L'audacieuse aventure des évadés d'Air Arabia d'il y a une dizaine de jours, désormais appelée « patera aérea "a, au-delà d'une piètre tentative d'immigration clandestine, soulevé bien des questions non seulement quant à la sécurité des aéroports, mais en a suscité aussi d'autres sur de plausibles nouvelles routes migratoires vers l'Europe. Dans les faits, un Airbus A320 d'Air Arabia décolle de Casablanca au Maroc à destination d'Istanbul en Turquie. Dès la sortie du ciel marocain, un passager feint l'urgence médicale (crise de diabète). Le personnel de bord fait en vain appel à un éventuel médecin passager. L'équipage aux commandes demande alors, conformément à la réglementation aérienne à l'internationale, l'autorisation d'atterrir à l'aéroport de Son Sant Joan à Palma, sur l'île espagnole de Majorque, afin que le soi-disant passager malade puisse recevoir des soins médicaux. À l'atterrissage, l'homme avec un autre qui l'accompagnait sont transportés en ambulance à l'hôpital de Son Llatzer, escorté par des gardes civils, qui prennent la fuite dès que l'occasion se présente. Entre-temps, dans l'avion, un groupe de passagers tente de descendre. 'Il y a eu une grosse altercation à bord de l'avion, l'équipage a été réprimandé et intimidé par plusieurs passagers qui ont demandé à être autorisés à fumer et à sortir sur la piste d'atterrissage', est-il dit dans le rapport établi par un tribunal local qui enquête sur l'incident et dont des extraits sont apparus dans les médias espagnols. In fine, plus d'une 20 de passagers, tous de genre masculin, apparemment tous Marocains à l'exception d'un Palestinien, réussissent à passer outre l'équipage et le personnel au sol de qui tentaient de bloquer la porte de l'avion d'Air Arabia. Dans ce chaos, une hôtesse de l'air a été blessée. Des images montraient plusieurs hommes poussant pour descendre tandis que d'autres, déjà sortis de l'avion, sprintaient sur le tarmac. Cette présence de civils sur la piste d'atterrissage a poussé les autorités aéroportuaires à fermer l'aéroport à tout trafic trois heures durant et une trentaine de vols ont été interrompus. De cette pagaille et dans les heures qui ont suivi douze hommes ont été arrêtés, celui transporté à l'hôpital ainsi que son compagnon en premier ainsi qu'une dizaine d'autres pour faute de reconnaissance de terrain on va dire se sont faits pris, tandis que 12 migrants illégaux courent toujours. Deux d'entre eux, sans peur et sans reproche ont voyagé en ferry jusqu'à Barcelone. Cela étant les suspects arrêtés (12 hommes en détention) sont accusés d'une série d'infractions pour ne pas dire crimes, allant de la facilitation de l'immigration illégale au désordre public et à la sédition. Les évadés d'Air Arabia rattrapés Cet incident d'Air Arabia a suscité des appels à un renforcement de la sécurité à l'aéroport de Palma, l'un des plus fréquentés d'Europe, et le gouvernement espagnol a promis d'y répondre. 'Les efforts déployés visent à garantir que cela se limite à un acte absolument isolé et exceptionnel', a déclaré Aina Calvo, représentante du gouvernement central aux Baléares. 'Tous les aéroports du monde en auront pris note'. Pour sa part le consul du Maroc à Palma, Abdellah Bidoud, a qualifié cette folle aventure de ''mal pensée' et 'ponctuelle''. Par ailleurs, et dans les médias particulièrement, les spéculations vont bon train à propos de cette méthode 'inédite 'd'entrée en Europe et qui pourrait avoir créé un précédent. En effet, ces dernières années, des dizaines de milliers de migrants africains ont tenté de traverser la Méditerranée vers l'Espagne continentale et les îles Baléares, ou l'Atlantique vers les îles Canaries. Il s'agit de voyages notoirement dangereux, qui ont fait plus de 1 700 morts l'année dernière et pour lesquels les candidats à l'immigration payent des sommes astronomiques pour obtenir l'aide des trafiquants. En revanche, un vol Casablanca-Istanbul coûte autour de 200 € ou 230 $. 'Les fausses maladies, les ruées folles et autres moyens créatifs d'atteindre l'Europe' sont désormais un choix inévitable pour les migrants, note un journaliste. Malgré les inquiétudes concernant la sécurité des aéroports, il considère que de telles alternatives sont préférables aux routes plus traditionnelles 'si elles évitent le risque extrême de mort et ne profitent pas aux mafias qui contrôlent le commerce des traversées maritimes'. Mais pour autant de gentillesse où cela mène-t-il et surtout à quel prix pour la sécurité aéronautique et à l'aviation en général. Le parti d'extrême droite Vox, quant à lui, a vu cela comme une justification de sa position anti-immigrés et la preuve que les frontières aériennes, terrestres et maritimes de l'Espagne ont besoin d'une police plus stricte. En attendant, l'enquête sur l'affaire se poursuit, les enquêteurs souhaitant déterminer dans quelle mesure l'épisode a été préparé. Le fait que presque tous les hommes qui ont fui l'avion n'aient enregistré aucun bagage dans la soute laisse supposer qu'ils étaient depuis le début, de mèche, dans cette ruse perfide et machiavélique. Les enquêteurs ont également examiné un compte Facebook... pardon Meta suivi par des milliers de jeunes hommes marocains, qui aurait publié en juillet une proposition visant à mettre en œuvre un plan en espace et temps, similaire à celui-ci. Air Arabia en a fait les frais.