Des heurts ont opposé vendredi des députés prodémocratie et des élus pro-Pékin à l'intérieur du Conseil législatif (LegCo), le Parlement hongkongais, qui est au centre de nouvelles tensions entre le gouvernement chinois et l'opposition locale. L'ex-colonie britannique a connu de juin à décembre sa pire crise politique depuis sa rétrocession à la Chine en 1997, avec des manifestations souvent violentes pour dénoncer des ingérences de plus en plus fortes de Pékin dans les affaires de sa région semi-autonome. L'épidémie de coronavirus a contribué à réduire la contestation dans la rue, mais la crise politique n'a en aucun cas été réglée, comme en témoigne le blocage depuis sept mois, par des députés pro-démocratie, de l'activité du LegCo, une institution partiellement élue au suffrage universel. Ces derniers ont multiplié les actes d'obstruction pour empêcher l'examen d'un projet de loi réprimant le manque de respect à l'hymne national chinois. Le retard pris par ce texte a été à l'origine le mois dernier de violentes critiques du Bureau de liaison, l'organe du pouvoir central chinois à Hong Kong. Les heurts de vendredi se sont cristallisés autour de la direction du Comité de la chambre (House committee) dont le rôle est de passer en revue les projets de loi avant qu'ils ne soient examinés. Ce comité n'a plus de leader depuis octobre. Voilà des mois que les élus pro-démocratie sont parvenus à empêcher la désignation d'un nouveau leader, à la faveur des rares pouvoirs qu'ils ont au sein d'un corps législatif dominé par les pro-Pékin. Vendredi après-midi, l'une des pro-Pékin, Starry Lee, s'est installée dans le fauteuil de leader en s'abritant derrière une analyse juridique rédigée par des avocats du gouvernement allant dans son sens. Mais des élus de l'opposition, mettant en avant leurs propres arguments juridiques, l'ont accusée de violer la loi. Le chaos s'est ensuite emparé de la chambre. Des agents de sécurité et des élus pro-Pékin se sont rangés autour de Mme Lee alors que les pro-démocratie tentaient d'imposer leur propre candidat au poste. L'un a même essayé d'escalader un mur pour arriver à la tribune. Des agents de sécurité ont alors évacué de force plusieurs élus pro-démocratie, tandis que les parlementaires rivaux arboraient des pancartes et filmaient avec leurs téléphones et et retransmettaient en direct cette confusion avec leurs réseaux sociaux. La Chine n'a pas caché son agacement face à l'obstruction des pro-démocratie ces derniers temps. Au point que le Bureau de liaison ait laissé entendre que ces blocages pourraient valoir des poursuites judiciaires aux élus d'opposition. Les pro-démocratie s'étaient empressés de dénoncer cette prise de position comme une ingérence inacceptable de la Chine, alors que Hong Kong est censé être régie jusqu'en 2047 par le principe « Un pays, deux systèmes ». La crise politique a alors viré à la crise constitutionnelle, quand le Bureau de liaison a affirmé qu'il n'était pas tenu par les dispositions de la mini-constitution hongkongaise interdisant aux organes du gouvernement chinois de s'immiscer dans les affaires hongkongaises.