L'année 2019 égraine ses derniers jours, l'occasion de revenir avec Abdelhamid Benkhattab, professeur de sciences politiques à la faculté de droit Agdal-Rabat, sur les grands faits l'ayant marquée. D'emblée, notre interlocuteur affirme que l'année n'a pas été par des événements majeurs «à proprement parler, parce que le Maroc est entré ans ce qu'on peut appeler une normalisation politique, autrement dit une sorte de stabilité politique qui fait qu'il n'y a pas de rupture majeure dans les affaires politiques». «Il a y eu quelques événements routiniers, ou encore des échéances, mais pas de rupture majeure», nous dit-il. Selon lui, on pourrait retenir, tout de même retenir 3 faits saillants au plan national, à savoir le remaniement ministériel, le lancement de la ligne à grande vitesse (LGV) et le lancement du chantier de réflexion sur le nouveau modèle de développement. Rendre l'incohérent...cohérent Pour ce qui est du remaniement ministériel, opéré le 9 octobre dernier, Benkhattab relève, en effet, que «depuis son investiture, le gouvernement Otmani1 a été taxé de fragile et d'incohérent, à tel point qu'on disait au départ, déjà, qu'il ne pourrait pas achever son mandat. C'était un pari, et il s'est avéré plus tard qu'effectivement, il y avait une incohérence au sein de l'équipe gouvernementale, qu'il était nécessaire de corriger». Le remaniement, détaille-t-il, «est intervenu justement pour, corriger d'abord ce gonflement au niveau des postes ministériels, mais aussi cette incohérence au niveau de l'action gouvernementale dans sa globalité», car dit-il, «il était apparu clair en effet, que le nombre de départements ministériels et l'hétéroclisme de ses composantes était un obstacle pour la mise en œuvre du programme gouvernementale et assurer une certaine cohésion en matière de politiques publiques nationales». Et d'ajouter que «l'équipe Otmani 2 avait donc pour objectif la rationalisation de l'action gouvernementale d'un côté, mais aussi pour économiser en termes de temps de prise de décision, en ce sens que dans la configuration précédente, la prise de décision était tellement délicate et difficile, qu'elle avait un coût élevé en termes de temps». Le Maroc dans la cour des grands La mise en service commercial de la LGV Al Boraq, qui a soufflé sa première bougie le 20 Novembre 2019, avec à la clé 2,5 millions de voyageurs transportés en une année, constitue aux yeux de notre interlocuteur, le deuxième événement majeur à retenir, car constitue, selon lui, «l'incarnation de ce sursaut moderniste de l'économie marocaine, en termes essentiellement d'infrastructure». «C'est un outil de premier plan qui permettra de booster l'économie nationale et de de donner une meilleure image du Maroc au plan continental et celui du monde arabe», estime-t-il. L'émergence du Maroc comme objectif Pour ce qui est du troisième fait marquant, poursuit notre expert, c'est sans nul doute, le chantier du nouveau modèle de développement, porté par le Roi Mohammed VI. Il souligne à cet effet que «la réflexion autour du nouveau modèle de développement reflète, en soi, un certain échec de l'ancien modèle qui est arrivé à terme, en ce sens que le modèle entamé il y a une dizaine d'années, s'est essoufflé sans pour autant avoir pu assurer le décollage économique du Maroc, en dépit des efforts colossaux déployés par l'Etat». Le diagnostic est là, connu de tous : Inégalités spatiales sociales, disparités entre hommes et femmes, entre campagne et ville, lettrés et illettrés, soit des problématiques qui n'ont pas été résolues par l'ancien modèle de développement, met en avant l'universitaire. Par conséquent, affirme-t-il, «l'année 2019 sera donc une année charnière qui va ouvrir la voie pour une réflexion profonde sur le nouveau modèle à venir« . Cela s'est répercuté sur la composition même de la commission Benmoussa, nous dit Benkhattab, notant : «Nous sommes devant une équipe de techniciens et technocrates, qui vont réfléchir de manière +politiquement désintéressée+ sur ce nouveau modèle, indépendamment des substrats idéologiques et substrats politiques, autrement dit, proposer un modèle de développement qui soit inclusif tant au niveau spatial, qu'économique et social et justement cette inclusivité sociale, politique et économique manquait terriblement à l'ancien modèle, et a bloqué en quelque sorte cette émergence du Maroc aux niveaux régional et international».