Les quotidiens maghrébins consacrent mardi 4 septembre leurs titres à la Une et leurs commentaires à plusieurs sujets relatifs notamment aux derniers développements politiques en Tunisie, à la censure politique en Algérie et aux élections en Mauritanie. « La presse de Tunisie » écrit, dans un éditorial intitulé « Luttes de clans paralysantes », que « le temps est poisseux, l'atmosphère est lourde et viciée mais c'est bien de politique plutôt que de météo qu'il s'agit ». Rencontrés partout, les Tunisiens étalent leur sentiment de lancinant étouffement et de profonde angoisse du grand jour, commente la publication, expliquant que les luttes de clans et de coteries au sommet de l'Etat battent leur plein, depuis des mois et les charges des uns contre les autres sont légion. Elle relève qu' »à coups de révélations supposées fracassantes relayées le plus souvent dans les réseaux sociaux par milices électroniques antagoniques interposées, la scène politique s'apparente à une véritable foire d'empoigne », ajoutant que « les coups bas fusent de partout sans égard à l'éthique, la déontologie et autres règles premières de décence et de bienséance ». Le journal considère que « le pire c'est que cela a débordé sur deux enceintes jusqu'ici épargnées un tant soit peu par les sordides règlements siciliens de naguère, ajoutant que les institutions souveraines de l'Etat (présidence de la république et du gouvernement ainsi que le parlement) s'étripent au grand jour. Selon la publication, la cohérence et l'efficience même de la majorité gouvernementale en supportent les contrecoups pervers. De son côté, « Le Temps » qui titre « Possible report des élections de 2019: Il n'y a pas de fumée sans feu », souligne que c'est prématuré actuellement de parler de ce scrutin surtout qu'il reste encore plus de quinze mois au moins pour arriver à cette échéance et que beaucoup d'eau coulera sous les ponts, avant la date fatidique. Il estime toutefois que le détenteur actuel du « plus grand nombre de sièges » lors des précédentes législatives « serait tenté, au vu de ses performances ridicules, de manigancer un report qui lui permettra de se revigorer, si cela est encore possible, et de rêver de remporter le scrutin, alors que ses dirigeants et ses membres ont tout fait pour éclater la citadelle qui avait eu raison d'Ennahdha, il y a près de quatre ans ». Le quotidien fait observer que face à cette idée, des partis se sont opposés à cette possibilité, jugeant qu'elle est inadaptée, comme c'est le cas avec l'Union Patriotique Libre qui a mis en garde contre la gravité des appels au report des prochaines élections législatives et présidentielle, considérant que ces appels sont « irresponsables » et peuvent « nuire à l'image de la Tunisie à l'étranger ». Pour sa part, « Le Quotidien » se demande : « que faut-il faire pour sortir de l'impasse? », relevant que les partis au pouvoir, ainsi que les partenaires sociaux sont incapables d'accorder leurs violons sur une vision claire pour faire sortir le pays de cette crise qui ne cesse de s'approfondir. « En tirant chacun la couverture à soi, les dirigeants au sommet de l'Etat ne semblent pas être pressés par l'urgence de redresser le tir et remonter la pente de la crise », déplore-t-il, ajoutant que tout le monde s'accorde sur le fait que la situation du pays est devenue insupportable. Cité par le journal, le président du comité constitutif du mouvement des démocrates sociaux, Ahmed Khaskhoussi, estime impératif de demeurer à l'écart des polarisations bilatérales, d'oeuvrer au service de l'intérêt du pays et de réaliser les aspirations du peuple tunisien en ce moment décisif loin des tiraillements et de la rhétorique « populistes » qui détournent les gens de leurs véritables préoccupations.En Algérie « Liberté » relève que la censure officielle sévit de nouveau en Algérie et vient de frapper du sceau de l'interdit la sortie en salle du film historique sur Larbi Ben M'hidi, héros de la guerre de Libération nationale, mort exécuté par un commando en mars 1957. Dans son éditorial intitulé « La deuxième mort de Ben M'hidi », le quotidien souligne que les bureaucrates du Centre de recherche et d'études sur le mouvement national et la Révolution, « organisme qui assume cette censure décidée sûrement ailleurs, pour ne pas dire plus haut », disent trouver le biopic à la fois « pas trop politique à leur goût » et ne contenant pas « assez de violence et de torture ». « On sait, depuis le film 'L'opium et le bâton' déjà, voire depuis l'indépendance, que l'histoire officielle n'admet pas que la Révolution algérienne soit perçue dans son authenticité, c'est-à-dire aussi comme une guerre qui a ses hauts faits d'armes et ses bravoures, mais seulement comme une épopée où tous les héros se