Le Maroc et l'Union européenne (UE) ont lancé, jeudi à Bruxelles, une nouvelle étape statutaire de leur relation stratégique, multidimensionnelle et privilégiée, baptisée «Partenariat euro-marocain de prospérité partagée». Dans une «Déclaration politique conjointe» adoptée à l'issue de la 14 ème session du Conseil d'Association Maroc-UE, les deux parties affirment leur ambition de donner à «leur relation stratégique, multidimensionnelle et privilégiée une nouvelle impulsion qui soit à la hauteur de leur attentes et des enjeux du monde contemporain en développant un véritable Partenariat euro-marocain de prospérité partagée». Un tel partenariat aura pour objectif «d'approfondir davantage les relations bilatérales à la lumière des ambitions communes et des évolutions propres à chacune des parties, mais aussi de renforcer la coopération régionale et euro-africaine et de soutenir un multilatéralisme efficace», lit-on dans la déclaration. Cette nouvelle étape de relations maroco-européennes capitalise, en effet, sur les acquis «considérables» que le Maroc et l'UE, forts d'un partenariat d'égal à égal, construit depuis un demi-siècle, ont pu accumuler au service de leurs intérêts mutuels, expliquent les deux partenaires dans cette Déclaration politique conjointe. Constatant qu'à la communauté objective d'intérêts créée par la géographie et l'histoire s'est ajoutée une communauté choisie de valeurs partagées, les deux parties qui, de simples voisins, sont devenus de véritables partenaires porteurs d'une vision convergente de l'avenir de la Méditerranée et au-delà, se disent conscients que leur environnement régional et global est «l'objet de défis de plus en plus complexes mais aussi d'opportunités nouvelles qui détermineront le devenir de l'espace euro-africain et euro-méditerranéen, notamment le développement économique et humain, inclusif et équitable, l'innovation et le partage des connaissances, la protection de l'environnement et le développement durable, la justice, le dialogue-interculturel, la mobilité et la migration, les droits de l'homme et la bonne gouvernance». Parmi les piliers de cet espace régional, souligne la déclaration, le partenariat UE-Maroc est «plus que jamais nécessaire comme réponse à pareils enjeux», d'autant plus que «la stabilité politique et les réformes multiples menées par le Maroc en font un des partenaires clé de l'Union européenne dans la région» et «la convergence de vues sur de nombreux sujets permet de plus en plus à l'Union européenne et au Maroc d'articuler ensemble des réponses appropriées, en cohérence avec l'Agenda 2030 et les objectifs de développement durable». Nouveau cadre de relations global et résilient Les deux parties entendent dans ce sens «tirer pleinement les enseignements de leur coopération passée, capitaliser sur les acquis de leur relation et approfondir davantage leur partenariat pour renforcer son efficience et son efficacité en tenant compte des possibilités ouvertes par le Statut avancé de 2008 et de son potentiel » en faisant le meilleur usage de « la flexibilité offerte par la Politique Européenne de Voisinage». Forts leur expérience commune, le Maroc et l'UE s'engagent à préserver le partenariat les unissant, à consolider sa résilience et sa stabilité ainsi qu'à assurer sa continuité face à d'éventuelles difficultés, notamment à travers une concertation précoce, une coordination renforcée et le recours aux structures de travail prévues par le partenariat, souligne la Déclaration politique conjointe. Dans cet objectif, explique le document, les deux partenaires s'emploieront à définir un nouveau cadre de relations global et résilient. Concrètement, ils entendent s'appuyer sur les principes ayant toujours guidé leur partenariat (solidarité, respect mutuel, transparence, clarté, différenciation) et les orientations devant structurer leur relation pour les prochaines années. Ainsi, sur le plan bilatéral, le «Partenariat euro-marocain de prospérité partagée» s'articulera autour de quatre espaces structurants, à savoir «un Espace de convergence des Valeurs», «un Espace de convergence Economique et de Cohésion sociale », « un Espace de Connaissances Partagées» et «un Espace de concertation politique et de coopération accrue en matière de sécurité», en plus de deux axes fondamentaux à caractère horizontal qui feront aussi l'objet d'actions opérationnelles spécifiques, à savoir une coopération en matière d'environnement et de lutte contre le changement climatique et une coopération en matière de mobilité et de migration, qui se renforceront mutuellement. Dans les détails, l'«Espace de convergence des Valeurs», inspiré de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, de la Constitution marocaine et des engagements internationaux des deux partenaires, aura pour objectif de renforcer un rapprochement autour des principes fondateurs et directeurs du partenariat. Responsabilité et transparence des institutions Ces principes sont ceux de la démocratie, l'Etat de droit, la bonne gouvernance, la justice, l'efficacité, responsabilité et transparence des institutions, les Droits de l'Homme et les libertés fondamentales, notamment la liberté de réunion, la liberté d'expression, y compris la presse, et les droits des femmes et des jeunes, l'égalité hommes-femmes, la lutte contre le discours de la haine, l'intolérance, la stigmatisation et la discrimination ainsi que la protection et l'échange de données à caractère personnel et le droit à la vie privée. L'«Espace de convergence économique et de cohésion sociale» s'articulera, quant à lui, notamment autour de la mise en œuvre du volet économique de l'Accord d'association. Ceci implique une utilisation améliorée du potentiel offert par la relation commerciale bilatérale, la relance des négociations vers un Accord de Libre-Echange Complet et Approfondi (ALECA) sur la base des bénéfices attendus pour les deux partenaires, la poursuite de manière graduelle de la convergence réglementaire, une coopération bilatérale étroite en matière de douane, de bonne gouvernance fiscale, la protection des données à caractère personnel et une connectivité renforcée des infrastructures physiques et numériques. S'agissant de l' «Espace de Connaissances Partagées», il mettra notamment en valeur l'enseignement supérieur, la formation (notamment la formation professionnelle), l'emploi durable, la recherche scientifique, l'innovation et les transferts technologiques, la mobilité des étudiants et des chercheurs. Développement de l'économie de la connaissance et de l'innovation L'action veillera dans ce cadre à mobiliser tous les instruments et mécanismes disponibles et à venir (Erasmus+, PRIMA, Horizon 2020, Horizon Europe…). Ces domaines sont considérés comme autant de priorités de coopération pour le développement de l'économie de la connaissance et de l'innovation. Enfin, l'Espace de concertation politique et de Coopération accrue en matière de Sécurité, devrait, tant sur les plans bilatéral, régional et international, permettre de renforcer le dialogue stratégique, la concertation politique et la coopération opérationnelle sur les défis communs en matière de sécurité intérieure. Au nombre de ceux-ci figurent notamment la lutte contre les réseaux de criminalité organisée, le terrorisme et notamment son financement, la radicalisation violente et le retour des combattants étrangers, le trafic illicite de drogues et d'armes, ainsi que la coopération policière, la formation des forces de sécurité, la coopération judiciaire, le tout dans le respect du droit international, y compris des droits de l'homme et de l'Etat de droit. «Fidèle à la tradition pionnière des relations euro-marocaines, ce type de Partenariat de prospérité partagée se veut un exemple dynamique susceptible d'être utilisé par les partenaires qui partagent le même niveau d'ambition», assurent le Maroc et l'UE dans leur Déclaration politique conjointe, convaincus que ce partenariat marque «une étape importante dans le rapprochement euro-méditerranéen, indispensable pour relever les défis communs actuels et à venir».