Le 1er novembre 2024 a marqué un tournant significatif dans la profession d'avocat au Maroc, un jour triste et sombre où nos robes noires, symboles de justice et de défense des droits, restent accrochées dans nos cabinets. Dans les tribunaux du Royaume, un silence pesant règne, laissant un vide qui témoigne de notre détermination à faire face à cette situation législative préoccupante. Suite à une décision historique prise par l'Association des Barreaux du Maroc, l'ensemble des 17 ordres des avocats ont adhéré à ce mouvement. Les avocats ont suspendu l'ensemble de leurs activités professionnelles jusqu'à nouvel ordre. Ce mouvement inédit est le reflet d'une profonde insatisfaction face à l'absence de dialogue productif avec le ministère de la justice, et témoigne d'une inquiétude grandissante pour l'intégrité de notre système judiciaire et pour les valeurs que nous défendons ardemment. Aujourd'hui, il est essentiel de savoir que la suspension de nos activités ne se limite pas à une simple action pour défendre nos intérêts en tant qu'avocats, mais vise avant tout à protéger les droits fondamentaux des citoyens. L'avocat, par son essence même en tant que défenseur des droits, porte en lui un message humanitaire noble, incarné dans la protection des valeurs d'équité. L'avocat se bat pour établir les principes de justice, en réaction à un ensemble de reculs inquiétants introduits par le projet de loi relatif à la procédure civile. En effet, ledit projet est au cœur de cette crise. Nous le jugeons inconstitutionnel et néfaste, car il menace gravement l'indépendance judiciaire et la qualité de la défense. Ce texte, en limitant les droits des justiciables, constitue un recul préoccupant en matière de justice impartiale, remettant en cause les fondements sur lesquels repose notre système judiciaire et ne respectant pas les principes établis par la Constitution de 2011 et les conventions internationales ratifiées par le Maroc. Il met en péril la sécurité et la stabilité judiciaires, le droit d'accès à la justice, crée une discrimination entre les justiciables et porte atteinte aux principes d'un procès équitable. Notre décision de suspendre nos activités est donc un acte de résistance face à cette atteinte inacceptable aux droits des citoyens. Ce que nous vivons actuellement découle en grande partie du refus du ministre de la justice d'engager toute discussion constructive pour surmonter cette crise législative. Ce manque de dialogue empêche l'émergence de solutions adaptées et renforce notre détermination à nous opposer à des réformes qui menacent l'équité de notre système judiciaire. À cet égard, nous nous inquiétons tout particulièrement des multiples implications de ce projet de loi sur l'accès à la justice. Ce dernier semble principalement avantager les citoyens aisés, laissant de côté les plus vulnérables qui risquent d'être privés de la possibilité d'ester en justice. Un véritable système judiciaire doit garantir l'égalité de tous devant la loi, indépendamment de la situation socio-économique des individus. Il est inacceptable qu'un projet discriminatoire crée une barrière à la justice, ce qui va à l'encontre du principe fondamental de l'égalité des droits. De ce fait, les avocats ne peuvent pas rester silencieux face à une telle dérive, d'où ce mouvement de protestation aussi fort. Nous revendiquons un dialogue respectueux pour sauvegarder non seulement l'intégrité de notre profession, mais aussi les droits des justiciables. L'absence de notre robe noire aujourd'hui est un cri de ralliement, un appel à l'action pour défendre les droits des justiciables. Ensemble, faisons entendre notre voix pour un Maroc meilleur, avec un arsenal juridique qui respecte véritablement les droits des citoyens, garantissant ainsi un accès juste et équitable à la justice.