L'association Thafra pour la fidélité et la solidarité a toujours dénoncé les conditions pénibles de détention des détenus du Hirak du Rif. De son côté, l'administration pénitentiaire, dirigée par Mohamed Salah Tamek a toujours opposé des démentis formels. Un bras de fer qui pourrait se terminer devant les tribunaux. Le point. Dernier événement en date, plusieurs détenus du Hirak du Rif, dont le leader Nasser Zefzafi, sont en grève de la faim aux prisons locales de Ras El-Ma à Fès et de Guercif. Ces informations confirmées par Thafra, ont été catégoriquement démenties, encore une fois, par la délégation générale de l'administration pénitentiaire et de la réinsertion (DGAPR). Ce bras de fer entre les deux parties est tel qu'elles ont, l'une comme l'autre, menacé de recourir à la justice. En effet, la DGAPR, et suite à l'annonce de la bataille des ventres vides par Thafra, a annoncé dans un communiqué son intention de poursuivre en justice Ahmed Zefzafi, président de l'association et père de Nasser Zefzafi. Le père du leader du Hirak est accusé par la DGAPR de lancer des « accusations mensongères dans ses déclarations » et de « servir des agendas étrangers ». De son côté, Thafra, qui a précisé qu'outre Nasser Zefzafi et Nabil Ahamjik, d'autres détenus ont également déclaré à leurs familles l'entame d'une grève de la faim, a fait savoir que si Tamek et son institution décident d'aller devant la la justice, elle promet d'offrir le « procès du siècle ». Jointe par Hespress Fr au sujet de ce torchon qui brûle depuis assez longtemps déjà entre Thafra et la DGAPR, la militante pour la libération de tous les détenus politiques et d'opinions au Royaume et ex-présidente de l'AMDH, Khadija Ryadi, affirme que tout cela n'est pas nouveau. «Ce n'est pas la première fois que la DGAPR réagit ainsi », et cela fait des années que l'institution de Tamek « ne fait que répondre aux communiqués et aux rapports et démentir tout ce qui se dit sur l'administration pénitentiaire », nous dit-elle. Selon la lauréate du Prix 2013 des Nations unies, « tout le monde sait très bien ce qui se passe dans les prisons du Maroc et la situation alarmante des détenus du droit commun et d'opinion. La situation reste bien connue de tous. Mais le délégué général essaie à travers ses manœuvres de faire peurs aux gens pour qu'ils ne dénoncent plus ce qui se passe. Une tentative de faire peur et de faire taire les gens ». Toutefois, notre interlocutrice demeure sceptique quant à un éventuel affrontement devant les tribunaux entre Thafra et la DGAPR. « Peut-être que oui. (…) ça peut aller jusqu'au procès mais ça ne servira à rien puisqu'aujourd'hui, toutes les organisations mondiales des droits humains les plus connues et les plus crédibles suivent très bien ce qui se passe au Maroc. Elles savent très bien que les détenus ont été torturé » indique-t-elle Khadija Ryadi évoque également le rôle du Conseil national des droits de l'Homme (CNDH), d'Amina Bouayach. Elle souligne à cet égard, que « même le CNDH, qui est une institution marocaine officielle, a bien déclaré dans son rapport, à travers des certificats médicaux de médecins légistes que les détenus du Hirak ont été torturés ». « Il faut d'abord ouvrir une enquête sur la question de la torture », estime-t-elle, puisque « le Maroc est partie à la convention internationale contre la torture et plusieurs autres conventions qu'il doit respecter (...) et enquêter sur les auteurs de ces crimes ». Et de souligner que justement, « le CNDH en tant qu'institution officielle, doit œuvrer pour que la politique de l'Etat soit conforme aux engagements internationaux du Maroc. Elle doit mettre le doigt sur toutes les violations qui existent au Royaume, les montrer, et travailler pour que les choses changent ». Rappelant que l'AMDH, qu'elle présidait à l'époque (2013) avait applaudi le rapport du CNDH sur la situation dans prisons au Royaume, Khadija Ryadi déplore que les recommandations n'aient jamais vu le jour. « Nous avons fait un communiqué spécial en 2013 sur ce rapport. Nous l'avons bien lu, et nous avons applaudi le CNDH pour son travail, puisque le rapport montrait clairement la situation des détenus qui est alarmante. On a également déclaré que nous soutenons toutes les recommandations qui ont été soulignées à la fin du rapport du CNDH et que nous exigeons qu'elles soient mises en œuvre», nous confie Khadija Ryadi. Mais malheureusement, relève-t-elle, « le problème qui s'est posé est que les recommandations du CNDH n'ont jamais été appliquées jusqu'à aujourd'hui. C'est pour ça que les problèmes persistent dans nos prisons surtout à l'encontre des détenus politiques et d'opinion, dont le CNDH nie l'existence ». Et de conclure que « le problème du CNDH, est qu'il élabore des rapports qui ne s'appliquent jamais ».