L'Union marocaine du travail (UMT) vient de faire part, dans une note adressée au Conseil économique, social et environnemental (CESE), de vives critiques à l'égard du projet de loi organique sur la grève. Exposée lors d'un atelier organisé jeudi, la position de l'UMT est marquée par une forte désapprobation du texte qu'elle considère comme « le plus restrictif jamais élaboré » depuis la première version présentée en octobre 2001. La principale critique de l'UMT réside dans le fait que le projet de loi, élaboré par le gouvernement précédent sans consultation adéquate des centrales syndicales, vise à réglementer de manière rigide et à criminaliser l'exercice du droit de grève. En préambule de sa note, l'UMT affirme que ce projet de loi est le plus restrictif sur l'exercice du droit de grève jamais élaboré par les gouvernements successifs. Selon la centrale syndicale, la loi a été conçue par le gouvernement précédent sans une véritable consultation des partenaires sociaux et dans un contexte d'exclusion des centrales syndicales. L'UMT considère que cette démarche visait principalement à encadrer strictement et à criminaliser le droit de grève, réduisant ainsi l'espace de liberté des travailleurs. Une application déformée des disposition de la Constitution Le premier point de critique majeur concerne l'application déformée des principes constitutionnels. L'UMT dénonce une déviation significative des garanties constitutionnelles pour l'exercice du droit de grève. Selon le syndicat, le projet de loi ne garantit pas adéquatement ce droit et favorise, au contraire, des mesures qui visent à entraver les grèves. Ce constat est renforcé par l'analyse du texte qui semble accorder une grande importance à la prévention des grèves plutôt qu'à leur régulation équitable. L'UMT critique également la définition restrictive de la grève proposée par le projet de loi. Selon le syndicat, cette définition exclut de nombreuses formes de grève ainsi que diverses catégories de travailleurs, ce qui réduit considérablement la portée du droit de grève. Cette approche est perçue comme une tentative de perpétuer certaines dispositions légales existantes, telles que l'article 288 du code pénal, qui sanctionne sévèrement les actions syndicales avec des peines d'emprisonnement et des amendes. Cette disposition est jugée par l'UMT comme un obstacle majeur à l'exercice libre du droit de grève, notamment en ce qu'elle pénalise toute forme de manifestation concertée des travailleurs visant à obtenir des améliorations des conditions de travail. Un projet de loi qui vide le droit de grève de son contenu Un autre point de discorde est l'obligation imposée aux syndicats de négocier les revendications, de recourir à la médiation et à la conciliation avant d'annoncer ou de préparer une grève. L'UMT considère que ces exigences ajoutent des obstacles supplémentaires et complexifient le processus de grève, en vidant le droit de grève de son contenu réel. De plus, la loi prévoit un délai de préavis de grève particulièrement long, ce qui, selon le syndicat, est une tentative de neutraliser l'efficacité des actions revendicatives en retardant indûment la mise en œuvre des grèves. Le projet de loi propose également des mesures controversées telles que la légalisation des retenues sur les salaires des grévistes. Cette disposition est critiquée par l'UMT car elle considère la grève comme une simple suspension temporaire du travail, ignorant le fait que certaines grèves sont nécessaires pour faire respecter des droits du travail fondamentaux. Cette approche, selon l'UMT, ne prend pas en compte la légitimité des revendications portées par les grévistes. De plus, l'UMT rejette la définition étendue de l'entrave à la liberté du travail contenue dans le projet de loi. La note du syndicat souligne que cette définition large, combinée avec le maintien de l'article 288 du code pénal, incrimine et sanctionne sévèrement l'organisation des grèves et la participation des travailleurs. Ce cadre juridique est perçu comme une entrave importante à l'exercice du droit de grève, en instaurant un climat de peur et de répression autour des actions syndicales. Enfin, le projet de loi est critiqué pour sa tentative de limiter les formes de grèves et d'empêcher les campements des grévistes, jugés comme une occupation illégale des lieux de travail. Le syndicat s'oppose également à la possibilité donnée au Chef du gouvernement de suspendre ou d'interdire les grèves pendant des périodes déterminées, ce qui, selon l'UMT, revient à une entrave directe à l'exercice de ce droit.