Les autorités ont autorisé les hammams de la ville blanche à rouvrir dès aujourd'hui, jeudi 18 mars. Passée la joie de cette annonce, les propriétaires doivent faire face à de coûteux travaux pour réparer les « nombreux dégâts » causés par la fermeture prolongée. Après près de 7 mois de fermeture, les hammams de Casablanca peuvent enfin respirer et recevoir leur clientèle. La décision des autorités de rouvrir ces espaces de détente et d'hygiène, à condition bien sûr de respecter des mesures sanitaires strictes, a été accueillie par un grand soulagement de la part des professionnels du secteur qui avaient multiplié dernièrement les sorties et autres manifestations afin de faire entendre leurs revendications. Sauf que cette décision n'a pas fait que des heureux. En pleine crise après des mois de fermeture, certains propriétaires de hammams traditionnels n'ont pas pu ouvrir faute de moyens financiers. « Rien qu'à Casablanca, j'ai reçu ce matin la confirmation que 25 propriétaires sont dans l'impossibilité d'ouvrir leurs établissements. Certains n'ont même pas l'argent pour acheter le bois nécessaire au chauffage des salles », nous déclare Rabie Ouaacha, président de la Fédération nationale des associations de propriétaires et gérants de hammams traditionnels et douches publiques au Maroc. Car il ne s'agit pas d'une simple ouverture des portes. Des mois d'inactivité ont détérioré les installations de ces établissements. Un entretien spécial était donc obligatoire afin de purger les canalisations, les chaudières, revoir les revêtements, etc. Selon une estimation du Syndicat national des propriétaires des hammams et douches de Casablanca, il faut entre 140.000 et 200.000 DH pour la réalisation de ces travaux nécessaires.
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Une somme hors de portée pour plusieurs propriétaires, déjà sévèrement impactés par l'inactivité. « Les grands propriétaires ont les reins assez solides pour se permettre ces travaux. Pour les autres, ils ont pu compter sur le soutien de leur famille ou sur l'entraide entre différents propriétaires pour mutualiser les coûts », nous précise Rabie Ouaacha. Une solution provisoire en attendant le déblocage de crédits à taux préférentiels (moins de 2,5%) par les institutions financières pour les professionnels du secteur qui leur a été promis par le ministère du Tourisme, dont l'intervention sur ce dossier a été salutaire. « Les dégâts sont énormes » Du côté des spas et hammams individuels plus haut de gamme, les propriétaires n'ont pas non plus été épargnés par la nécessité des travaux d'entretien. Soraya Ziani, propriétaire du hammam Ziani, nous confie avoir du emprunter 120.000 DH pour réaliser ses travaux d'entretien avant la réouverture. « Il y a une semaine, j'avais demandé aux autorités l'autorisation d'allumer mes chaudières pour évaluer leur état. Il s'est avéré qu'elles étaient bousillées », rapporte cette professionnelle, précisant que chaque chaudière à vapeur coûte quelque 25.000 DH. Pour les produits désinfectants et d'hygiène, elle a du débourser environ 9.000 DH. La propriétaire de ce bain turc a pu accueillir ses premiers clients ce matin. « Même si je ne connaissais pas la date de réouverture, j'ai anticipé mes travaux, mais certains de mes confrères n'ont pu rouvrir car ils ont trouvé leurs chaudières dans un état catastrophique ». Même combat du côté de Maison d'Asa, un spa/hammam haut de gamme qui abrite une quinzaine de postes de travail. « Les dégâts sont énormes », annonce la propriétaire Asma El Mernissi. « J'ai du tout revoir: l'électricité, les sols, la peinture, la robinetterie, l'éclairage, le mobilier… J'étais déjà en travaux depuis quelques temps; pour ma part, les travaux s'élèvent entre 400.000 et 500.000 DH que je suis en train de débloquer au fur et à mesure », précise la professionnelle qui envisage de recevoir ses premiers clients à partir de demain. « On va reprendre l'activité et on constatera sûrement d'autres problèmes techniques au fur et à mesure. Ce n'est pas évident de rouvrir du jour au lendemain pour des établissements fermés depuis des mois », concède Asma El Mernissi.
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A EffervOsens Spa, salon de coiffure et d'esthétique, Anna Perez également reprend son activité de hammam petit à petit. Ses deux salles individuelles consacrées sont utilisées alternativement, afin que l'une soit désinfectée pendant que l'autre est occupée. Pour les remettre en marche, la professionnelle a du dépenser à peu près 20.000 DH. « On a du faire de petits travaux de peinture, vidanger les machines car elles étaient éteintes pendant six mois, nettoyer les systèmes d'aération. Le froid a abimé le matériel », explique-t-elle. Concernant les mesures sanitaires de sécurité, les trois intervenantes ont tout prévu pour respecter la distanciation sociale (horaire client espacé, visière pour le personnel, gel hydroalcoolique) et la désinfection des espaces entre chaque cliente. A ce propos, Asma El Mernissi lance un appel à tous ses confrères: « Attention, ce n'est pas parce qu'on est autorisé à ouvrir qu'il faut oublier les mesures d'hygiène et de sécurité pour le bien de tout le monde ».