congratulaient en frères », note-t-il. L'éditorialiste estime que « de là à réclamer des cris et du sang, c'est tout de même un peu trop demander s'agissant d'un récit qui se propose de retracer le parcours d'un homme qui a marqué une séquence importante de notre histoire contemporaine ». Pour leur part, « Echorouk » et « EL Khabar » notent que la sentence vient de tomber concernant le film « Ben M'hidi » de Bachir Derraïs : il est interdit de projection en Algérie. En réaction à cette décision, Bachir Derraïs s'est dit « vexé » et « choqué ». Le plus « hallucinant », entre autres, dans le courrier du Centre de recherche et d'études sur le mouvement national est d'avoir accusé le réalisateur de « toucher » aux symboles de la Révolution, s'étonnent les publications. « La commission de censure n'a pas aimé le fait de voir les moudjahidine avoir des différends. Ils voulaient voir tout le monde s'aimer et s'embrasser. Alors que la réalité était autre », indiquent-elles. Elles expliquent que pour la concrétisation de ce projet, Bachir Derraïs a dû faire des recherches minutieuses entre témoignages de la famille de Ben M'hidi, des historiens et d'images d'archives. Sous le titre « Scandale », « Le Matin d'Algérie » écrit qu'au moment où les officiels de la culture invitent Gérard Depardieu pour jouer à coup de devises sonnantes et trébuchantes le rôle du Dey Hussein, celui-là même qui a remis les clés d'Alger aux Français en 1830, le film d'un héros de l'indépendance est interdit. Le biopic qui retrace la vie de l'immense Larbi Ben M'hidi est interdit par le ministère des Moudjahidine et, pourtant, ce film a obtenu toutes les autorisations de la part des scribes du ministère, s'étonne le journal, estimant qu' »il est d'évidence que ce ministère qui exerce son magistère d'une manière implacable et autrement peu scientifique sur l'histoire de la révolution est devenu une officine de censure ». Le quotidien ajoute que Ben M'hidi est un personnage emblématique de la révolution algérienne et que son aura auprès de la jeunesse algérienne en mal de repères a gagné en importance. « El Watan » regrette, à son tour, que le film « Ben M'hidi » de Bachir Derrais, dont la sortie internationale est prévue pour le mois en cours, soit interdit de projection en Algérie. Ce long métrage de plus de 2 heures, dont le scénario a été écrit par l'écrivain-journaliste Mourad Bourboune, devait sortir à la même période, soit en septembre 2018, en France, en Italie, au Portugal et au Canada, avait annoncé, il y a quelques mois, le réalisateur. D'autres journaux relèvent que la censure officielle en Algérie refuse de laisser raconter Ben M'hidi autrement que comme le héros qui a subi d'atroces tortures et qui en est mort. « Pour les censeurs, Ben M'hidi l'homme, le politique, le visionnaire, le dirigeant, le référent (...) ne devrait pas exister », soulignent-ils. En Mauritanie, les journaux continuent à consacrer de larges commentaires aux résultats préliminaires des élections législatives et locales qui ont eu lieu samedi dernier, ainsi qu'au retard dans l'annonce de ces résultats et la réponse de la Commission Electorale Nationale indépendante (CENI) aux critiques qui lui sont adressées. Citant un responsable de la Commission électorale, ils précisent que l'opération de dépouillement des bulletins de votes a concerné jusqu'à présent 1.400 bureaux sur les 4.000 bureaux répartis sur l'ensemble du territoire mauritanien. L'annonce des résultats définitifs pourrait avoir lieu mercredi, notent-ils encore, en soulignant que la déclaration officielle et finale de la Commission électorale sera faite, une fois que toutes les wilayas du pays auraient finalisé leurs rapports d'activité du scrutin. La CENI multiplie ses efforts pour que l'opération de dépouillement des bulletins de vote du scrutin du 1er septembre se déroule en conformité avec les normes techniques et professionnelles, assure le même responsable, relevant que tout sera connu au moment opportun, selon les moyens et outils de communication disponibles, modernes et sécurisés. Les quotidiens mauritaniens rapportent également des déclarations du président de la Commission électorale, Mohamed Vall Ould Bellal qui a livré les « raisons suffisantes » expliquant le « retard » de la proclamation des résultats des élections. « Je pense que réclamer les résultats d'élections auxquelles ont pris part 98 partis en confrontation dans cinq scrutins, dans un pays aussi vaste que la Mauritanie et en période d'hivernage, avec les difficultés de transport inhérentes à cette situation, n'est pas raisonnable du tout », estime-t-il. Il dit aussi comprendre que les Mauritaniens vivent encore la fièvre des élections et l'empressement des partis politiques à connaître les résultats.