L'analyse du marché du travail continue de focaliser les réflexions. Dans le sillage de la publication par le Conseil Economique Social et Environnemental (CESE) d'un avis sur la situation des jeunes NEET (ni en emploi, ni en éducation, ni en formation) au Maroc, auquel le chef du gouvernement n'a pas tardé à opposer des réserves et faire grief de son timing, concomitant avec la présentation du bilan à mi-parcours du gouvernement, le Haut-Commissariat au Plan (HCP) a publié ce mercredi un éclairage sur cette catégorie, sur la base de l'enquête nationale sur l'emploi, réalisée en 2022. Au Maroc, indique le HCP, les jeunes âgés de 15 à 24 ans constituent un groupe important, représentant environ 39% de la population âgée de moins de 25 ans. Ce potentiel démographique recèle un dynamisme et une créativité précieux pour le développement du pays. Cependant, l'accès à l'emploi et à l'inclusion sociale reste un défi majeur pour cette jeunesse. L'échec scolaire, le chômage, la pauvreté et l'exclusion sociale figurent parmi les obstacles auxquels ils font face. Parmi les jeunes les plus vulnérables, les NEET attirent une attention particulière. Ce groupe, qui constitue 25,2% des jeunes âgés de 15 à 24 ans, présente une forte corrélation avec le chômage de longue durée. Un aperçu préoccupant Plus de 25 % des jeunes marocains âgés de 15 à 24 ans se trouvent dans une situation de NEET soit 1,5 million de jeunes, ce qui représente un contingent substantiel de la population juvénile. Cette proportion significative souligne l'importance de comprendre les motifs sous-jacents et les dynamiques sociales qui contribuent à cette désaffiliation des activités éducatives, professionnelles et formatives. Une analyse plus approfondie des données révèle une distinction notable entre les jeunes NEET au chômage et ceux inactifs. En effet, souligne le HCP dans son éclairage, plus d'un quart des jeunes NEET (27,6%) sont au chômage, tandis que les trois quarts (72,4%) restants sont inactifs, ne manifestant pas d'intérêt actif pour l'insertion professionnelle. Cette distinction entre les deux catégories soulève des interrogations sur les politiques de promotion de l'emploi et de l'activité économique, ainsi que sur les dispositifs d'accompagnement des jeunes vers l'emploi et la formation. Par ailleurs, ajoute le Haut-commissariat, une analyse différenciée selon le genre met en lumière des disparités significatives. Les jeunes femmes sont disproportionnellement touchées par la « NEETitude » , avec un taux atteignant 37,3% chez cette population, comparativement à 13,5% chez les hommes. Cette disparité de genre dans l'accès à l'éducation et au marché du travail soulève des questions essentielles sur l'égalité des chances et l'accès aux opportunités socio-économiques pour les jeunes femmes au Maroc. En outre, une analyse géographique révèle des variations régionales dans la répartition des jeunes NEET. Bien que la prévalence soit plus marquée en milieu urbain (51,4% des jeunes NEET sont en milieu urbain), certaines régions telles que Béni Mellal-Khénifra (30,6%) et l'Oriental (28,1%) affichent des taux de NEET supérieurs à la moyenne nationale (25,2%). Cette hétérogénéité géographique souligne l'importance de prendre en compte les spécificités régionales dans la conception des politiques visant à réduire la « NEETitude » chez les jeunes. Enfin, l'analyse du profil socio-économique des chefs de ménage des jeunes NEET révèle des tendances significatives. Enfin, l'analyse du profil socio-économique des chefs de ménage des jeunes NEET révèle des tendances significatives. 85% vivent dans des ménages dirigés par un homme et 87% des chefs de ménage ne possèdent aucun diplôme soulignant l'importance des facteurs familiaux et socio- économiques dans la détermination du statut des jeunes sur le marché du travail et dans le système éducatif. Facteurs influençant la probabilité d'être NEET au Maroc L'analyse descriptive du HCP révèle l'importance significative de divers facteurs, notamment l'éducation, le statut matrimonial, la situation familiale, la région de résidence et le statut d'emploi du chef de ménage, dans la détermination du statut NEET. L'importance du niveau d'éducation : Le niveau d'éducation se révèle être un facteur déterminant du statut NEET. Les jeunes qui n'ont pas achevé leur cursus scolaire encourent un risque nettement plus élevé d'être NEET. En effet, le risque est 15 fois plus élevé pour ceux dont le niveau d'éducation n'excède pas le primaire par rapport à ceux ayant un niveau d'études supérieur. Cependant, ce risque est considérablement réduit pour les jeunes ayant atteint