ces deux dernières décennies, aujourd'hui l'heure est à la prise de nouvelles décisions stratégiques pour le Royaume, dénote le discours royal. Cela, tout en consolidant les acquis et en perpétuant l'attachement aux fondamentaux de la nation, notamment l'intégrité territoriale, la confiance dans le processus onusien, la priorité donnée au continent africain, la préservation des relations avec l'Europe et une ouverture sur le monde, mais aussi, une nouvelle main tendue vers les voisins, à leur tête l'Algérie. La symbolique du discours royal « Dans ce discours, 20 minutes, 20 ans, je ne crois pas beaucoup à un hasard mais il y a toujours une symbolique qui est présente», indique Amine Laghidi, membre du board du l'Institut de recherche Global Economic Institute et membre de l'ASMEX, l'association marocaine des exportateurs. Revenant sur la symbolique des mots utilisés par le souverain, notre interlocuteur affirme que le mot « Amana » utilisé au début du discours, a une double portée, matérielle et immatérielle. «Immatérielle parce que c'est une valeur religieuse et culturelle, et en même temps c'est tout une institution qu'il y avait à l'époque de l'+amine+, donc ça dénote un sens de la responsabilité ». Mais il y a aussi la «monarchie patriotique et citoyenne». Quand le Roi Mohammed VI en parle, « il faut lire entre les lignes. Elle est responsable, c'est une partie intégrante de ce pays. Ce qui est positif la rend heureuse, ce qui ne l'est pas la rend triste ». Le Roi a par ailleurs insisté sur l'inclusion parlant de « tous » les Marocains dans son discours, avec cette nouveauté de s'adresser aussi à la classe moyenne, le véritable poumon économique et social du pays. Une classe intermédiaire qui se retrouve actuellement obligée de porter le fardeau des pauvres et de supporter les riches qui continuent de s'enrichir. Pour l'expert, le discours royal est « urbi et orbi, il s'adresse aux Marocains en priorité, à toutes les tranches de la population marocaine, il parle avec le cœur mais il parle aussi avec la raison et c'est le style du Roi, il est humain. Il est très sensible à la détresse et à la joie humaine et est honnête dans son leadership ». Enfin, le discours du souverain revêt une autre symbolique, la réitération de l'attachement aux intérêts suprêmes du Royaume et aux causes nationales. « Les intérêts du Maroc priment sur +tout+ », fait remarquer Amine Laghdidi. Une nouvelle phase de développement « All inclusive » « Sa majesté a annoncé une nouvelle phase du développement de notre pays qui s'inscrit dans la continuité et dans une approche inclusive », déclare Amine Laghidi avant d'ajouter que le règne du Roi Mohammed VI a toujours été dans cette logique inclusive avec toutes les composantes de la société, commençant avec le statut de la femme, avec l'Instance équité et réconciliation, l'INDH pour les couches les plus défavorisées, et plus récemment avec tout ce qui en rapport avec le rural. Le nouveau modèle prôné par le souverain, sera confié à une commission d'experts nationaux de divers secteurs et divers courants, et sera suivi par la nomination de nouveaux profils au niveau du gouvernement, de l'administration. Il intervient dans le cadre d'un constat actuel amer, la classe moyenne est en difficulté. En ce sens, notre interlocuteur déclare qu'en effet « la classe moyenne aujourd'hui se sent défavorisée par rapport à un ratio entre la contribution fiscale et ce qu'elle reçoit en termes de services sociaux », et c'est dans cette logique que le discours du Roi parle de réformes dans plusieurs secteurs, à l'instar de la santé, de l'enseignement mais aussi la fiscalité. Concernant la nouvelle phase de la vision du souverain, Amine Laghidi estime qu'elle sera encore plus inclusive, où il sera question d'« un modèle de développement où la prospérité et le bien-être économique » devraient être assurés pour toutes les composantes de la société marocaine. Notant que «l'inclusion et la sensibilité aux besoins du citoyen, une certaine forme d'indépendance et d'originalité dans la pensée» sont caractériels du règne du Roi Mohammed VI qui, « les transforme d'une manière pragmatique sur le terrain », l'expert ajoute que l'utilisation du mot « tous » quand il s'agit du bien-être social et économique, est très significatif. « Ces quatre lettres veulent tout dire », estime-t-il. Pour lui, c'est un rejet du modèle où il y a des disparités sociales, et l'ouverture sur un modèle qui serait comme une sorte de « locomotive où chaque wagon fait avancer l'autre ». « Mais comme tout le monde veut que le train avance il faut aussi que tout le monde se transforme en cheminot, que tout le monde fasse partie de ce modèle », explique-t-il avec philosophie.