Une équipe internationale de chercheurs a récemment mis au jour des preuves archéologiques de l'utilisation médicinale la plus ancienne connue des plantes dans la grotte des Pigeons à Taforalt, datant de quelque 15.000 ans. Cette découverte, annoncée par l'Institut National des Sciences de l'Archéologie et du Patrimoine (INSAP), révèle que des fruits de l'espèce végétale Ephedra ont été trouvés dans une zone de la grotte spécifiquement dédiée aux inhumations rituelles, un usage commun aux groupes humains de l'âge de pierre, entre 22 000 et 7 000 ans avant notre ère. Dans un communiqué adressé à Hespress FR, l'INSAP précise que Ephedra est reconnue pour ses vertus médicinales, notamment dans l'arrêt des hémorragies et le soulagement des douleurs. D'ailleurs, lors de précédentes fouilles dans cette même grotte de Taforalt, des archéologues ont découvert un crâne humain portant les marques d'une trépanation, une opération chirurgicale risquée, datée de 15 000 ans et considérée comme la plus ancienne au monde. Le crâne montre des signes de cicatrisation, témoignant de la survie du patient et suggérant que des plantes comme Ephedra ont pu aider à apaiser les effets post-opératoires. L'INSAP souligne également que ces populations de l'âge de pierre pratiquaient l'avulsion dentaire, consistant à arracher les incisives des garçons et des filles dans un rituel marquant le passage à l'âge adulte. Une telle intervention, particulièrement douloureuse, aurait vraisemblablement aussi impliqué l'usage de plantes pour soulager la souffrance. Cette découverte est le fruit de la collaboration de nombreux chercheurs, parmi lesquels Ismail Ziani, doctorant à l'Université de Las Palmas et lauréat de l'INSAP, Abdeljalil Bouzouggar, directeur de l'INSAP et responsable des fouilles à Taforalt, Louise Humphrey du Museum d'Histoire Naturelle de Londres, Nicholas Barton de l'Université d'Oxford, Jacob Morales de l'Université de Las Palmas et Hassan Talbi de l'Université Mohammed 1er à Oujda. L'INSAP note aussi que la plus ancienne trace d'Ephedra dans un contexte archéologique remontait auparavant à 40 000 ans, trouvée dans une sépulture néandertalienne. Cependant, il ne s'agissait que de pollens probablement transportés par le vent. En revanche, les fruits calcinés découverts dans la grotte des Pigeons témoignent d'une véritable utilisation intentionnelle, ce qui en fait l'exemple le plus ancien d'usage médicinal de plantes. Bien que l'on n'exclut pas une fonction rituelle liée aux inhumations, cette trouvaille confirme que les habitants de Taforalt possédaient des connaissances sophistiquées sur les propriétés médicinales des plantes, bien avant l'apparition du Néolithique, environ 8 000 ans plus tard. Les recherches à Taforalt s'inscrivent dans un programme de coopération entre plusieurs institutions internationales, incluant l'INSAP (Maroc), l'Université Mohammed 1er (Maroc), l'Université d'Oxford (Royaume-Uni), le Natural History Museum (Royaume-Uni), l'Institut Max Planck pour l'archéogénétique (Allemagne), ainsi que le Centre des Recherches Archéologiques de Monrepos en Allemagne, impliquant des doctorants et chercheurs de divers horizons.