le niveau secondaire collégial/qualifiant. L'impact de la situation matrimoniale et du genre : L'analyse logistique met en évidence l'importance de la situation matrimoniale dans la détermination du statut NEET. Les jeunes mariés présentent 5,4 fois plus de risques d'être NEET que les jeunes non mariés, soulignant ainsi l'effet des obligations familiales et des normes sociales sur le statut NEET, particulièrement pour les femmes mariées. L'âge et la transition vers le marché du travail : l'âge constitue un autre facteur significatif dans la probabilité d'être NEET. Les résultats démontrent que les jeunes âgés de 20 à 24 ans ont une probabilité plus élevée d'être NEET que ceux âgés de 15 à 19 ans, ce qui peut s'expliquer par la période de transition critique vers le marché du travail que traversent les jeunes de cette tranche d'âge. En conséquence, des interventions ciblées et des programmes d'insertion adaptés sont nécessaires pour soutenir ces individus pendant cette phase cruciale de leur vie. L'éducation du chef de ménage : Les résultats confirment l'impact du niveau d'éducation du chef de ménage sur le statut NEET des jeunes. Ceux vivant dans un ménage où le chef n'a aucun diplôme ont deux fois plus de risques d'être NEET que ceux vivant avec un chef de ménage titulaire d'un diplôme supérieur, soulignant ainsi l'importance du contexte familial et socio-économique dans les trajectoires des jeunes. L'impact du statut d'activité du chef de ménage : La présence d'un chef de ménage actif occupé réduit significativement le risque d'être NEET pour les jeunes. En effet, les jeunes vivant avec un chef de ménage actif ont 17,7% de chances en moins d'être NEET par rapport à ceux vivant avec un chef de ménage inactif, mettant en évidence l'importance du modèle familial et du soutien socio-économique dans la réussite des jeunes. Disparités géographiques et développement économique : L'analyse révèle l'existence de disparités géographiques importantes dans le risque d'être NEET. Les jeunes résidant dans certaines régions, telles que Béni-Mellal-Khénifra, Fès-Meknès et l'Oriental, ont une probabilité significativement plus élevée d'être NEET par rapport à ceux vivant dans d'autres régions, comme Tanger- Tétouan-Al Hoceima. Quelles conclusions ? L'examen réalisé dans le cadre de cette étude a permis d'identifier plusieurs déterminants clés du statut NEET parmi les jeunes, souligne le HCP. Les résultats mettent en exergue l'influence prépondérante du niveau d'éducation, de l'état matrimonial, de l'âge, du genre, du niveau d'éducation du chef de ménage et de la géographie sur la probabilité de se retrouver NEET. Le niveau d'éducation se révèle être un élément critique influençant la probabilité de devenir NEET. Les individus disposant d'un niveau d'éducation inférieur présentent un risque substantiellement accru d'être NEET. En contraste, ceux ayant atteint des niveaux d'éducation plus élevés présentent des risques amoindris , témoignant ainsi du rôle fondamental de l'éducation dans l'atténuation de l'ampleur du statut NEET. En outre, l'âge émerge comme un facteur déterminant, avec une prévalence accrue du statut NEET parmi les jeunes adultes âgés de 20 à 24 ans. Cette tendance suggère des défis spécifiques associés à la transition vers le marché du travail ou la poursuite des études supérieures à cet âge, mettant en lumière la nécessité d'interventions ciblées pendant cette période critique de la vie. De plus, la situation matrimoniale apparaît comme un facteur influent, en particulier pour les femmes mariées qui semblent être davantage exposées à la NEETitude par rapport aux hommes et aux femmes non mariées. Celles-ci semblent être confrontée à des défis particuliers tels que les responsabilités familiales accrues, des contraintes temporelles liées à la gestion du foyer et une pression sociale persistante qui peut limiter leurs choix éducatifs et professionnels. L'éducation du chef de ménage émerge également comme un facteur significatif du statut NEET. Les individus issus de foyers dirigés par un chef de ménage sans diplôme présentent un risque accru d'être NEET, mettant en évidence l'importance du contexte socio-économique et familial dans les trajectoires individuelles. Par ailleurs, le genre en tant que tel se révèle être un facteur discriminant, avec une probabilité plus élevée pour les jeunes femmes d'être NEET que les hommes. Cette constatation souligne la nécessité de redoubler les efforts pour promouvoir l'égalité des genres dans l'accès à l'éducation et à l'emploi, afin de réduire les disparités de participation des femmes sur le marché du travail.