Dans sa présentation du projet de loi de finances rectificative pour l'année budgétaire 2020, le ministère de l'économie et des finances a indiqué que sous le double effet de la baisse de la demande des principaux partenaires et des effets des mesures de restrictions, plusieurs secteurs ont été fortement impactés par la crise, accusant ainsi des baisses drastiques à l'image notamment du secteur du Bâtiment et des travaux publics (BTP). Ce secteur a donc connu un arrêt d'activité de 56% des entreprises en avril 2020, confirmé par une baisse des ventes de ciments de 55%. En décortiquant ces deux chiffres avancés par le département de Mohamed Benchaâboun, le président du centre indépendant des analyses stratégiques, l'universitaire Driss Effina, a expliqué que l'investissement public dans sa majorité, soit +50%, va au BTP, aux infrastructures, à la construction des équipements collectifs, les routes etc. Et de préciser, dans une déclaration à Hespress Fr, que « du moment où l'Etat a gardé ses investissements presque au même niveau, cela veut dire que plus de la moitié du budget public sera consacrée à ce volet-là, qui est le BTP, à savoir la construction des routes et les grands projets d'infrastructures qui sont en cours de réalisation et qui vont se poursuivre ». Concernant la baisse 55% des ventes du ciment, notre interlocuteur explique que malgré cette baisse importante pendant la période de confinement (avril, mai, juin), « nous avons préservé 45% de la consommation de ce produit ». Les 45%, poursuit-il, concernent tout ce qui est BTP. En revanche, ce qui a été touché considérablement, c'est la construction des logements à cause notamment des chantiers de construction de logements qui étaient en arrêt forcé suite à la crise sanitaire du Covid-19, toutefois, estime l'économiste, « nous allons constater au cours des prochains mois une relance de cette composante appuyée par la construction des logements qui relève du secteur privé surtout les ménages qui construisent en auto construction et le promoteur aussi ». Donc le rattrapage de ce qui a été perdu sera de mise, explique Driss Effina puisque « nous allons constater une hausse de construction ce qui va engendrer une baisse globale du volume d'activité du secteur de BTP à la fin de l'année de l'ordre de 15%, sachant que le PLF prévoyait une baisse de 20% ». Cette baisse globale du volume d'activité dans le secteur du BTP, malgré la hausse en termes de construction s'explique par plusieurs facteurs, souligne l'expert en économie pour qui « on ne pourra pas tout rattraper« . « C'est une perte colossale que le secteur du BTP a subie. Je pense qu'elle ne pourra pas être rattrapée d'ici la fin de l'année pour plusieurs raisons. Il y a premièrement des mois perdus, la fête du Aïd Al Ahda qui fait perdre au secteur 20% du volume d'activité. Il y a aussi des événements que nous analysons d'une année à une autre qui font que l'activité du BTP baisse considérablement comme la rentrée scolaire, le mois d'août celui des congés, le mois de Ramadan est déjà consommé donc on ne va pas l'avoir une deuxième fois au cours de cette année. Il y a aussi le risque de la forte pluviométrie à la fin d'année (novembre et décembre) qui impactera aussi le secteur », explique p-t-il. Il y a aussi un autre facteur qui va jouer contre le secteur des BTP et qui est l'immobilier. Comment ? L'économiste explique que les « primo accédant » au logement sont les jeunes ménages qui arrivent au marché et qui achètent des logements. Ces derniers sont généralement liés à la création d'emploi, et étant donné que nous avons eu une destruction massive d'emploi au cours de ces trois derniers mois, il est sûr que les achats vont baisser considérablement, estime Driss Effina. S'agissant des Marocains résident à l'étranger (MRE), qui dynamisent énormément le secteur de l'immobilier à travers l'achat ou la construction directe, ils auront également un impact sur le secteur suite à la crise du Covid-19, dit-il encore. Il convient de rappeler que le PLF rectificative au titre de l'année budgétaire 2020 prévoit une prorogation des délais des conventions relatives aux programmes de construction de logements sociaux. Dans le cadre des mesures visant l'accompagnement par les pouvoirs publics, des secteurs durement affectés par la pandémie du coronavirus, il est proposé de proroger de six (6) mois les délais des conventions conclues entre l'Etat et les promoteurs immobiliers qui ont des difficultés à achever la réalisation dans le délai de 5 ans, leurs programmes de construction de logements sociaux qui se trouvent dans leurs phases finales, est-il notamment souligné dans le projet. Cette mesure, qui vise à tenir compte de l'arrêt de l'activité des entreprises des travaux de bâtiment pendant toute la durée de l'état d'urgence sanitaire et des répercussions financières dues à la crise sur la reprise de leurs activités, s'applique aux conventions des programmes de construction de logements sociaux dont le délai expire durant la période allant de la date du début de l'état d'urgence sanitaire jusqu'au 31 décembre 2020.