Plusieurs ophtalmologues de France ont adressé une lettre au président de la République, Emmanuel Macron, afin de l'alarmer sur la gravité de l'utilisation des lanceurs de balles de défense (LBD), dit « flash ball » par les manifestants, pour la gravité des blessures oculaires qu'ils causent. Les 35 ophtalmologues à l'origine du courrier, publié par le JDD dans la journée du 10 mars, demandent au président une suspension de l'utilisation du LBD durant les manifestations. En effet, plusieurs manifestants ont perdu leurs yeux suite à des impacts directs des balles en plastiques tirées par le LBD. Dans ce sens, il est à noter que Laurent Nuñez, secrétaire d'Etat à l'Intérieur, a indiqué dans la journée du 7 mars, que 13.095 tirs de LBD ont été enregistrés durant les différentes manifestations. De plus 2200 blessés dans les rangs des Gilets jaunes ont été répertoriés, rajoutant que 83 enquêtes sont en cours afin de sanctionner les dépassements résultant de l'utilisation de ce système. En effet, il est généralement utilisé durant les manifestations sur des distances de moins de dix mètres, ce qui rend la vélocité des balles très importantes, ce qui résulte dans de graves blessures, surtout si les balles en caoutchoucs atteignent la région de la tête. Selon Eliane Assassi, présidente du groupe communiste au Sénat (CRCE), « L'impact d'une balle en caoutchouc à moins de dix mètres revient à recevoir un parpaing de 20 kg lancé à un mètre ». Rajoutant que « 206 blessures à la tête dont plusieurs dizaines liées à des tirs de LBD, dont 22 personnes éborgnées par ces tirs ». Ci-joint le contenu de la lettre adressée par les ophtalmologues à Emmanuel Macron : « Paris, le 6 février 2019 Monsieur le Président de la République, Le nombre inédit de contusions oculaires graves par lanceurs de balles de défense conduisant à la perte de la vision a légitimement ému un grand nombre de citoyens et d'Associations, et nous concerne particulièrement en tant qu'ophtalmologues. Ces contusions entrainent des lésions souvent au-dessus de toute ressource thérapeutique. Les blessures oculaires par balles de golf, une activité récréative bien différente des manifestations publiques, sont rares, mais bien connues des ophtalmologues pour leur sévérité, conduisant dans la majorité des cas à la perte de la vision et dans un tiers des cas à l'énucléation. La raison en est bien connue également : ces balles mesurent 40 mm de diamètre et lorsqu'elles arrivent sur le visage avec une grande force de propulsion s'encastrent dans l'orbite, toute l'énergie cinétique étant transmise au globe oculaire. Les balles de LBD mesurent également 40 mm de diamètre, leur énergie cinétique est considérable puisqu'elle est encore de 220 joules à 40 m, bien supérieure à celle d'une balle de golf. Les blessures oculaires survenues ces dernières semaines ne sont pas dues au hasard ou à l'inexpérience. Le grand nombre de balles tirées avec une force cinétique conservée à longue distance et l'imprécision inhérente à cette arme devaient nécessairement entrainer un grand nombre de mutilations. Une telle "épidémie" de blessures oculaires gravissimes ne s'est jamais rencontrée. Nous, ophtalmologues dont la profession est de prévenir et guérir les pathologies oculaires demandons instamment un moratoire dans l'utilisation de ces armes invalidantes au cours des actions de maintien de l'ordre. Notre démarche est uniquement celle de médecins, purement humaniste, avec pour seul but d'éviter d'autres mutilations. Nous vous prions d'agréer, Monsieur le Président de la République, l'expression de notre très haute considération. Pr Alain Gaudric, Université Paris Diderot Pr Bahram Bodaghi, Sorbonne Université Pr José-Alain Sahel, Sorbonne Université Pr Karine Angioï-Duprez , Université de Lorraine Pr Isabelle Audo, Sorbonne Université Pr Carl Arndt, Université de Reims Pr Stéphanie Baillif, Université de Nice-Côte d'Azur Pr Francine Behar-Cohen, Université Paris Descartes Pr Jean-Paul Berrod, Université de Lorraine Pr Vincent Borderie, Sorbonne Université Pr Jean-Louis Bourges, Université Paris Descartes Pr Nathalie Cassoux, Université Paris Descartes Pr Béatrice Cochener, Université de Bretagne-Ouest Pr Isabelle Cochereau, Université Paris Diderot Pr Catherine Creuzot-Garcher, Université de Bourgogne Pr Vincent Daïen, Université de Montpellier Pr Bernard Delbosc, Université de Franche-Comté Pr Marie Noëlle Delyfer, Université de Bordeaux Dr Marie-Hélène Errera, Sorbonne Université Pr David Gaucher, Université de Strasbourg Pr Jean-François Korobelnik, Université de Bordeaux Pr Jean-Marc Legeais, Université Paris Descartes Pr Marc Muraine, Université de Rouen-Normandie Dr Isabelle Meunier, Université de Montpellier Dr Sadek Mohand-Said, Sorbonne Université Pr Michel Paques, Sorbonne Université Pr Pierre-Jean Pisella, Université de Tours Pr Jean-Claude Quintyn, Université de Caen Pr Claude Speeg-Schatz, Université de Strasbourg Pr Ramin Tadayoni, Université Paris Diderot Pr Valérie Touitou, Sorbonne Université Pr Max Villain, Université de Montpellier Pr Michel Weber, Université de Nantes Deux praticiens ont récemment approuvé la lettre : Dr Aude Couturier, Université Paris Diderot Pr Frédéric Moriaux, Université de Rennes 1 ».